L’Impossible objet
Le 2 octobre 2017
Un volcan qui crépite, des noctambules qui s’agitent, romantiques, désabusés… Notre monde hyperconnecté et parfois insensible peut-il encore mourir d’amour, et si oui comment ?, se demande Joseph Truflandier dans un beau premier long-métrage.
- Réalisateur : Joseph Truflandier
- Genre : Documentaire, Romance
- Nationalité : Français
- Durée : 1h10mn
- Date de sortie : 4 octobre 2017
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Résumé : Pendant un an, deux personnes ont tenté de tomber amoureuses l’une de l’autre. À cette expérience se mêlent les conseils de personnes croisées au hasard, dans le but de sonder l’amour et de répondre à la vaste question, sinon la seule valable : “Comment ça marche ?”
Notre avis : Dans Les Corps Absents (2015), remarquable moyen-métrage documentaire sur fond d’existentialisme, Joseph Truflandier auscultait le vertige ressenti face au vide par toute une génération passant à l’âge adulte. L’occasion d’explorer alors ces instants de stase où une personne échoue à trouver à travers l’espace social environnant autre chose que des abysses pour se déterminer, trouver sa modalité d’existence. Où la philosophie et le roman - de Roberto Uden à Krishnamurti en passant par Henry Miller - occupaient une place centrale. Si Joseph Truflandier en apparence déjoue cette fois dans Ça parle d’amour la veine conceptuelle de son précédent docu, tout un réseau de pensées foisonnantes ne manque pas pourtant de rejaillir en creux, de nouveau, dans les mots des différents intervenants. À partir d’un réel - la rencontre sur Tinder entre Joseph et Carlos, qui décident d’un commun accord dès leur premier rendez-vous de filmer pendant un an l’histoire d’amour qui pourrait s’immiscer entre eux -, le réalisateur bascule dans une sorte de fiction étrange et mouvante. Un dispositif dont la rhétorique issue en partie de la téléréalité (les confidences face caméra à l’image d’un journal de bord, etc.) par nécessité critique, et de nos dépendances aux nouvelles technologies (toute communication s’avère ici quelque part intermédiée, mise en abyme, par une NTIC), s’interroge sur le devenir du sentiment amoureux à l’aune de notre monde contemporain désenchanté.
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Mêlant avec décalage et sensibilité son vécu au service d’une question universelle, Joseph Truflandier tantôt articule son montage au gré des digressions sur l’amour des personnes qu’il interroge, tantôt glisse par épisode l’avancée d’une histoire d’amour déterminée d’avance mais qui pourtant s’écrit par elle-même. Le cadre s’élargit jusqu’à trouver des voix à l’autre bout du monde, sur Skype, pour parler passion. Toute cette polyphonie existentielle finit par dessiner un patchwork impénétrable, où l’amour apparaît aussi singulier et ondoyant que les badauds qui en parlent. De l’ersatz de Marguerite Duras à l’idéaliste croisé à la sortie des toilettes, chacun donne sa vérité sur une matière insaisissable, au carrefour du doute et de l’insouciance. Dans sa course parfois un peu trop structurée et structurante - de l’intimité, la relation pour atteindre l’amour en passe nécessairement par la passion et l’engagement -, Ça parle d’amour se mue alors en une sorte de portrait groupé d’adulescents en quête d’un monde - un état, une sensation, une personne - s’accordant à leurs désirs, quand bien même fut-il utopique. Quoi de mieux que l’éruption de volcan introductive du documentaire pour illustrer cette recherche - bouillonnement extatique - de l’intangible ? Même si quelque chose d’un tantinet programmatique, la faute par moment à une composition trop linéaire, alanguit légèrement l’expérience de Ça parle d’amour, s’y distille une réalité profonde et sensitive. Les plans, notamment, entre Chantal Akerman et Gus Van Sant, dans l’intimité des amoureux Joseph et Carlos - acteurs nés malgré eux -, fourmillent de justesse.
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De ce bel "égotrip", qu’il soit égayé par une voyante et autres soirées entre amis ou bercé par le Velvet Underground, Céline Dion, Elliot Smith, Jonathan Keevil, etc., affleure un tendre voyage entre jeunesse et modernité. Joli coup d’essai que ce premier long-métrage de Joseph Truflandier.
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