Le 22 février 2024
Maud Wyler témoigne de son engagement au sein de l’Académie des César. Sans oublier de partager son regard sur la riche année que vient de vivre le cinéma français et de dévoiler ses projets.
La comédienne Maud Wyler, qui a récemment brillé aux côtés de Fabrice Luchini dans La petite, Sabine Azéma dans La place d’une autre, ou Nahuel Pérez Biscayart dans La fille de son père, témoigne de son engagement au sein de l’Académie des César. Sans oublier de partager son regard sur la riche année que vient de vivre le cinéma français et de dévoiler ses projets.
- Maud Wyler et Céleste Brunnquell dans "La fille son père"
- Copyright Pyramide Distribution
Pourquoi vous êtes vous engagée au sein de l’Académie des César ?
Tous ceux qui s’engagent au sein de l’Académie ont pour la plupart déjà œuvré dans la vie associative. Nous avons cet ADN en commun. Nos échanges sont d’autant plus précieux qu’il est rare que des producteurs, des distributeurs, des auteurs, des cinéastes et des techniciens se retrouvent sur un même pied d’égalité afin d’agir en faveur du cinéma. Nous nous retrouvons autour de ce bien commun. Nous sommes une association de promotion du cinéma et on voit combien ce dernier a encore tant de choses à dire et à inventer.
Quelles actions avez-vous mises en place au cours des derniers mois ?
Nous avons principalement initié un groupe de travail autour des violences sexuelles afin que les personnalités condamnées ou mises en examen ne soient pas sur le devant de la scène. Elles peuvent être nommées, certes, et même récompensées, mais ne peuvent participer à nos événements ou à notre cérémonie. Nous ne voulons pas mettre en lumière quelqu’un qui soit possiblement coupable de violences sexuelles. Ainsi, nous respectons la parole des victimes présumées et essayons d’être le plus juste possible sans créer de nouvelles haines. Pour autant, les César restent exhaustifs. Dès lors qu’un film sort en salles, lui et tous ceux qui ont travaillé dessus sont éligibles. Cela dans un souci démocratique ainsi que dans un souci de représentativité et de diversité des œuvres. Nous avons beaucoup échangé avec des avocats et des milieux associatifs afin de savoir dans quelle mesure nous pouvions préserver un souci d’exemplarité. Les mœurs évoluent. Les César doivent être au rendez-vous de tous ces progrès.
Et que faites vous concrètement pour que les César soient plus en lien avec le public alors qu’on leur reproche souvent un certain « entre soi » ?
L’opération « César aux lycées » est un formidable outil d’éducation à l’image puisque chaque lauréat peut retourner dans le lycée où il a étudié afin de rencontrer les lycéens et partager son vécu et son expérience avec eux. Après tout, les César mettent en valeur tous les métiers nécessaires à la création d’un film, des décors aux costumes, en passant par la musique, la photographie, l’écriture, la mise en scène ou l’interprétation. Toutes les formes sont également plébiscitées : long métrage, court métrage, film d’animation ou documentaire. Le fait que ces jeunes lycéens soient confrontés à tous ces métiers peut susciter des vocations. En cela, la cérémonie est une vitrine importante et se doit d’être une émission à la fois populaire et accessible sur le cinéma.
Ces dernières années, cette cérémonie a subi de violentes critiques. Comment l’analysez-vous ?
Pour ma part, je vois là un marqueur de sa popularité. De la même manière que lorsqu’un film très attendu sort en salles et que tous les spectateurs deviennent des critiques de cinéma, tous les téléspectateurs ont leur avis sur cette cérémonie. Certes, les audiences ont pu baisser ces dernières années mais, à l’inverse, les pastilles vidéo sur les meilleurs moments de cet événement ont été très consultées sur YouTube et les réseaux sociaux. Ces calculs d’audiences se rapprochent des calculs du succès d’un film. Il n’y a pas que les entrées qui comptent, il faut prendre en considération le nombre de salles où il est diffusé, les résultats qu’il obtient dans les salles internationales puis en VOD. Je pense que l’Académie des César est suffisamment solide sur le plan historique et désormais très forte d’un point de vue démocratique, avec davantage de transparence, pour nous adapter à tout et traverser toutes les tempêtes. Tout y est désormais beaucoup plus sain. Les statuts ont été réformés. De nouveaux membres sont arrivés. La parité est presque atteinte. La parole a été redistribuée et s’en trouve mieux partagée.
