Le 29 août 2017
Un Walsh nerveux, modèle d’efficacité.


- Réalisateur : Raoul Walsh
- Acteurs : Peter Lorre, George Raft, Brenda Marshall, Sydney Greenstreet
- Genre : Aventures, Noir et blanc
- Nationalité : Américain
- Titre original : Background to Danger
- Date de sortie : 10 août 1949

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– Année de production : 1942
Résumé : A Ankara, pendant la Seconde Guerre mondiale, un agent américain, tente d’empêcher une alliance entre la Turquie et l’Allemagne.
Notre avis : Après Gentleman Jim et en profitant du succès de Casablanca, Walsh réalise ce petit film de guerre et d’espionnage, dans un Orient de studio : si le patriotisme n’y est pas exacerbé, quand bien même les Nazis font preuve d’un machiavélisme serein, c’est que ce qui intéresse le cinéaste n’est pas la conjoncture internationale ou la neutralité de la Turquie, ni même vraiment l’identité des nombreux espions qui parsèment le film. Non, ce qui l’intéresse, c’est l’efficacité : dès le début, avec un attentat à la bombe, jusqu’aux dernières minutes, l’action règne en maître ; Walsh supprime tout ce qui ne lui est pas nécessaire : ni trajets sans intérêt, ni romance (celle-ci est expédiée presque comme un clin d’œil), ni psychologie ou longues justifications. Si Joe (l’impavide George Raft) prend le train, c’est pour en être chassé ; s’il emprunte une voiture, il est vite poursuivi ; et ainsi de suite : chacun de ses mouvements a des conséquences musclées, ce qui rend le film trépidant, au mépris évidemment de la vraisemblance, et parfois de la simple cohérence.
L’efficacité est aussi à chercher du côté du scénario, signé W. R. Burnett, (avec, dit-on, le concours de Faulkner), et du roman d’origine écrit par le spécialiste Eric Ambler. Autant de collaborateurs prestigieux qui transforment une simple histoire en boule d’énergie, en trajectoire rectiligne qui avance tout en dépense physique. Rien ne vient entraver l’obstination du héros dans sa course contre les projets nazis. Pour autant, le film n’est jamais bâclé : les décors, de l’ambassade allemande, imposante et géométrique à l’hôtel miteux rongé par l’obscurité, la photographie signée par le vétéran Tony Gaudio, l’interprétation même (quel plaisir de retrouver Peter Lorre ou Sydney Greenstreet) font l’objet de soins attentifs, prouvant encore une fois à quel point le cinéma hollywoodien classique savait utiliser au mieux ses employés.
Certes, on regrettera le traitement réservé aux autochtones (ridicules ou inconsistants au point que leur mort passe inaperçue) ou quelques effets datés (la maquette du train…) ; on s’amusera en revanche des clins d’œil à Scarface (Raft qui jette sa pièce ou devient balafré) mais surtout, à suivre méthodiquement cette intrigue complexe et jamais ennuyeuse, jeu de masques et d’apparences sur fond paranoïaque, on sera épaté par la vitalité sans failles d’une œuvre qui, sans être majeure, ne démérite ni ne déçoit.