Vocation cinéaste
Le 2 septembre 2016
James Franco adapte Steinbeck avec une désinvolture époustouflante de sottise. Cet énième naufrage de l’acteur derrière la caméra tient plus du mauvais téléfilm que d’un long métrage de cinéma projeté à Deauville et à la 73e Mostra de Venise.
- Réalisateur : James Franco
- Acteurs : Vincent D’Onofrio, James Franco, Robert Duvall, Selena Gomez
- Genre : Drame
- Nationalité : Américain
- Festival : Festival de Deauville 2016, Festival de Venise 2016
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Mostra de Venise 2016 - Cinema Nel Giardino
Résumé : En Californie, dans la vallée de Salinas plantée de vergers, neuf cents ouvriers migrants se soulèvent « en un combat douteux » contre les propriétaires terriens. Tirant sa force de chacun des individus qui le composent, le groupe a pour meneur un certain Jim Nolan dont l’idéalisme tragique conduit les grévistes à avoir désormais le courage de « ne plus jamais se soumettre, de ne plus jamais céder ».
Notre avis : En dépit d’une carrière prolifique et insatiable de réalisateur entamée en 2005 avec la comédie plus que discutable The Ape, l’Américain James Franco - jusqu’à quatre films par an au compteur ! - n’a finalement jamais percé en tant que metteur en scène sur le vieux continent. Ce manque de reconnaissance pourrait s’expliquer simplement par la frilosité des distributeurs et/ou tout bonnement par un accueil critique trop froid dans les festivals internationaux. Qu’importe : si l’on s’en tient, à la vision d’In Dubious Battle, au chemin parcouru par l’acteur-réalisateur en onze années acharnées en matière de cinéma, force est de constater que le résultat n’est pas loin du néant. Son adaptation de "En un combat douteux" ("In Dubious Battle"), roman de John Steinbeck paru en 1936, tient davantage du téléfilm tire-larmes que d’une œuvre s’inscrivant dans la généalogie du long métrage culte Les raisins de la colère de John Ford. Les deux hommes n’ont d’ailleurs en commun que leur cadence de tournage, si ce n’est que le maître du western ratait éventuellement un film toutes les deux décennies. Pour cette réalisation dopée par un casting grandiloquent mais inutile - James Franco himself, Nat Wolff, Vincent D’Onofrio, Robert Duvall, Ed Harris, Bryan Cranston, John Savage… -, l’intrigue suit à la lettre ou presque le texte de l’auteur de "Des souris et des hommes", en élève sage et discipliné. Problème : pas l’once d’un souffle ou d’une quelconque ampleur ne se fait sentir près de deux heures durant. Les deux protagonistes principaux, Mc MacLeod et Jim Nolan sont lancés sur des rails - leur départ vers la ferme où ils vont tenter de provoquer une grève salvatrice débute dans un train - dont ils ne sortiront plus.
Pour James Franco, le cinéma ne semble visiblement pas un médium dont l’articulation et les associations d’idées permettraient de créer un langage, un raisonnement propre. Seuls comptent pour lui la performance des acteurs à la sauce actor studio - ici au mieux poseuse, au pire risible - ainsi que la consommation du récit. Consommation car il y a là création d’une dynamique utilitariste, matérialiste. Où l’angle de la caméra et son positionnement ne servent par défaut qu’à illustrer et non plus à faire naître, à signifier et à susciter. Représentation ô combien inquiétante que celle d’un septième art dont les attributs lui seraient ôtés, réfutés. Le spectateur, avec In Dubious Battle, se retrouve tenu par la main d’un bout à l’autre. Ne pas chercher ici l’ombre d’une réflexion ou d’une liberté d’interprétation qui lui reviendrait. Pis encore, aucun sentiment, aucune émotion, n’effleure celui qui regarde, sinon la frustration et l’impatience. Les personnages ont beau tomber sous les balles, mourir de faim ou de l’épuisement provoqué par leurs mauvaises conditions de travail, rien n’y change. Mettre en scène un drame social comme celui raconté par Steinbeck demandait une sensibilité et un regard dont ne dispose pas James Franco. Conclusion d’autant plus dommageable qu’il est ici question d’une œuvre n’ambitionnant rien de moins que de renvoyer ce classique de la littérature qu’est "En combat douteux" sur un plan plus contemporain. D’utiliser le cinéma de fiction pour rappeler les racines politiques d’un pays, les Etats-Unis, et de montrer qu’un combat social, un engagement, se solde parfois dans la douleur. Rappelons qu’entre 1933 et la signature du Wagner Act (Loi nationale sur les rapports syndicaux ayant permis la mise en place de salaires minimums) en marge du New Deal par Roosevelt, il fallut une grève massive réunissant 1,5 millions de travailleurs. In Dubious Battle, cependant - loin de provoquer ce vertige historique - sonne comme une antienne invitant bêtement au respect du droit du travail. Reste Nat Wolff, seul acteur de cette triste bande à pouvoir retenir quelques secondes l’attention. On a connu plus captivant.
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