Le 26 novembre 2008
Quand les distributeurs et attachés de presse ne jouent pas le jeu de la diffusion aux critiques, la méfiance doit-elle être de mise ?
Quand les distributeurs et attachés de presse ne jouent pas le jeu de la diffusion aux critiques, la méfiance doit-elle être de mise ?
La sortie du Transporteur 3, montré à une poignée de professionnels, alors que le deuxième segment était présenté en grande pompe avec distribution de la bande originale à la clé, est symptomatique de la méfiance des distributeurs et même de certains cinéastes (qui donnent des consignes strictes de non diffusion suite à des traumas professionnels) à l’égard de la presse.
Chaque année un certain nombre de grosses productions, certes plus attendues par le public que par les critiques, déboulent sur les écrans sans avoir été du tout diffusées aux journalistes, ou parfois après avoir été seulement projetées à un cercle d’intimes (des pros, des vrais, ou des partenaires vendus, prêts à rédiger des papiers au rabais pour apposer leur nom sur tout et n’importe quoi et gagner ainsi le droit aux exclusivités). Outre la production Besson citée précédemment, Agathe Cléry, qui sort mercredi 3 décembre, a connu le même sort, celui de la sélection au compte-goutte. Difficile dans ces conditions-là de réfréner ses soupçons face à la qualité de telles œuvres si leurs propres distributeurs considèrent qu’elles sont difficilement montrables (d’autant plus que les rédacteurs envoyés en projos sont globalement ceux qui ont le plus d’affinités avec le genre chroniqué).
Ces films sont-ils médiocres et voués à l’échec ou, au contraire, les distributeurs estiment qu’ils peuvent se passer du regard critique des journalistes. Dans ce cas, c’est un peu sacrifier les spectateurs (et leur fameux pouvoir d’achat en berne) en les assujettissant aux seuls pouvoirs de persuasion que sont les bandes annonces et les affiches.
Ces décisions sont d’autant plus regrettables qu’en 2008, plus que jamais, l’on sait que l’avis des journalistes n’influe en rien sur les succès populaires. Les pires papiers n’empêcheront jamais le public de découvrir en masse les films qu’ils attendent vraiment (notamment les suites, remakes et autres adaptations légendaires - littéraires, bédés ou jeux vidéo). Ce fut le cas pour Benjamin Gates 2, Phénomènes et Saw 5 - tous trois, honnis par les professionnels -, qui ont plutôt bien fonctionné en première semaine d’exploitation. De même, les chouchous des critiques essuient parfois des revers commerciaux cinglants (La très très grande entreprise, par exemple), confirmant le peu d’impact que peut avoir l’avis du critique, même dans le consensus positif.
Aussi, plutôt que de prendre en otage les spectateurs en les orientant sur du marketing (le commerce donc, le quantitatif), ne peut-on pas considérer, en cette ère de nouvelles technologies et de diffusions immédiates de l’information, que la critique (le qualitatif), même mauvaise, offre une existence légitime à un travail artistique, au-delà du seul critère de productivité ? Existe-t’il un plus beau cadeau pour l’œuvre d’un réalisateur que d’éviter l’indifférence, alors que tant de petites productions mondiales luttent pour se frayer une place salvatrice dans les journaux et magazines (papiers ou en ligne) ?
C’est toute une réflexion de déontologie qu’il faudrait avoir sur le rapport de l’œuvre au critique et du critique au public. Dans ce domaine, on est toujours en attente.
Pour conclure, nous avons pu voir Le transporteur 3 lors d’une avant-première publique et c’est un film d’action plutôt efficace, voire réussi dans son domaine. Fallait-il vraiment nous le cacher pour qu’on en arrive à cette conclusion ? Nous, on aurait aimé vous le dire plus tôt.
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