Nouvelle vague japonaise
Le 16 juillet 2007
Superbe édition d’un cinéaste méconnu, aux style et thèmes puissants et originaux. A découvrir !
- Réalisateur : Masahiro Shinoda
- Acteurs : Eiji Okada, Tetsurô Tamba, Shima Iwashita, Kichiemon Nakamura
- Genre : Drame, Romance, Espionnage
- Nationalité : Japonais
- Editeur vidéo : Wild Side Video
LES FILMS
Assassinat, 1964, 1h44mn
Fleur pâle, 1964, 1h36mn
La guerre des espions, 1965, 1h39mn
Double suicide à Amijima, 1969, 1h43
L’argument : Assassinat : Japon, début 1853. Quatre vaisseaux à vapeur (les “4 voiles noires”) du commandant américain Matthew Perry jettent l’ancre dans la baie d’Edo au Japon : après 300 ans de vie en autarcie, l’Empereur se voit enjoindre d’ouvrir son pays au commerce. Cela déclenche des troubles dans la ville, des arrestations en chaîne, et des manœuvres politiciennes qui opposent le Shogun de la ville, favorable à un traité commercial, et l’Empereur, qui prône l’autonomie nationale. Dix ans plus tard, rien n’est entériné : l’ambitieux samouraï Hachiro Kiyokawa est ainsi tiraillé entre sa fidélité au Shogun et son respect pour l’Empereur, à moins que, tous scrupules ravalés, il ne se demande finalement où est son intérêt...
Fleur pâle : Après trois ans de prison, un dangereux gangster (Muraki) sort enfin. Son ancienne compagne Shinko ne l’intéresse plus vraiment, pas plus que son clan, dont les alliances le déçoivent. Réfugié dans le jeu, il repère Saeko, une jeune femme audacieuse dans un tripot clandestin. Fascinée par l’univers des voyous et les lieux interlopes, elle accepte de le suivre dans sa tournée des maisons de jeux de Tokyo. Bientôt, Yoh, jeune trafiquant de drogue à la vie dissolue, poursuit également Saeko de ses assiduités...
La guerre des espions : Japon, 1614 : le clan Toyotomi et le clan Tokugawa sont au bord d’une nouvelle guerre, malgré la défaite des Toyotomi quatorze ans plus tôt à la fameuse bataille de Sekigahara. Susuke (Koji Takahashi) est un espion à la solde du clan Sanada, qui, malgré la mort du général à Sekigahara, perpétue la tradition yakuza du clan. Il est chargé d’espionner les deux camps rivaux et s’efforce de rester neutre, jusqu’à ce qu’il soit mêlé malgré lui à un meurtre impliquant les deux clans. Il doit alors mener l’enquête...
Double suicide à Amijima : Osaka, XVIIIe siècle. En totale contradiction avec les conventions sociales de l’époque, Jihei (Kichiemon Nakamura), un marchand de papier, sacrifie sa fortune, sa famille et finalement sa vie par amour pour Koharu (Shima Iwashita), une courtisane qu’il ne pourra arracher à sa condition.
Notre avis : Et une bonne idée de plus, de la part du distributeur Wild Side ! Toujours à la pointe de l’édition (on ne voit guère que l’excellent Carlotta pour lui faire de l’ombre), il nous permet aujourd’hui de (re)découvrir l’œuvre méconnue d’un grand cinéaste japonais, version années 60. C’est, paraît-il, sa période la plus faste. Et au vu des films proposés, il faudrait être bien exigeant pour prétendre le contraire.
Au programme, quatre métrages en noir et blanc, qui ont en commun une forte inscription dans leur époque, souvent abordée de manière métaphorique, puisque située dans le passé. Shinoda explore avec talent les genres phares du cinéma nippon, des films de samouraï (Assassinat, La guerre des espions) et de yakuza (Fleur pâle), en passant par le drame intimiste (Double suicide...) et existentialiste (Fleur pâle à nouveau). Contrat plus que rempli, puisqu’il excelle dans chacune de ces catégories. Et c’est bien du monde troublé de l’après-guerre et en particulier de la guerre froide qu’il parle. Qu’est-ce que l’engagement ? Comment se situer entre deux blocs qui s’affrontent ? Dans une société qui abandonne peu à peu ses valeurs traditionnelles pour s’orienter vers le matérialisme ? Quelle place pour les femmes dans une société patriarcale ? Entre errance et résistance, ses personnages semblent désorientés, comme des poissons hors de l’eau, en butte à de violents conflits politiques et intimes.
À l’aide d’une mise en scène inventive, fluide et spectaculaire, dominée par un exceptionnel sens du cadre et une radieuse utilisation de la lumière, Shinoda livre des œuvres complexes et splendides, qui ne laissent d’interroger. Brille particulièrement Double suicide à Amijima, pépite dans laquelle, entre lyrisme et hystérie, un couple tente de se réunir malgré les puissantes contraintes imposées par la société. Les personnages figurés par des marionnettes, semblent symboliser la vision de l’auteur. Pessimiste mais magnifique. Un must !
LE DVD
Les suppléments
Chacun des opus est accompagné d’un entretien avec Shinoda, qui présente ses objectifs et explicite les conditions dans lesquelles il a travaillé. Seul regret : peu de commentaires sur ses choix de mise en scène. À voir également, une interview de Mark Shilling, spécialiste du cinéma japonais et plus particulièrement des films de yakuzas.
Image et son
La quasi-perfection pour cette édition de très grande qualité, tant au niveau de l’image, qui rend parfaitement les contrastes de lumière, que de la bande-son, précise et équilibrée (dans le rapport dialogues/ambiance notamment).
Le choix du rédacteur
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Claude Rieffel 18 avril 2010
Coffret Masahiro Shinoda
Fleur vénéneuse
Les quatre films sont magnifiques mais le plus sidérant reste quand même "Fleur pâle" , film de yakusas certes, mais surtout plongée vertigineuse et voluptueuse dans l’enfer du jeu avec ses personnages en proie à la tentation irrésistible de se perdre.