Le 26 septembre 2018
Une réjouissante comédie utopique grâce à laquelle on se sent bien.
- Réalisateurs : Benoît Delépine - Gustave Kervern
- Acteurs : Jean Dujardin, Lou Castel, Yolande Moreau, Jean-Benoît Ugeux, Jo Dahan
- Genre : Comédie
- Nationalité : Français
- Distributeur : Ad Vitam
- Durée : 1h43mn
- Date télé : 6 octobre 2021 20:55
- Chaîne : Arte
- Box-office : 550.684 entrées France / 118.785 entrées Paris Périphérie.
- Date de sortie : 26 septembre 2018
- Festival : Festival d’Angoulême 2018, Fifigrot 2018, Festival de Locarno 2018
L'a vu
Veut le voir
Résumé : Monique dirige une communauté Emmaüs près de Pau. Après plusieurs années d’absence, elle voit débarquer son frère, Jacques, un bon à rien qui n’a qu’une obsession : trouver l’idée qui le rendra riche. Plus que des retrouvailles familiales, ce sont deux visions du monde qui s’affrontent.
Critique : Le duo grolandais Delépine/Kervern (Groland est un pays fictif imaginé en 1993 par l’équipe de Jules-Edouard Moustic pour l’émission Groland Sat de Canal + au cours de laquelle les deux amis se rencontrent) n’a jamais caché son goût pour le cinéma subversif et poétique à tendance loufoque.
Tout juste dix ans après Louise-Michel, cocktail détonnant de satire sociale et d’humour décalé sur les conséquences de la délocalisation, I feel good s’intéresse à la rencontre de deux mondes en apparence incompatibles (le havre de solidarité d’un centre Emmaüs contre les ambitions de start-up d’un homme qui ne pense que profit) que les réalisateurs finiront par concilier, jetant ainsi un pavé dans la mare d’un libéralisme à tous crins.
- ©️JD PROD-No Money Productions-Arte France Cinéma-Hugar Prod-2018
Etonnante vision que celle d’un homme seulement vêtu d’un peignoir blanc, sandales aux pieds marchant le long d’une route. Il vient de s’échapper de son séjour de thalassothérapie dont il ne peut assumer les frais. Sans attaches, sans argent, sans métier, il n’a d’autres choix que de se rendre chez sa sœur qui dirige un centre Emmaüs à Lescar-Pau. Elle lui offre ce qu’elle propose à tous ceux qu’elle accueille : un toit, des repas et quelques alternatives de réinsertion. Mais il n’a que faire de ces propositions... Lui, il veut devenir riche, trouver le truc auquel personne n’a encore pensé. La création d’une entreprise de chirurgie esthétique basée en Bulgarie lui apparaît comme une idée de génie. Il tentera même de convaincre les compagnons qu’il côtoie tous les jours du bien-fondé d’une agréable physionomie comme gage d’ une meilleure vie, égratignant au passage la dictature de l’apparence.
- ©️JD PROD-No Money Productions-Arte France Cinéma-Hugar Prod-2018
Car notre tandem facétieux continue à prendre un malin plaisir à pointer du doigt les aberrations de nos sociétés futiles et égoïstes. Le ton décalé et corrosif fustige pêle-mêle individualisme forcené, appât du gain et soif de pouvoir mais ne manque pas de laisser entrevoir l’espoir d’une voie possible, en contre-pied du système libéral, à travers ces groupuscules humains qui s’aiment et se respectent. Le scénario frôle souvent les portes de l’absurde mais parvient à contourner la caricature, parfois de justesse (la scène de réunion autour du monument édifié en Bulgarie dans les années 80 à la gloire du communisme alourdit le propos plutôt qu’elle ne le sert) grâce d’une part à un savant saupoudrage entre douce folie et tendre émotion et d’autre part au don qu’ont nos joyeux compères d’envelopper à l’envi tous leurs personnages, des plus humbles aux plus prétentieux, d’une saisissante humanité.
En 2010, Mammuth autorise le monstre Depardieu, lui aussi adepte du jeu de la provoc et de l’anti-tout à glisser sans encombres sa grande carcasse dans le costume des laissés-pour-compte. Fort de cette expérience jouissive, Delépine et Kerven poussent le curseur un peu loin et font le pari d’inviter dans leur univers anti-bling-bling la star Dujardin, l’un des acteurs les plus convoités du cinéma populaire français, au risque de prendre le risque d’ introduire le loup dans la bergerie. Et pourtant, ça fonctionne ! Car le loup, animal doué de raison et d’intelligence, sait se transformer en agneau. L’ami Jean (devenu Jacques pour les besoins du film) a laissé son habit de séducteur au vestiaire.
- ©️JD PROD-No Money Productions-Arte France Cinéma-Hugar Prod-2018
La coupe de cheveux incertaine, le buste légèrement voûté, le corps lesté de quelques kilos, il ne lui reste que son sourire d’éternel vainqueur et sa tchatche pour espérer conquérir le monde. Malgré sa suffisance et son mépris pour les autres, le décalage dont il n’a pas conscience entre le patron qu’il rêve d’être et le loser qu’il est réellement en fait un personnage plus pathétique que déplaisant. Dujardin, en lui insufflant avec finesse une juste dose de fragilité, finit même par le rendre attachant.
Et puis reste Yolande Moreau, un monument de générosité et d’abnégation qui règne sur ce décor de bric-à-brac aux couleurs pimpantes et de solidarité chaleureuse avec une telle sincérité qu’on jurerait qu’elle est « pour de vrai » la maîtresse des lieux. Elle répand sur ce pamphlet satirique mais optimiste une bienveillance et une tendresse jusqu’alors inconnues (bien que déjà perceptibles dans Saint Amour, tourné en 2016) dans la sphère de ce couple de scénaristes-réalisateur désormais incontournable, et en fait l’un des films les plus émouvants et les plus aboutis de leur illustre carrière.
Box-office verdict : Succès ! Si le film pouvait mieux faire à Paris, où le discours social touche moins, I feel good a été le 18e film français le plus rentable en 2018, avec 550.000 entrées et un budget initial de 4.4 millions d’euros.
- ©️JD PROD-No Money Productions-Arte France Cinéma-Hugar Prod-2018
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.