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Le 12 juillet 2005


Ceux qui ne connaissent pas encore Hunter S. Thompson doivent se précipiter sur cette abondante correspondance. Les autres... doivent faire exactement la même chose !
Ceux qui ne connaissent pas encore Hunter S. Thompson doivent se précipiter sur cette abondante correspondance. Les autres... doivent faire exactement la même chose !
On compte sur les doigts d’une main les écrivains dont la correspondance est publiée de leur vivant. La version américaine de cet ouvrage date de 1997 et on se demande vraiment pourquoi avoir attendu huit ans pour la publication française. Le suicide de l’auteur en février dernier y est sans doute pour quelque chose. Accrochez-vous, voilà la correspondance d’un écrivain complètement hallucinant, doué d’un talent hors du commun et conscient d’appartenir à ces rares élus qui ouvrent une porte et créent un genre. En ce qui concerne Thompson, c’est le journalisme gonzo, ou l’art et la manière de s’infiltrer et de vivre les événements de l’intérieur pour en cerner la matière.
Ces lettres sont divisées en deux périodes. D’abord, la période de formation de l’auteur couvrant les années 1955-1967. L’écrivain est en gestation mais déjà on sent à quel point il est habité par son œuvre et dans quelle direction il souhaite aller. Les missives envoyées aux rédacteurs en chef de journaux valent leur pesant de cacahuètes, crachant sur ceux qui refusent de reconnaître son talent, définitivement réfractaire à la vieille presse qui le fait vomir ("Si vous cherchez un pisse-copie pépère, alors j’ai frappé à la mauvaise porte"). Thompson voyage en Amérique du Sud, prend des photos, s’embarque dans des plans glauques, écrit des articles sportifs, tire toujours le diable par la queue. Et puis, à force de rôder son style, de parfaire ses phrases et son regard acéré, il rédige Hell’s Angels, l’ouvrage qui le lance définitivement sur le chemin du succès.
En avant pour la deuxième période (1968-1976), celle durant laquelle certains rédacteurs en chef le publient avec bonheur, tandis que d’autres coupent ou refusent systématiquement son travail jugé politiquement incorrect. Thompson n’a peur de rien et va petit à petit sentir sa conscience politique s’éveiller. Il se présente au poste de shérif dans son bled, suit la campagne de Nixon pour Rolling Stone. Et quand il a quelque chose à dire, il ne se prive pas et envoie une lettre joliment troussée aux politiciens qu’il juge mauvais et méprisables.
Entre dope, alcool, LSD et mescaline, Thompson soulève la poussière des sentiers ensablés d’une Amérique détraquée et en pleine crise (on peut relire à ce propos Las Vegas parano, on en appréciera d’autant plus le délire en connaissant le détail de ses notes de frais).
Volontairement écartées, les lettres plus intimes liées à sa femme et ses enfants, à l’exception de quelques-unes destinées à sa mère. C’est un peu regrettable, d’autant que c’est ce tout qui construit l’écrivain. Tant pis, on en fera pas une maladie. Il y a déjà tellement de richesse et d’humour dans celles-ci qu’on sait que ce type était quelqu’un de bien. Un écrivain à part entière, dévoué à son œuvre, qui mérite largement sa place entre Kerouac, Selby et Bukowski.
Hunter S. Thompson, Gonzo Highway (Proud of the Highway & Fear and lothing in America, traduit de l’anglais par Nicolas Richard), éd. Robert Laffont, coll. "Pavillons", 2005, 472 pages, 22 €