Le 24 décembre 2014
Bel étalage de scènes spectaculaires, ce récit sur la vie de Moïse déçoit partiellement.
- Réalisateur : Ridley Scott
- Acteurs : Sigourney Weaver, Christian Bale, John Turturro, Ben Kingsley, Hiam Abbass, María Valverde, Joel Edgerton, Golshifteh Farahani, Ben Mendelsohn, Aaron Paul
- Genre : Action, Péplum
- Nationalité : Américain, Britannique, Espagnol
- Distributeur : Twentieth Century Fox France
- Durée : 2h31mn
- Date télé : 15 octobre 2024 23:05
- Chaîne : NRJ 12
- Date de sortie : 24 décembre 2014
Résumé : L’histoire d’un homme qui osa braver la puissance de tout un empire. Celle de Moïse, leader insoumis qui défia le pharaon Ramsès, entraînant 600 000 esclaves dans un périple grandiose pour fuir l’Égypte et échapper au terrible cycle des dix plaies.
Critique : Après le Noé de Darren Aronofsky (sorti au mois de mars) les producteurs hollywoodiens semblent vouloir, pendant cette période dite « difficile pour tous », redonner au peuple une relecture des plus braves épopées religieuses, pour nous montrer la voie (la foi ?).
Cette fois, c’est le périple de Moïse qui nous est conté en 2h30 qui soufflent aussi bien le chaud que le froid. Le pari d’une durée modérée, par rapport aux 3h40 de l’autre adaptation mythique, Les 10 Commandements de Cecil B. DeMille, semble l’objectif à garder par Scott qui a dû sacrifier beaucoup d’éléments sur l’autel du spectacle, pour garder le rythme et capter l’attention permanente du spectateur contemporain. Et quand on sait que l’une des grandes difficultés au cinéma est de trouver la bonne écriture pour conter une histoire dense en un temps limité, on peut s’interroger sur la pertinence du travail de Ridley Scott qui échoue partiellement là où Alejandro Amenábar réussissait intelligemment à nous fasciner avec ses 2h07 d’Agora. On préférera aussi l’approche plus aboutie de Cecil B. De Mille, spectaculaire aussi en son temps, qui relatait l’intégralité des aventures de Moché ben Amram, de son abandon comme nouveau né sur les rives du Nil jusqu’à sa disparition.
- © Twentieth Century Fox
Dans la vision de Ridley Scott, Moïse est déjà auprès de Ramsès II, traditionnellement considéré comme le pharaon opposé à lui lors de l’Exode. Et ce, dès les premières images. Nous suivrons alors dans la première partie un héros qui affirme clairement son athéisme, que ce soit vis-à-vis des prémonitions des prophétesses égyptiennes ou bien encore des Hébreux qui lui révèlent ses origines et sa destinée. Même après son bannissement du royaume d’Égypte et son mariage, Moïse regarde d’un assez mauvais œil les élans de foi que son épouse tente d’inculquer à son fils.
Puis intervient l’apparition de Dieu sous les traits d’un enfant. Moïse bascule et repart délivrer le peuple de ses ancêtres après quatre-cents années de servitude.
À partir de ce moment, la relation directe entre Dieu (que seul Moïse peut voir et entendre) donne à réfléchir sur la légitimité des actes qui suivront et notamment sur les dix plaies d’Égypte où le Divin souhaite montrer sa supériorité face à un prophète qui semble impuissant et ne va pas assez vite à son goût. L’interprétation des messages autour de la religion qu’essaye de glisser l’auteur de Robin des Bois sont troubles et ont la richesse de proposer différentes lectures qui ne laisseront pas indifférent.
À l’image du Noé de Darren Aronofsky, Exodus de Ridley Scott n’est toutefois pas un bon gage du talent qu’a pu faire montre le réalisateur des impressionnants Kingdom of Heaven, Blade Runner et Gladiator. Même Prometheus, épopée de science-fiction, certes, empruntait les voies de la spiritualité avec plus d’attrait en jetant ses pistes théoriques, scientifico-fantastiques, sur l’apparition de l’Homme sur Terre. La raison du sentiment d’insatisfaction s’explique par le cruel manque de consistance de la narration dont l’indigence touche la plupart des personnages secondaires. À part Christian Bale (Moïse) et Joel Edgerton (Ramsès), les autres acteurs font ni plus ni moins que de la figuration. Sigourney Weaver, que Ridley Scott retrouve pour la première fois depuis Alien : le 8e passager (1979), débite six lignes de dialogue ; Ben Kingsley, fait acte de présence ; John Turturro (qui s’en sort certainement le mieux) disparaît assez vite du paysage. Et que dire des autres second rôles que l’on supprime aussi rapidement que l’on démonte un décor ?
L’enjeu relationnel entre les personnages est forcément atteint… La sœur et la mère de Moïse voient leurs rôles amoindris, alors qu’elles sont toutes deux des personnages clés dans la vie de Moïse (l’une l’aura élevé, l’autre adopté).
- © Twentieth Century Fox
Pire encore, la relation entre Moïse et son (vrai) frère Aaron qui aurait logiquement dû jouer un rôle consistant dans la suite des événements n’est jamais développée.
Il n’y a donc aucun enjeu émotionnel, ni attachement à un quelconque personnage.
L’empathie zéro pour préserver les magnifiques effets pyrotechniques salvateurs ? Il est vrai que techniquement, les effets sont magnifiques, les reconstitutions grandioses, la 3D est tout à fait justifiée, la musique répercute toute la puissance d’un spectacle déjà impressionnant. Sur tous ces aspects, le spectateur sortira contenté.
En 2004, les spectateurs avaient été refroidis par Alexandre d’Oliver Stone, œuvre pourtant repêchée du naufrage par une version « Final Cut » de 3h34 en tout point magnifique. Il est fort probable qu’Exodus trouve à son tour sa rédemption artistique lors d’une version longue d’ici quelques mois en Blu-ray/DVD. En attendant, l’hommage rendu à Tony Scott, lors de la dédicace finale, paraît ironique quand on sait à quel point son frère préférait soigner la forme à l’histoire. Peut-on alors parler d’un hommage total ?
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cinephage 15 décembre 2014
Exodus : Gods and Kings - Ridley Scott - critique
Une petite rectif pour l’auteur de l’article : non ce n’est pas la première fois que Ridley Scott retrouve Sigourney Weaver depuis Alien : il y avait eu 1492 Christophe Colomb en 1992, où elle jouait la reine d’Espagne (petit rôle aussi, mais une scène sympa avec un échange savoureux avec Depardieu). :)