- Maud Wyler
- Crédit photo : Richard Schroeder
Quels ont été vos principaux coups de cœur pour le cinéma français en 2023 ?
Je nourris une profonde reconnaissance pour le travail effectué par toute l’équipe d’Anatomie d’une chute. C’est un modèle de production, avec une histoire a priori complexe mais où la vision des auteurs a été pleinement respectée par l’ensemble des partenaires et des financiers. Rien n’y est formaté. La réalisatrice Justine Triet et son coscénariste Arthur Harari n’ont pas cherché à baliser un cahier des charges de rentabilité. Et pourtant, le film est un triomphe partout où il est diffusé. C’est un marqueur d’espoir très fort. Cela indique aux cinéastes et à toute la chaine de production de financement d’un film à quel point il est judicieux de faire confiance aux créateurs. On pourrait dire la même chose de l’ensemble des films nommés, du Règne animal à Je verrai toujours vos visages, Chien de la casse et Le procès Goldman. Cela nous rappelle combien notre exception culturelle a été fabriquée avec ce souci de rentre compte de la diversité de notre cinéma. Cette diversité se vérifie aux César.
Avec d’autres artistes, techniciens et professionnels de l’industrie, vous avez appelé à des états généraux du cinéma. Où en est cette initiative ?
Ces états généraux sont toujours plus nécessaires. Surtout quand on voit à quel point le cinéma revient au centre de toutes les conversations. Même les plateformes veulent produire davantage d’unitaires que de séries. Si les plateformes ont été intégrées dans le financement de la création française, je regrette que les conditions de travail soient si complexes sur le tournage de leurs productions. Au cours de mes expériences sur leurs plateaux, j’y ai vu de la souffrance partout. Ce qui nous a été annoncé comme le nouvel Eldorado de la création est un chaos, y compris en terme de droit du travail. Je pense notamment au fait qu’un comédien soit contraint de s’engager durant plusieurs mois sur la production d’une plateforme, même s’il n’a que quelques scènes à jouer, mais sans pouvoir s’engager sur un autre film ou une autre série durant toute cette période. Il est temps d’agir pour que cela ne devienne pas la norme.
Par ailleurs, j’ajoute que si le projet de la Grande Fabrique de l’Image visant à rénover l’ensemble des studios français pour 2030 est une excellente initiative, il est important de nous interroger sur la création et les œuvres que nous souhaitons y tourner. Enfin, je souhaiterais retrouver un discours plus positif autour du cinéma français alors qu’il y a encore quelques mois, des personnalités comme Jérôme Seydoux ou Roselyne Bachelot ont été très injustes vis-à-vis de notre production hexagonale. Heureusement que les César sont là pour rappeler la qualité de notre cinéma.
Enfin, que pouvez-vous nous dire sur votre actualité ?
Je tourne actuellement un projet pour une plateforme dont je ne peux rien dévoiler car je suis liée par un contrat de confidentialité. Je vais également tourner prochainement dans une mini-série en quatre épisodes pour Arte. Elle s’intitulera En eau salée et sera conçue comme un huis clos se déroulant sur un cargo. Je présenterai deux séries au Festival Séries Mania à Lille les 16 et 17 mars prochain. Tout d’abord celle de Pierre Schoeller, Dans l’ombre, une fiction politique prochainement diffusée sur France TV où j’incarne une écrivaine suivant un politicien de droite aux côtés de Melvil Poupaud et Swann Arlaud. Ensuite, celle d’Erwan Le Duc, Le monde n’existe pas, portée par Nils Schneider et destinée à Arte. Enfin, je serai prochainement à l’affiche de l’autofiction d’Olivier Assayas, Hors du temps, où j’interprète le personnage de son épouse Mia Hansen-Løve. C’est un film plein d’autodérision, de tendresse, de cinéma et qui revient sur la naissance de son désir pour le septième art.
Propos recueillis par Nicolas Colle
Galerie photos
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