Notre avis : Coup de vent s’ouvre alors que Neal est sur un bateau, sur le point de mourir pour cause de déshydratation, si ce n’était pas la mer qui menaçait de les engloutir, lui et son voilier. Le roman alternera ensuite les points de vue, dès le commencement de la seconde partie, comme si le scénariste (ici auteur) imaginait un fondu au noir, afin de quitter Neal et sa situation pour le moins critique, racontant ce qui l’a amené là, en plein milieu de l’océan, à deux doigts de la mort. Seront ainsi évoqués ses anciens collègues, Bryan, le jeune « loup de Wall Street », prometteur, ambitieux et audacieux, Seon-yun, sa collègue déjà lassée de son fiancé, et Piet, petit mais féroce policier, reconverti en enquêteur à son compte.
Dès les premières lignes, le lecteur sent qu’il va passer un moment étonnant mais non moins agréable – plus agréable pour lui que pour les héros, soit-dit-en-passant. Les dialogues sont savoureux, les péripéties, amusantes, mais produisant un récit non moins haletant. Un seul reproche : la platitude des personnages. Tous se ressemblent et nous finissons donc volontiers par les mélanger. Les hommes, à l’exception de Neal, gay qui ne se remet pas de sa rupture, sont construits plus ou moins à l’image de l’auteur, si l’on en croit sa courte biographie : « hédonistes » et amateurs de bonne chère, dans tous les sens du terme… Les situations cocasses dans lesquelles ils se retrouvent à cause de leur moralité plutôt douteuse, sont certes piquantes à souhait, mais un peu plus d’épaisseur ne leur aurait pas fait de mal. Les femmes s’en sortent un peu mieux : Seon-yun et Chloë sont sans doute un peu plus complexes et moins caricaturales que leurs partenaires masculins. Malgré tout, peut-être gagne-t-on à ne pas trop s’attacher à eux…

L’auteur – habitué des écrans, ce qui se ressent dans son livre, très visuel – balaye ici tous les préconçus, toutes les règles pour bâtir une œuvre à son image, complexe et profondément drôle. Les personnages se retrouvent très souvent dans des positions inconfortables et grotesques (parfois, littéralement...) qui amusent le lecteur, renouant ainsi avec son amour pour l’humour acerbe et son côté moraliste sans-cœur absolument impitoyable.