"Ça" aurait pu faire peur mais "Ça" déçoit
Le 20 septembre 2017
Sur une trame assez fidèle au roman de Stephen King, une adaptation sympathique, toutefois loin de l’œuvre cauchemardesque, perverse, et même mystique, que ce long-métrage a édulcorée.
- Réalisateur : Andy Muschietti
- Acteurs : Jaeden Lieberher, Sophia Lillis, Bill Skarsgård, Finn Wolfhard, Jack Dylan Grazer, Wyatt Oleff
- Genre : Fantastique, Thriller, Épouvante-horreur, Teen movie
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Warner Bros. France
- Editeur vidéo : Warner Home Video
- Durée : 2h15mn
- Date télé : 5 octobre 2023 22:50
- Chaîne : Paris Première
- Titre original : It
- Âge : Interdit aux moins de 12 ans
- Date de sortie : 20 septembre 2017
- Voir le dossier : Stephen King
Résumé : Plusieurs disparitions d’enfants sont signalées dans la petite ville de Derry, dans le Maine. Au même moment, une bande d’adolescents doit affronter un clown maléfique et tueur, du nom de Pennywise, qui sévit depuis des siècles. Ils vont connaître leur plus grande terreur…
Critique : Est-il encore nécessaire de présenter ce cher Stephen King ? Après (déjà !) quarante ans d’adaptations filmiques de ses romans, dans des qualités plus que diverses (le fiasco de La Tour Sombre ne date que de quelques semaines), il est inutile d’avoir jamais ouvert le moindre d’entre eux pour que son univers fantastique ait imprégné notre imaginaire. Parmi les réalisations qui ont le mieux imprégné la culture populaire, on peut aisément citer Shining et le légendaire pétage de plomb de Jack Nicholson, et le téléfilm Ça de 1990.
Si celui-ci, avec le recul, n’avait pas une réalisation mémorable, son succès ne reposait que sur un seul et unique élément, la prestation de Tim Curry qui transcendait tout le degré de perversité du roman. C’est ceci qui fit de ce clown maléfique un « boogeyman » effrayant, dans la lignée des grands monstres du bestiaire du 7e Art.
La question que se sont assurément posée, même inconsciemment, tous les anciens enfants traumatisés par cette créature, en apprenant qu’Andres Muschietti préparait une nouvelle adaptation du roman, était de savoir si le réalisateur de Mama allait lui-aussi bâtir son regard sur la figure cauchemardesque de Grippe-Sou. La comparaison avec le téléfilm de Tommy Lee Wallace, s’arrête là puisqu’il apparaît rapidement que ce n’est pas le cas.
- Copyright Warner Bros. Entertainment
Celui qui avait si bien réussi à filmer la terreur enfantine dans Mama fait cette fois un choix radicalement opposé. La première difficulté à laquelle se sont frottés les scénaristes (dont les plus célèbres sont, rappelons-le, Cary Fukunaga, connu pour son travail sur la première saison de True Detective, et Gary Dauberman, connu pour avoir écrit Annabelle et sa suite) est le temps qui s’est passé depuis la publication. Celui-ci se basait sur une double chronologie, le « présent » (1985), et le « passé » (1958). Aujourd’hui, les années 80 sont devenues le passé. Oubliant le schéma non-linéaire originel, cette relecture de Ça s’axe donc sur les souvenirs d’adultes modernes (que nous ne verrons que dans la suite) en 1988. Tant pis pour les années 50.
La grande idée de Muschietti a été de filmer ce récit en se calquant sur les films fantastiques que regardaient ses jeunes héros à l’époque. Certains sont même nommément cités à l’écran : Gremlins, Bettlejuice, Les griffes de la nuit... Sa mise en scène est donc ultra-référencée, notamment d’ailleurs à une autre adaptation de Stephen King, Stand by Me, un modèle non pas en termes d’épouvante mais dans la reconstitution des relations entre gamins. Son idée est bonne... mais arrive un an après Stranger Things. Et là, en revanche, la comparaison est inévitable, d’autant que personne ne nous fera croire que le film ne s’inspire pas de la série, puisqu’il va même jusqu’à en reprendre l’un des principaux acteurs.
