Critique : Habilement, Laurent Creton replace le cinéma dans son contexte historique, et parvient à fournir tous les outils de compréhension de la situation actuelle, délicate (même sans Covid !). En effet, il rappelle le contexte économique qui a favorisé l’émergence de cet art, pour mieux détailler en quoi il pourrait aujourd’hui être fragilisé. Et la qualité du livre tient à sa redoutable précision, qui a de quoi ravir, mais aussi inquiéter les moins férus de cette approche disciplinaire (comme le rédacteur de cette critique !). Ainsi, les concepts économiques viennent expliquer la naissance du cinéma, sa pérennisation. Ils permettent aussi de saisir tous les enjeux qui l’animent aujourd’hui. Les qualités pédagogiques de l’auteur permettent de ne perdre personne, pour peu que l’implication dans la lecture soit sincère.

Car ce n’est pas la clarté qui manque : l’organisation de l’ouvrage est telle que la lecture se fait progressivement, et, pour tout dire, assez facilement. La richesse des thèmes abordés, nécessaire aux explications fournies, empêche toute lassitude : on (ré)apprend l’histoire du cinéma, on se confronte à de nombreux concepts économiques, on se questionne sur les choix politiques qui entourent le septième art, mais surtout, on comprend pourquoi la situation est telle qu’elle est, et comment essayer l’améliorer. Si le propos peut parfois devenir technique (le glossaire est fourni !), pas de panique : les schémas et les graphiques viennent accompagner le lecteur, et agissent comme des béquilles bienvenues, surtout pour qui a la mémoire visuelle…

Sans jamais imposer de solution (ce serait idiot), mais en n’ayant pas peur d’afficher certains partis pris, comme l’importance de la salle de cinéma (aVoir-aLire aura du mal à lui donner tort), Laurent Creton développe son propos avec fluidité, et propose de s’immerger dans l’envers (l’enfer ?) du décor : comment finance-t-on un film, comment le vend-on, où va l’argent lorsque j’en achète un, quels sont les atouts du cinéma français, ses limites ? Un prisme est particulièrement développé : l’antagonisme entre cinémas français et américain. Surtout, le propos offre de belles pistes de réflexions avec un mot d’ordre : une crise est d’abord une opportunité, pas une limite !

Espérons que cela s’avère vrai, avec une réalité qui semble justifier une septième édition…