Le 19 novembre 2013
Objet placide flottant quelque part entre un Envoyé Spécial sur la piraterie moderne et un épisode de C’est pas Sorcier sur l’intervention en haute mer, ce film aime le détail, mais manque de panache.
- Réalisateur : Paul Greengrass
- Acteurs : Tom Hanks, Catherine Keener, David Warshofsky, Michael Chernus, Barkhad Abdi
- Genre : Drame, Thriller
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Sony Pictures Releasing France
- Durée : 2h14mn
- Date télé : 29 octobre 2024 22:14
- Chaîne : Ciné+ Premier
- Titre original : Captain Phillips
- Âge : Avertissement : des scènes, des propos ou des images peuvent heurter la sensibilité des spectateurs
- Date de sortie : 20 novembre 2013
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Résumé : L’histoire vraie de la prise d’otages du navire de marine marchande américain Maersk Alabama, menée en 2009 par des pirates somaliens. La relation qui s’instaure entre le capitaine Richard Phillips, commandant du bateau, et Muse, le chef des pirates somaliens qui le prend en otage, est au cœur du récit. Les deux hommes sont inévitablement amenés à s’affronter lorsque Muse et son équipe s’attaquent au navire désarmé de Phillips. À plus de 230 kilomètres des côtes somaliennes, les deux camps vont se retrouver à la merci de forces qui les dépassent…
Critique : Le naturalisme est un peu le bâton de vieillesse du papa des Jason Bourne 2 et 3 : quelque chose sur lequel il peut se reposer, qui l’emmènera loin en ralliant systématiquement à sa cause les fanatiques de l’action vraisemblable, mais n’empêchera jamais une Parkinson galopante de faire trembler ses cadres et ses détracteurs. Fidèle à la patte déposée de papa, Capitaine Phillips s’accroche à son histoire vraie pour justifier son style documentaire, et place tous ses jetons sur le principe d’identification forcée (en gros, que feriez-vous à la place de Tom Hanks ?). Or, quand la tension trébuche (et que son récit fatigue) ce thriller géo-politico-marin à court d’arguments l’accompagne tristement dans sa chute.
Avant toute chose, le capitaine Tom Hanks Phillips n’est ni plus ni moins qu’une incarnation de la doctrine Greengrass. Pudique, taiseux à sang-froid, ennemi du pathos, il est là pour faire le job, et pas beaucoup plus, quitte à frôler l’héroïsme si la situation l’exige. Un certain sens du devoir quoi. D’ailleurs, son rival est aussi son reflet somalien. Il n’élève pas de futurs diplômés de la WASP academy, mais lutte pour nourrir son clan. C’est un pirate par nécessité, un anti-héros malgré lui. Plutôt excitant, direz-vous en préparant vos CB à chauffer au multiplexe : ces deux types, c’est un peu vous au début d’une sale journée.
Seulement voilà, incapable de dépasser la barrière des faits, et de creuser un peu ce mariage psychologique forcé, le trop long métrage ne vous serrera les tripes qu’à l’issue d’une entrée en matière plutôt efficace, c’est-à-dire au moment précis où le piège corsaire se referme sur le pauvre bateau de marchandises. Passées les premières séquences de la prise d’otage, pleines de stress mécanique (Greengrass aime filmer les leviers) et d’angoisse polyglotte (lorsqu’on a un flingue sur la tempe, on préfère échanger avec son possesseur dans la même langue), le premier huis clos (oui, il y en a deux, et l’espace se réduit au cours du second, parce que big Paul n’est pas à une grosse ficelle près), Capitaine Phillips se prend les pieds dans l’obstacle contre lequel il butera jusqu’au générique de fin : une froideur de juge anesthésié. Les dialogues opprimé/oppresseur se veulent lourds de sens, mais restent dérisoires, les humeurs sont impénétrables, les relations entre personnages tout juste fonctionnelles, et seuls les drogués paniquent (c’est bien connu). Bref, le film est aussi inhumain que la cohorte de SEALS (L’unité fatale à Ben Laden) qui débarque pour mettre fin à cette vaste farce. Pire, il compte sur une réalisation quasi dermatologique (plus c’est grave, plus je me rapproche des acteurs) ou de l’esbroufe bien montée (quand on ne trouve pas le bon cadre, autant en livrer cinquante-six) pour masquer à grand peine la faillite d’un suspense monté trop vite et mal entretenu. Non seulement l’issue est claire trente minutes avant la fin du film (sans connaître l’histoire du vrai Phillips), mais on finit par soupirer sérieusement au vu des artifices péniblement renouvelés par un Greengrass qui ne touche sa cible qu’à la toute fin de son métrage, au moment de filmer un véritable épisode de détresse émotionnelle. Mais là encore, il le fait comme un infirmier, et l’on se demande si cet homme est fait pour le cinéma ou la reconstitution cathodique. D’ailleurs si l’on adorerait savoir l’Anglais aux commandes du prochain Zone Interdite, c’est à reculons que nous irons voir son prochain non-film. Après, si vous envisagez de faire un stage au GIGN, cette chose est faite pour vous.
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