Corbier, des traces dans la mémoire des masses - la critique du film

Notre avis : C’est assurément le film d’un admirateur. Parce qu’il se tait et écoute le jovial François Corbier, idole des années Récré A2 et du club Dorothée, Félix Létot reste à distance respectueuse de la critique qui pourrait fondre, avec ses ailes de vautour, sur le chanteur des années 90, ami des enfants, vampirisé par les thuriféraires de Bouygues, complice des abrutissantes émissions de Dorothée. Ce Corbier-là ne disconvient pas qu’il a fait le guignol et que des producteurs se sont remplis les poches, en l’exploitant. Il se permet même de tanser les dirigeants de la chaîne privée, tout en reconnaissant qu’il est difficile de cracher dans une soupe qu’on a mangée grassement chaque semaine.

Copyright Cinéma Saint-André des Arts

Si l’on est chagrin, on considèrera qu’il balaye vite les reproches, avec une bonhommie quelque peu commode. On a surtout l’impression que le septuagénaire, gentiment revenu de tout, n’a jamais vraiment cherché à faire carrière, ce que confirme ce documentaire réjouissant, qui revient sur le parcours du doux iconoclaste, de son enfance malheureuse aux années cabaret, durant lesquelles Corbier court le cacheton, rencontre Brassens et lui propose des chansons, sans véritablement défendre sa cause. Le film n’oublie évidemment pas la séquence médiatique, scellée par la rencontre avec Jacqueline Joubert, responsable de l’unité jeunesse sur Antenne 2. C’est le début de l’aventure avec Dorothée et sa bande, dans laquelle figure le regretté Cabu, que l’on revoit avec émotion, à travers des séquences so vintage.

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On ne sait si Corbier est un dilettante affirmé ou un timide qui se cache. Un peu des deux, sans doute, même si depuis une quinzaine d’années, l’artiste, qui a mangé de la vache enragée, jusqu’à ne plus se nourrir à sa faim, donne surtout l’impression d’être devenu un vieux sage, auteur de chansons à texte plus ou moins sérieuses, dans une certaine tradition rive gauche. Avec un peu plus d’humour, cependant.
Au final, on se réjouit que notre joyeux guitariste, aux airs de barde gaulois, ait trouvé une forme de sérénité artistique. Mais on regrette que le documentaire, dans sa forme, ne soit pas plus inventif. L’alternance entre les témoignages d’amis (Léandri, Jacky, Dorothée), les prestations sur scène, et les déambulations dans le village d’enfance donnent très nettement une impression de déjà-vu.