Le 19 mai 2018
Les amateurs de westerns efficaces et rares se précipiteront sur cette série B nerveuse.
- Réalisateur : Gordon Douglas
- Acteurs : John Ireland, Randolph Scott, George Macready, Virginia Huston
- Genre : Western, Noir et blanc
- Nationalité : Américain
- Editeur vidéo : Sidonis Calysta
- Durée : 1h30mn
- Titre original : The Doolins of Oklahoma
- Date de sortie : 8 août 1951
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– Sortie DVD : le 31 mai 2018
– Année de production : 1949
Résumé : Pendant que les Dalton sont tués à Coffeeville, l’un des membres du gang, Bill Doolin, arrivé en retard, parvient à s’échapper. Recherché pour meurtre, il multiplie les attaques à main armée à la tête du gang des Doolins. Fortune faite, il ordonne à ses complices de se séparer. Rendez-vous est pris dans la petite ville d’Ingalls, trois mois plus tard, une fois que la poussière soulevée par leur chevauchée se sera dissipée. Doolin fuit de son côté. Pour échapper à ses poursuivants, il accepte l’invitation au dîner dominical d’une honnête famille, dont la fille, Elaine, lui tourne si bien la tête, qu’il devient un fermier accompli...
Notre avis : Le schéma est bien connu : un homme est entraîné sur la mauvaise voie, il tente de se racheter mais le piège se referme sur lui. Connu, certes, mais Face au châtiment échappe au déjà-vu par une mise en scène souvent inventive et une densité peu commune. Bertrand Tavernier en donne des exemples dans les bonus, entre larges ellipses et séquences mémorables (le petit garçon dans l’église, qui regarde Doolin sans rien dire, est aussi marquant qu’inutile dans la narration). Mais la réalisation étonne également par sa sobriété : la première apparition du protagoniste, accoudé au comptoir, au centre du cadre et flanqué de deux représentants de la loi, en dit long, comme son regard quand il voit les marshalls par la fenêtre et comprend qu’il est perdu. Deux exemples seulement, pourtant la volonté d’efficacité se retrouve à maintes reprises, que ce soit dans les moments forts (et le film n’en est pas avare), ou dans les quelques respirations savamment dosées.
Au centre du métrage, presque omniprésente, la stature marmoréenne de Randolph Scott laisse peu de place à des seconds rôles qui, pour être effacés, n’en sont pas moins caractérisés avec la même sobriété : quelques dialogues, des échanges « virils » suffisent à saisir la personnalité des comparses ; quant à Elaine (Virginia Huston), la femme de Doolin, si elle est sacrifiée à l’économie générale, sa fermeté et son engagement trouvent une dense expression dans les rares scènes où elle figure. C’est que Gordon Douglas, sans doute en partie à cause d’un manque de moyens, privilégie une narration dense sans fioritures ni étirements : pas de gras, on dirait plutôt que des coupes ont été faites dans le scénario pour le rendre plus nerveux ; ainsi, dès le générique, un revolver fumant posé sur un avis de recherche, l’action est posée et pour ainsi dire résumée. De même la phrase prophétique du beau-père (« vous êtes déjà mort ») resurgit à la fin, comme une conclusion en boucle.
De ce point de vue, Face au châtiment côtoie sans grandiloquence le tragique : dès le moment où Doolin tue (en légitime défense, évidemment, pour respecter un code moral prégnant), les événements ne peuvent que s’enchaîner à la manière d’un engrenage, les marshalls presque abstraits jouant le rôle la froide justice, ou, pour reprendre le titre français, de cet inexorable « châtiment ». Le scénario évite de noircir son héros, s’éloignant fortement de la réalité, pour en faire le jouet d’un destin aveugle, acteur autant que victime de son parcours. En ce sens, la fin résonne comme une acceptation et une rédemption par le suicide qui n’est pas sans grandeur. Là encore, Gordon traite la séquence avec une absence totale d’emphase qui empêche le film de vieillir.
Pour autant, le cinéaste ne traite pas son sujet comme une réflexion sur la destinée : les scènes d’action sont rondement menées (on pense à l’attaque du train, la fuite des chevaux) et même une simple bagarre entre les bandits participe d’une sécheresse résolument moderne.
Bref, on ne saurait bouder son plaisir devant ce western peu connu, occasion pour les amateurs de compléter leur connaissance du genre, mais aussi pour les néophytes d’apprécier le talent de ceux qui ont fait le Hollywood classique : du chef-opérateur au moindre figurant, tout le monde est au service de ce petit film ramassé et diablement excitant. Quant à Randolph Scott, acteur à la réputation toujours discutée, il est magistral.
Les suppléments :
Bertrand Tavernier (35mn) et Patrick Brion (9mn) développent leur admiration pour le film, avec des arguments qui se recoupent très peu : le premier est plus précis, mais son érudition sans failles l’entraîne dans différentes directions, toutes aussi passionnantes (la réalité historique, la carrière de Gordon Douglas…). Les deux mêmes interviennent aussi dans un court module plus ancien et anecdotique consacré à Randolph Scoot (6mn). À quoi s’ajoute la traditionnelle bande-annonce.
L’image :
Globalement, la copie est satisfaisante, entre noir et blanc nuancé et contrastes efficaces. Dans le détail, quelques plans charbonneux, de rares parasites et de légères instabilités gâchent un peu la fête. Rien cependant de rédhibitoire, surtout pour un film de 1949.
Le son :
Ni saturations ni bruit de fond, des dialogues audibles, c’est ce qu’on peut attendre de mieux de l’unique piste en VO, mais là encore l’âge du film réduit la profondeur et la force d’un son forcément limité.
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