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Le 17 novembre 2004


Un roman fiévreux sur l’inutilité de rentrer dans le rond.
Un roman fiévreux sur l’inutilité de rentrer dans le rond.
En dessous, il y a Lagrange. Qui susurre, qui passe et qui repasse, qui cuisine du poulpe en daube. Lagrange, pas de prénom, pas beaucoup de vie là-dedans, pas de fièvre en tout cas. C’est pour ça qu’il l’a choisie. Lui, l’écrivain retranché dans sa mezzanine. L’auteur publié dont un des monologues à été "créé par Jeanne B., l’actrice". L’acrobate cherchant à garder l’équilibre dans cette vie nouvelle, ronronnante, débarrassée des "fiévreuses" qu’il coinçait le soir dans les cages d’escalier. Des filles "maigres aux crinières mal démêlées, aux yeux cernés et mal maquillés, aux vieux jeans sur leurs chétives fesses, autant dire leur absence de fesses, leur espèce de cul de rat".
Rien à voir avec le cul, d’ailleurs, ses crises, sa nécessité de fiévreuses. Même si, quand même, il en a ramené trois dans sa "carrée", déshabillées et photographiées avec leurs "frêles cannes en position de grenouille". Le début de la fin, ces photos, un cliché tombé de son porte-feuille, la rumeur qui court, enfle, le contraignant à rentrer dans le rang, dans le rond, dans ce cocon tissé par Lagrange, mais avec toujours en lui le souvenir de Sophie Roche, fiévreuse idéale, perdue, bientôt retrouvée, il l’espère, il l’écrit.
Son histoire, c’est L’acrobate, court roman de Jacques Serena, désabusé, cynique, plantant ses mots dans le conformisme ambiant. Un éloge de la fièvre, celle qui réchauffe la vie, qui la brûle aussi, qui malmène avec bonheur la grammaire française. Haché, risqué, inventif, L’acrobate a la folie contagieuse. Dans la forme surtout, fébrile délice de lecture. Le propos, lui, à trop réduire Lagrange à sa caricaturale gelée de groseille tartinée au réveil, retombe par instant à un modeste trente-sept degrés cinq. Ce qui, au demeurant, est déjà pas mal.
Jacques Serena, L’acrobate, Minuit, 2004, 128 pages, 13 €