Le recyclage des gimmicks propres aux productions Amblin est - depuis Super 8 en fait ! - devenu un véritable effet de mode et en s’y rattachant, Ça n’offre en fin de compte strictement rien d’innovant. L’importance que Muschietti donne à la sympathie au sein de la bande de copains, avec l’adhésion de trois nouveaux parmi eux, l’empêche de les développer de façon individuelle, faisant d’eux d’inévitables stéréotypes. La dynamique de groupe est certes une pure réussite, mais qu’elle se fasse au détriment des apparitions de la créature maléfique, et par extension de la peur ressentie par les enfants quand ils se retrouvent seuls, empêche de rendre le cauchemar communicatif. Or, c’est exactement ce qu’on attendait d’un tel long-métrage.
- Copyright Warner Bros. Entertainment
Les courtes scènes d’apparition de Grippe-sous ne profitent que de peu d’effets horrifiques réellement marquants, et il ne faut pas compter sur une atmosphère angoissante qui sache nous tenir en haleine du début à la fin. Au contraire, ce film semble n’être que le souvenir un peu naïf que les gamins ont pu garder de l’été de leur première rencontre avec le monstre. Il est donc possible que sa pertinence prenne sens au regard de la suite, et à condition que celle-ci sache profiter d’une mise en scène contemporaine sans trahir l’esprit de ce premier opus (et puisse même revenir sur son happy end bâclé). En attendant, l’événement commercial américain (123M$ en 3 jours, un record pour un film de ce genre) n’est qu’une production standard, preuve supplémentaire de la difficulté d’adapter Stephen King au cinéma, et ce malgré la réputation sulfureuse que le retour du clown avait su se bâtir avant de débarquer sur le grand écran.
Galerie Photos
Le choix du rédacteur
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.
MYTHOMANIAC 27 juin 2019
Ça - la critique du film
Sujet compliqué, le film fonctionne bien dans l’ensemble, l’univers est là, les personnages sont incarnés. Pourtant, il y a dans ce blockbuster horrifique quelque chose qui gène. Évidemment, on passe sur le sujet des années 80, il y a des références comme dans Super 8, mais c’est moins omniprésent que dans le pilote Stranger Things. Le club des loosers fonctionne bien, King s’autoréférence étant une sorte de penchant horrifique de Stand by me.
Le clown et la gestion de l’horreur sont sans doute le nœud du problème.
Malgré une ambiance et des décors très réussis, les quelques jumpscares évidents voir trop faciles et surtout une redondance dans les apparitions maléfiques de Penny Wise entrainent une certaine lassitude.
La scène d’ouverture place la barre haute et le niveau est plus difficile à tenir sur la longueur.
Les idées de mises en scène manquent pour garantir une frayeur optimale. Il en existe dans certaines scènes et c’est bien le plus frustrant. Le clown singe parfois Beetlejuice, parfois se rapproche de Freddy Krueger, il hésite souvent à être lui. Bien que très présents, sans doute trop, il manque de puissance.
Cela fait perdre le plaisir de la scène de confrontation finale, qui traine un peu en longueur. On ajoute une scène finale expédiée surtout pour annoncer la fin de la première partie.
Les allers-retours présent/passé manquent un peu dans la construction narrative. Ils apportaient de la puissance à la force maléfique qui entoure cette petite ville, apportait plus d’empathie pour les personnages, renforçait le triangle amoureux, mettaient en lumière la perte de mémoire et le poids assumé de celui qui reste sur le pont pendant 27 ans attendant le retour potentiel du mal.
Même si la mini série de Tommy Lee Wallace diffusée en France en 1993 manquait de moyens, elle avait trouvé un équilibre intéressant, surtout en comparaison d’un film à 35 millions de dollars. Soyons honnête le film, version 2017 est bon, il apporte une vraie fraîcheur dans les productions d’horreur à la chaîne des derniers années.
Étant enfant à l’époque, je ne suis pas des plus objectifs mais je reste de ceux qui prône leur amour à la Team Curry !