Le 23 novembre 2024
L’une des meilleures comédies anglaises, la plus élégante, la plus fine. La plus noire aussi.
- Réalisateur : Robert Hamer
- Acteurs : Alec Guinness, Hugh Griffith, Valerie Hobson, Joan Greenwood, Arthur Lowe, Dennis Price
- Genre : Comédie dramatique, Noir et blanc, Comédie policière
- Nationalité : Britannique
- Distributeur : Tamasa Distribution
- Editeur vidéo : Studiocanal
- Durée : 1h46mn
- Reprise: 4 décembre 2024
- Box-office : 1 303 702 entrées France / 901 511 entrées P.P.
- Titre original : Kind Hearts and Coronets
- Date de sortie : 12 février 1950
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Résumé : Louis souhaite retrouver le titre qui lui est dû afin de venger sa mère, une ancienne aristocrate reniée par la noblesse anglaise. Le problème, c’est qu’il n’est pas l’héritier direct : il n’est au contraire que la neuvième personne pouvant prétendre à la succession. Une seule solution : se débarrasser des huit autres successeurs...
Critique : C’est le ton qui saisit dès le début, cette extrême distinction, qu’on ne peut évidemment apprécier qu’en version originale ; il détermine l’ensemble du film, par l’effet d’une voix off omniprésente qui rend les événements les plus atroces délicieux. Atroces, puisque Louis, le héros, est un meurtrier en série qui élimine tous les membres de sa famille pour hériter d’un titre et venger sa mère reniée pour cause de mésalliance. Délicieux à cause de ce commentaire permanent, mais aussi de l’alacrité du récit, dans lequel les morts s’enchaînent à un rythme trépidant, sans se départir d’un sérieux teinté d’ironie. Qu’elles sont jolies ces variations dans le crime : poison, accident de chasse, de bateau, de photographie ou de montgolfière, tous les moyens sont bons pour se débarrasser d’encombrants héritiers. Mais le scénario prend soin de les présenter comme des abrutis finis, qu’ils soient ecclésiastique ou suffragette, odieux ou sympathiques. Cette vision sarcastique de la noblesse anglaise est des plus réjouissantes, mais elle faisait montre d’audace dans l’Angleterre de 1949. De manière parfaitement immorale, et comme l’assassin a suffisamment de charme et d’élégance, le spectateur ne peut qu’être ravi de son impeccable vengeance. Certes, la toute fin laisse entendre qu’il y a une justice, en un dernier retournement ravageur ; mais trop tard, Louis a conquis notre sympathie et ridiculisé l’ensemble de la noblesse.
- © Tamasa Distribution
On le sait, ce film tient sa réputation du fait qu’Alec Guinness y interprète pas moins de huit rôles, c’est à dire la totalité des ducs (et même une duchesse) potentiels. On sent d’ailleurs dans son jeu une jubilation communicative : le voir incarner un photographe amateur niais, un prêtre crétin ou un amoureux arrogant avec postiches et effets de voix relève du plaisir rare. Cependant, limiter Noblesse oblige à ce tour de force est une singulière réduction : l’humour exquis et qui supporte plusieurs visions repose également, et entre autres, sur une mise en scène aussi élégante que son héros (l’utilisation des décors ou de la musique, le choix des cadres). Les morceaux d’anthologie s’enchaînent sans heurts : l’éloge funèbre, le jugement, la conversation cryptée entre Sibella et Louis dans la prison, autant de petits délices dont on ne se lasse pas.
On n’oubliera pourtant pas que, si le film est allègre et comme en apesanteur, son fond ne cesse de broyer du noir ; les femmes y sont victimes et manipulatrices, la justice obtuse. Quant aux hommes, leur bêtise et leur vanité s’ajoutent à des manies ridicules pour former un tableau d’une rare méchanceté. On sourira souvent de leurs travers, quitte à se reconnaître dans tel ou tel portrait à charge, car tout, dans ce chef-d’œuvre de la comédie, est porté par une grâce ineffable. Un vrai bonheur.
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