Le 12 octobre 2012
- Genre : Cinéma
– de Peter Szendy
– date de parution : le 12 octobre 2012
Les cataclysmes au cinéma dans un bel ouvrage à découvrir aux éditions Capricci.
Les cataclysmes au cinéma dans un bel ouvrage à découvrir aux éditions Capricci.
Présentation de l’éditeur : L’apocalypse-cinéma, ce n’est pas seulement la fin des temps si souvent donnée à voir récemment, à grand renfort d’effets spéciaux. Le philosophe Peter Szendy avance l’hypothèse que c’est aussi sa propre limite que le cinéma travaille et affronte là : l’apocalypse-cinéma, c’est à la fois, d’un même et terrible coup double, la fin du monde et la fin du film. Il décrit les figures de ces deux fins en une : le compte à rebours, l’aveuglement, la radiation, le gel, la fêlure, la déchirure sismique… Autant de prétextes pour mettre en scène le cinéma lui-même, avec ses décomptes ou ses rewinds, ses images surexposées et ses fondus au blanc, ses retouches numériques, ses arrêts sur image ou ses raccords.
Allant et venant entre le cinéma et la philosophie, Steven Spielberg, Lars Von Trier et Martin Heidegger, empruntant ses exemples à des superproductions récentes comme 2012, Le Jour d’après, Watchmen ou Terminator 3, mais aussi à des films plus singuliers comme Blade Runner, Melancholia, Cloverfield, L’Armée des douze singes ou A.I., il montre que ce que ses fans surnomment « apo » n’est pas un simple genre parmi d’autres. Il s’agit à chaque fois, pour le cinéma, de s’exposer.
Penser la fin du monde, c’est donc toujours aussi porter le cinéma au bord de sa disparition. Au bout du compte, à la fin du décompte, le cinéma rêve de se reconstituer en se perdant. Tel est le propos de ce livre à la fois érudit et passionné, aussi brûlant et actuel que le sujet qu’il aborde.
Notre avis : "Nous nous sentons tous contemporains de la création", écrivait Melville. "De là cette répugnance à mourir avant que le monde lui-même ne disparaisse". Cette remarque pourrait, en un sens, résumer le propos de Peter Szendy dans cet ouvrage, qui se livre avec originalité au dépoussiérage de nos vieilles catégories d’analyse pour mieux interroger, à travers une succession d’arrêts sur images, la possibilité de penser un genre : celui du "film apo" avec ses lieux communs et ses détours obligés. Mais qu’on ne s’y trompe pas, la notion de "genre" est ici toute relative et Szendy ne se prive pas de railler ça et là sa prétendue fonctionnalité. Même si L’apocalypse cinéma se penche sur une identité générique, c’est davantage pour questionner son rapport au septième art que pour en circonscrire étroitement les limites.
Il n’est pas anodin que le septième art ait pris forme dans un siècle réputé "de destruction massive". Szendy suggère à plusieurs reprises que la dimension cataclysmique lui est, en quelque sorte, intrinsèque. Ses exemples ne sont pas seulement empruntés aux vingt dernières décennies (qui ont certes vu fleurir et s’épanouir le "genre apo"), mais également à certains auteurs du début du siècle (Buster Keaton notamment). Par ailleurs, loin de considérer le film comme un objet clos, l’auteur n’a de cesse de s’intéresser à ce qui, au sein de l’oeuvre, permet d’en questionner le support matériel (d’où une attention constante et minutieuse à la technicité du cinéma).
Sans préjugé d’aucune sorte (on est notamment frappé par la variété des exemples, allant de Keaton à South Park), le philosophe raconte et ausculte les aspects cataclysmiques du septième art, montrant leur interaction profonde avec notre manière de percevoir le temps. Etant un art spectaculaire et total, le cinéma entraîne plus qu’aucun autre ce sentiment de confusion très fort non seulement entre le réel et le fictif, mais aussi entre la temporalité diégétique du film et le temps "réel" de sa représentation - confusion qui inspire à Szendy une analyse remarquable d’un film comme Melancholia, qui n’est toutefois pas le seul à avoir joué d’une telle confusion ces dernières années (songeons, sur un mode parodique, au final de Kaboom). On pourra bien sûr reprocher à l’ensemble ce va-et-vient permanent entre textes de philosophie "classiques" et films contemporains, mais ce serait passer à côté du dynamisme qui donne forme à la pensée singulière de Peter Szendy.
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