Le 10 novembre 2016
Un premier film déjà très maîtrisé, histoire d’amour, de théâtre et de pulsions.
- Réalisateur : Shohei Imamura
- Acteurs : Hiroyuki Nagato, Osamu Takizawa
- Genre : Drame, Noir et blanc
- Nationalité : Japonais
- Distributeur : Mary-X Distribution
- Editeur vidéo : Elephant Films
- Durée : 1h32mn
- Reprise: 22 mai 2019
- Titre original : Nusumareta Yokujo
- Date de sortie : 15 novembre 2016
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– Sortie Blu-ray : le 15 novembre 2016
– Année de production : 1958
Résumé : Le directeur d’un théâtre itinérant s’éprend de la femme de son fils.
Notre avis : Pour les admirateurs d’Imamura, Désirs volés risque d’être une déception, tant ce premier film manque d’audaces et reste sage. Néanmoins, c’est une œuvre constamment passionnante, non seulement par le regard d’un cinéaste déjà maître de la mise en scène, mais aussi par ce qu’il fait d’un sujet somme toute banal et qui annonce la suite de sa filmographie.
- Copyright Mary-X Distribution
Ce qui frappe dès les premières images et ne sera pas démenti par la suite, c’est l’utilisation de l’écran large : pour figurer la promiscuité ou disposer les personnages en une scénographie toujours signifiante, Imamura jongle avec la profondeur de champ et de savantes compositions qui, pour être classiques, n’en sont pas moins remarquables. Mais cette forme impeccable lui permet aussi de brasser les protagonistes en un quasi-ballet, à la mesure des sentiments qui les animent. Et, au fond, le film ne cesse de parler de désirs : du voyeurisme (les strip-teaseuses) au moindre figurant qui lorgne une spectatrice, tous sont en proie à des pulsions souvent non partagées. À ce jeu des passions s’ajoute le goût du spectacle -qui se combine avec lui jusqu’à presque proscrire l’intimité- et la difficulté à créer et à en vivre. À cet égard le personnage du metteur en scène, double hypothétique du réalisateur, tiraillé entre la tentation de la télévision et l’attrait du théâtre, même minable, incarne à lui seul une sorte d’oxymore, quelque chose comme une grandeur de bas étage.
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Haute et basse culture, sexe et sentiment, corps et esprit, sur ces oppositions Imamura crée un monde grouillant, infiniment vivant, qu’il sait saisir aussi bien dans sa noblesse que dans des détails du quotidien : combien de personnages grimaçant, baillant ou même se curant le nez ? On le sent fasciné par cette humanité dynamique, perpétuellement agitée et qui lui impose un rythme rapide, dont le symbole pourrait être la construction du chapiteau.
Mais c’est aussi un ramassis de minables, depuis les acteurs sans envergure jusqu’aux ravisseurs incompétents, que le cinéaste regarde avec une sorte de tendresse désolée : des perdants existentiels autant que sociaux, condamnés à l’échec et à la frustration. Le seul amour partagé est un amour interdit et, s’il entraîne le remords, Imamura lui réserve ses plans les plus lumineux et les plus sobres. Ces passages, plus nombreux vers la fin, sont certes davantage conventionnels mais leur simplicité presque tragique parvient à émouvoir sans pathos.
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Désirs volés n’est pas le chef-d’œuvre ignoré d’un grand cinéaste : c’est plutôt un galop d’essai, encore timide, sobre et de facture très classique. Mais au-delà même de l’extraordinaire sens du découpage, Imamura inaugure un regard singulier, cette vision particulière d’une humanité en perpétuel débordement, mue par des désirs qui la dépassent ; le théâtre est ici presque un prétexte, qui lui permet de filmer le grouillement et le multiple (ah ! Les trognes des spectateurs !). Un galop d’essai, certes, mais palpitant, exigeant, foisonnant.
Les suppléments :
Le commentaire fin de Stephen Sarrazin, s’il est court (8 minutes 30) est une synthèse lumineuse de l’art d’ Imamura ; regard anthropologique, conflit corps/culture, beaucoup est dit en peu de temps… Reste qu’on en aurait tout de même aimé davantage.
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L’image :
Dans le détail, on note bien quelques imperfections, mais la copie restaurée est de toute beauté, tant les nuances d’un noir et blanc soigné sont respectées.
Le son :
La seule piste disponible met bien en valeur la palette des voix, comme les commentaires musicaux, sans souffle ni parasites.
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