Le 7 septembre 2018
Un grand film puissant, porté par un souffle lyrique et une interprétation habitée.
- Réalisateur : Sydney Pollack
- Acteurs : Robert Redford , Will Geer, Charles Tyner, Allyn Ann McLerie, Stefan Gierasch
- Genre : Drame, Aventures, Western
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Warner Bros. France
- Durée : 1h50mn
- Date télé : 8 octobre 2024 22:10
- Chaîne : Ciné+ Classic
- Box-office : 44 693 786 $ (USA) / 1 219 756 entrées France / 352 101 Paris Périphérie
- Date de sortie : 15 septembre 1972
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Résumé : Jeremiah Johnson, fuyant la violence du monde civilisé, s’enfonce dans les Montagnes Rocheuses. Confronté à un environnement qu’il ne connaît pas, il doit également faire face à la révolte des Indiens. Décidé à assouvir une vengeance, il fera lui aussi appel à la violence.
Critique : Situé entre On achève bien les chevaux et Nos plus belles années, Jeremiah Johnson est inspiré d’une histoire vraie devenue légendaire, celle d’un homme fuyant la civilisation, pour se perdre dans une nature hostile. Sydney Pollack y déploie une « grande forme » hollywoodienne, avec ouverture musicale et entracte, à la manière de King Kong, Autant en emporte le vent et Lawrence d’Arabie, c’est-à-dire un cinéma de prestige à l’image somptueuse. Classique, le film l’est autant par son opulence visuelle que par sa construction très élaborée : deux parties (l’initiation et la progression / la chute) parfaitement symétrique ; en effet, Jeremiah Johnson rencontre successivement un Indien, un chasseur d’ours, une femme folle d’avoir perdu ses enfants, un nommé Del Gue, et sa femme, offerte par un chef indien. Dans la seconde partie, après la mort de sa femme et de son fils adoptif, les rencontres vont se renouveler dans l’ordre inverse, chacune signifiant le changement et le temps qui a passé.
Pour autant, cette structure forte laisse la liberté à Pollack de magnifier des paysages naturels qu’il sait filmer, soit comme un arrière-plan, soit pour noyer ses personnages et montrer leur insignifiance. Il prend son temps, surtout dans la première partie qui constitue une patiente initiation à la vie sauvage, mêlant les tons, du contemplatif au burlesque, en un tout cohérent et fort, même si on peut regretter un côté un peu lisse dont la seconde partie sera le pendant. On peut néanmoins voir dans cette articulation, comme par exemple dans les deux volets des Nibelungen de Lang, une tragédie contemporaine : Johnson est celui qui, saisi par l’hubris, attire sur lui une punition qui le conduit à la vengeance. La patiente constitution d’une famille harmonieuse se fait par hasard et, d’une certaine manière, Johnson veut réinventer une nouvelle civilisation païenne en se moquant des « bondieuseries » de sa femme ; sa prétention à tout maîtriser ne peut dès lors que se heurter à une punition qui le pousse à une ivresse de meurtres : en quelque sorte, il s’est voulu Dieu et se retrouve démon.
A sa sortie, Jeremiah Johnson a pu être analysé comme une métaphore : le héros de Pollack est alors un homme dégoûté par la guerre du Vietnam, qui tente de retrouver une vie plus en accord avec la nature, revenant aux sources de ce qu’a été l’histoire des USA. En ce cas, le constat est particulièrement cruel puisque le retour en arrière ne peut que se révéler tragique : la barbarie est au bout de cette renonciation. Néanmoins, le film ne peut se résumer à un sens univoque : son ambition romanesque, son lyrisme, l’identification du personnage à un acteur hors du commun le hissent au statut de grand classique dans la tradition hollywoodienne. D’autant qu’il se révèle grand pourvoyeur d’images marquantes, de l’homme gelé à l’attaque des loups, du massacre des Indiens à la mère folle. Certes, on pourra regretter quelques coquetteries (tel zoom, telle superposition), mais l’ensemble est d’une beauté et d’une force indéniables.
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