Le 30 août 2020
C’est un roman noir, caché sous la couverture blanche des Éditions de Minuit, que nous propose Laurent Mauvignier pour la rentrée littéraire 2020. Comme dans un véritable thriller, et durant plus de six cents pages, l’auteur évoque un huis clos aux confins de la campagne française, dépeinte dans toute sa noirceur, en alliant fait divers et langue minutieuse.
- Auteur : Laurent Mauvignier
- Editeur : EDITIONS DE MINUIT
- Genre : Roman
- Nationalité : Française
- Date de sortie : 3 septembre 2020
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Résumé : C’est dans un hameau aux alentours de La Bassée, tristement baptisé "Les Trois filles seules", que vivent Bergogne, sa femme Marion et leur fille Ida, ainsi que Christine, une artiste peintre ayant troquée l’agitation parisienne pour la vie rurale. Trois individus vont faire irruption le soir de l’anniversaire de Marion, et vont bouleverser l’existence tranquille de tout ce petit monde. Un huis clos se construit alors, dans lequel les personnages seront emprisonnés le temps d’une nuit.
Critique : Ce nouveau livre de Laurent Mauvignier est bien éloigné de ce à quoi l’auteur nous a habitués. Histoires de la nuit est un texte long, plein de suspense, il traite d’un fait divers fictif que l’auteur invente pour La Bassée, son point d’ancrage. A l’origine, il s’agissait d’un scénario destiné au cinéma, de vingt-cinq pages seulement, finalement étiré, développé, jusqu’à devenir une œuvre littéraire. C’est un genre fondamentalement nouveau qu’explore Laurent Mauvignier, qui reste cependant tout à fait reconnaissable par son style singulier : ainsi, il prolonge indéfiniment le verbe, tient le lecteur en haleine, laisse difficilement mourir ses phrases comme à l’accoutumée, et pour notre plus grand plaisir.
Le roman noir privilégie de longs énoncés sinueux, qui s’étirent inlassablement.
Malgré un contenu radicalement différent, on retrouve dans Histoires de la nuit une volonté habituelle de Laurent Mauvignier : donner la voix à ceux qui n’ont que rarement l’occasion de prendre la parole. La mise en scène concerne encore une fois les "gens de peu", traite d’une classe sociale à la marge. L’écrivain dépeint une France rurale, éloignée, prise au piège. C’est ce même engagement que l’on retrouve dans la totalité de ses romans, ce même désir de montrer ceux qu’on ne regarde pas.
Et puis, on constate avec joie que les personnages féminins occupent une place de plus en plus grande dans les livres de l’auteur, témoignant d’un désir accru de se projeter dans des figures féminines. Histoires de la nuit évoque l’une d’elle, qui est peintre. L’art occupe d’ailleurs une place importante à travers ce texte, s’incarnant dans la forme même de l’écriture, dans cette volonté qu’elle ne soit pas lisse, mais matérielle, brodée à l’infinie, portant les traces de ses hésitations et de ses choix.
Malgré une très belle langue et une intrigue bien ficelée, ce dernier roman est sûrement moins marquant qu’ont pu l’être Loin d’eux, son premier livre paru en 1999, ou Ce que j’appelle oubli, cette unique phrase parue en 2011.
L’auteur évolue vers une écriture plus romancée, moins dirigée vers l’exercice de style que vers la narration, aboutissant à un texte globalement réussi.
640 pages - 24€ -
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