A la découverte de l’Inde
Le 11 décembre 2006
Deuxième coffret Ivory pour MK2. Cette fois-ci, c’est le versant indien de l’œuvre du réalisateur qui est exploré. Un univers riche et séduisant, à découvrir.
- Réalisateur : James Ivory
- Acteurs : Julie Christie, Greta Scacchi, Shashi Kapoor
- Genre : Comédie dramatique
- Editeur vidéo : MK2 Video
L'a vu
Veut le voir
The householder (1963, 1h40mn)
Shakespeare-Wallah (1965, 2h)
Bombay talkies (1970, 1h42mn)
Chaleur et poussière (Heat and dust, 1983, 2h13mn)
Deuxième coffret Ivory pour MK2. Cette fois-ci, c’est le versant indien de l’œuvre du réalisateur qui est exploré. Un univers riche et séduisant, à découvrir.
Les arguments : The householder : A Delhi, Prem, jeune professeur peu aisé récemment marié à Indu, a bien du mal à comprendre sa jeune épouse. Il cherche donc aide et conseil auprès de sa mère, envahissante matriarche, d’un ami plus âgé, et d’Occidentaux venus en Inde en espérant y trouver une illumination...
Shakespeare-Wallah : Au lendemain de l’indépendance de l’Inde, une troupe ambulante d’acteurs shakespeariens est confrontée à la modernisation du pays et au rejet de la culture britannique. La plus jeune comédienne, Lizzie, anglaise née en Inde, s’éprend d’un jeune Indien...
Bombay talkie : Lucia Lane, écrivain britannique, se rend à Bollywood pour travailler sur son prochain roman. Elle y rencontre Hari, scénariste, qui se propose de la guider, mais elle n’a d’yeux que pour Vikram, la star du film, pourtant marié à la jeune Mala...
Chaleur et poussière : En Inde, dans les années 1920, Olivia, mariée à un collecteur d’impôts anglais, tombe sous le charme du prince de la région... Bien des années plus tard, Anne, sa petite-nièce, part sur les traces de cette mystérieuse héroïne, sans se douter qu’elle connaîtra un destin similaire...
Notre avis : Riche idée de la part de l’éditeur MK2, après le coffret consacré aux superbes adaptations du romancier E.M. Forster que de s’intéresser à un pendant beaucoup moins connu de l’œuvre de James Ivory. Et rendre hommage aux films "indiens" du cinéaste américain n’est que justice puisque c’est par là qu’il a commencé, après les deux rencontres qui ont donné naissance à l’un des trios les plus prolifiques du cinéma mondial : Ismail Merchant (producteur) et Ruth Prawer Jhabvala. Des films devenus difficiles à voir et qu’il est au demeurant bien agréable de (re)découvrir.
On y retrouve l’intérêt d’Ivory pour les rapports de classe et la difficulté des rapports amoureux. Il se décline ici essentiellement sur un mode Occident/Orient, doublé d’une différence de conditions sociales. Excepté dans The householder, le seul film qui n’a pas d’Occidentaux parmi ses personnages principaux, le récit met en rapport un Indien qui occupe une position sociale supérieure à celle de ses interlocuteurs anglais.
Quand Shashi Kapoor (remarquable et superbe acteur, qu’on a grand plaisir à découvrir puis retrouver dans chacune des quatre œuvres) incarne une star de Bollywood ou un prince, ses interlocuteurs sont des comédiens en mal de public, un écrivain paumé, un collecteur d’impôt, un médecin... Ce qui n’empêche pas certains de prendre de grands airs et de prétendre en remontrer à ceux qu’ils considèrent comme des sauvages (notamment dans la partie 1923 de Chaleur et poussière, quand l’Inde était encore une colonie britannique). Et quand ouverture il y a, essentiellement par le biais des sentiments, le pessimisme l’emporte quant à l’issue d’amours rendues doublement plus difficiles. La seule exception est à nouveau présente dans le plus anciens des films, très jolie histoire d’un homme qui apprend après son mariage à découvrir et à aimer son épouse. Il ne s’agit cependant pas là d’une union mixte, mais endogamique. Ce qui n’empêche d’ailleurs pas Ivory de s’y pencher sur les rapports sociaux entre Indiens, et d’en dresser un constat qui n’a rien à voir avec l’angélisme.
Autre thème abordé, celui du passage, de la modernisation. Il court lui aussi dans l’œuvre du réalisateur et ces œuvres témoignent également de la fin d’un monde. Celui d’une société dans laquelle, après l’indépendance, les seigneurs locaux déchus perdent de leur superbe. Celui qui voit le triomphe du cinéma sur le théâtre. Compréhensibles, ces évolutions n’en laissent pas moins un goût amer à ceux qui les subissent, malgré une belle et honorable résistance parfois (comme l’évocation mélancolique de la troupe de Shakespeare-Wallah..
La réalisation de James Ivory, réputée pour son classicisme (et ce n’est pas un reproche), sait être élégante et juste. La splendeur de la photographie éclate à nouveau, dans chacun des films. Faisant souvent preuve d’humour tant au niveau des situations (ne pas rater le générique et la première séquence de Bombay talkie, savoureux hommage aux productions bollywoodiennes) que des personnages (en vrac, une marâtre, une épouse hystérique, un médecin borné, un charlatan, une actrice de cinéma, un Occidental en mal de spiritualité...), il sait tempérer l’amertume de la réalité. L’interprétation est presque totalement irréprochable. Nous avons déjà dit tout le bien que nous pensions de Shashi Kapoor. Ajoutons que si Jennifer Kendal ne convainc pas, Greta Scacchi est lumineuse et Julie Christie n’est pas mal non plus. Autant de qualités qui, s’ajoutant à l’intérêt des sujets abordés, justifient amplement cette belle réédition.
Le coffret 8 DVD
Le(s) supplément(s) à ne pas rater : Programme très copieux, puisque chaque DVD film bénéficie de son doublon bonus. On y trouve des films de différentes natures (documentaires, téléfilms...) ayant tous en commun l’Inde et Merchant-Ivory (soit à la seule production, soit avec la réalisation en plus). Les plus marquants sont un documentaire sur les miniatures indiennes, un autre sur les chanteurs des rues (des lépreux qui gagnent ainsi leur vie) et un téléfilm avec un James Mason vieillissant, mais toujours aussi convaincant. Enfin un documentaire récent dresse un portrait tendre (quoiqu’un peu abrupt dans son montage) du trio d’exception auquel ces beaux films doivent leur existence. Voir Ivory et Merchant (aujourd’hui disparu) se lancer dans des querelles de boutiquiers sans doute plus ou moins feintes est un savoureux spectacle...
& son : Excellente qualité du rendu des films, tant au niveau de l’image (notamment pour la photographie) que du son. Les films proposés en bonus, parfois assez ancien, ne bénéficient pas des mêmes qualités, pour des raisons bien compréhensibles et excusables.
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.