Critique : Un malentendant qui entend un vacarme permanent... Frédéric Deban est tombé dans un autre monde pendant plus de cinq ans. Comédien populaire, il a soudain été happé dans un autre registre.

A travers son seul en scène, l’artiste nous raconte, par bribes, son histoire, son accident, son séjour à l’hôpital, son parcours artistique remplacé par un parcours médical. Les rendez-vous chez le psy succèdent aux castings pour lesquels il n’est plus apte. Fou de musique, il éprouve un sentiment d’enfermement, en lui-même, dans cette société souvent imperméable aux handicaps. Il redécouvre l’humanité autrement, en lisant sur les lèvres, en tissant de nouvelles relations avec des inconnus, comme s’il repartait de zéro.

Jusqu’à l’implantation d’une prothèse qu’il a d’abord beaucoup de mal à accepter... Il faut se réhabituer, réapprendre. Sa musique préférée ressemble d’abord à du Gainsbourg, version Dark Vador.

Ses amis l’encouragent à remonter sur scène, à reprendre son activité d’avant qu’il exerçait avec talent. Mais l’envie n’est plus là...

Le spectacle est adapté du livre Vos gueules les acouphènes, je n’entends plus la mer, aux éditions Guy Trédaniel. Coécrit avec Dominique Lozac’h, l’œuvre se fonde sur un style souvent poétique. L’écriture choisit des mots qui font appel aux sens.

Rare spectacle accessible aux personnes sourdes ou malentendantes, grâce à un système de sous-titres, la représentation vise à sensibiliser le grand public à ce handicap invisible. Il y a pourtant sept millions de sourds et de malentendants en France.

Avec son Journal d’un malentendant et ses malentendus, le comédien nous saisit avec la tonalité de sa voix si particulière, un timbre à la fois aigu et tassé qu’il colle sur des messages douloureux, pour se faire entendre.

Sur un plateau nu, la mise en scène talentueuse et efficace de Dominique Coubes, assisté de Laura Chavalier, fait beaucoup appel à la direction d’acteur. Les vidéos sont utilisées à bon escient pour ponctuer et faire respirer le spectacle.

En arrivant à rire de la souffrance qu’il a endurée, Frédéric Deban nous offre une fin très émouvante, racontant comment il a réussi à remonter sur scène avec de précieux conseils, pour franchir ce qu’il appelle le « mur des sons ».