Critique

LIVRE

Justice indienne - David Heska Wanbli Weiden - critique du livre

Le 8 janvier 2021

Cette plongée dans les coutumes lakotas souffre d’une surprésence d’énoncés factuels et d’une trop grande pudeur : l’atmosphère n’est ainsi qu’esquissée, alors que l’occasion aurait été parfaite pour démystifier les légendes blanches et les stéréotypes.

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Crédits : Gallmeister
  • Kirzy 9 février 2021
    Justice indienne - David Heska Wanbli Weiden - critique du livre

    Ce premier roman ( noir ) très réussi commence avec une enquête sur les traces de trafiquants d’héroïnes qui sévissent dans une réserve indienne du Dakota du Sud. le récit est plein d’actions, débordent de criminels, de poursuites de combats ( incroyable baston à mort avec un aiguillon à bétail ). le narrateur, Virgil, est un justicier professionnel, un homme de main payé pour venger avec les poings les criminels locaux.

    A mesure que le récit progresse, le polar se fait de plus en plus intimiste, nous plongeant dans le ressenti de personnages très attachants, à commencer par Virgil : lui a renié les traditions lakotas depuis des tragédies familiales qui l’ont conduit à élever seul son neveu, adolescent à la dérive, proie facile pour les trafiquants d’opioïdes. Un personnage à l’identité déchirée, héros parfait pour ce type de roman.

    Roman noir, policier, intime mais aussi et surtout social, décrivant de façon très réaliste et authentique le vécu des Amérindiens. La colonne vertébrale du récit est la vulnérabilité des habitants des réserves. En fait, Justice indienne a une forte dimension politique qui attire l’attention sur la faillite du système judiciaire dans les réserves. Depuis le Major Crimes Act voté en 1885 par le Congrès américain, la police tribale n’a aucune compétence pour instruire des affaires criminelles sur son propre territoire. Dès qu’il s’agit de meurtres ou agressions sexuelles, elle doit en référer aux autorités fédérales qui beaucoup trop souvent n’engagent aucune poursuite, même lorsque le coupable est identifié. On sent la colère de l’auteur de voir ses personnages poussés à se faire eux-même justice, ce qui équivaut à de la vengeance pure et simple.

    Si la trame narrative policière est peu rigoureusement construite, souvent brouillonne avec des redondances qui auraient mérité une petite coupe , tout l’arrière-plan politique et social est absolument passionnant, surtout sous la conduite de personnages qu’on adopte immédiatement. C’est à travers eux qu’on découvre la culture lakota et son histoire. C’est toute la question de l’identité des Native americans qui jaillit de chaque situation. Loin des clichés habituels, Justice indienne met en lumière la difficulté pour les Amérindiens à maintenir l’intégrité de leur mode de vie et de leur vision du monde. Une scène très intense met ainsi en scène Virgil, le "renégat", lors de la cérémonie du yuwipi ( cérémonie de guérison traditionnelle Lakota ), où en proie à des hallucinations, il revit le massacre de Wounded Knee de 1890. Virgil, qui rejette la spiritualité lakota, devra se réconcilier avec elle pour résoudre l’enquête et surtout se construire un avenir.

    David Heska Wanbli Weiden est un auteur très prometteur. Empli d’une acuité à la fois tendre et acéré, il a beaucoup à dire sur la condition amérindienne contemporaine.

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