Boris Vian, un cœur qui battait trop fort

Critique : Le documentaire s’ouvre sur la mort de Vian, durant la projection du film J’irai cracher sur vos tombes, adaptation de son célèbre récit, long-métrage qu’il désavouait. Puis, c’est l’enterrement rocambolesque, retardé par le grève des fossoyeurs : une scène que l’auteur de L’écume des jours aurait pu écrire dans un de ses romans délicieusement surréalistes. Le propos privilégie ensuite l’angle du bulletin de santé permanent, ce qui biaise son approche et colore d’une tonalité nettement biographique cette évocation néanmoins plaisante. Disons que pour les fans d’une certaine mythologie, tous les éléments sont là : le Tabou, célèbre club de jazz où l’on voit l’artiste s’activer sur sa trompette, la galaxie des femmes amies, amantes ou admiratrices (Cazalis, Michelle Léglise, sa première épouse, Ursula Vian, sa dernière compagne, Magali Noël pris en flag’ d’interprétation disco du provocateur "Fais-moi mal Johnny", Joan Baez), le paradis musical de Ville-d’Avray, la pataphysique... Et la littérature romanesque dans tout cela ? L’écume des jours est tout juste évoqué, notamment par l’intermédiaire de Queneau (grand fan). L’arrache-cœur, L’automne à Pékin ? Oubliés. Juste une couverture sur laquelle la caméra glisse.
Bref, à la fin de ce film, les profanes auront vraiment l’impression que Boris Vian était un joueur sympa de trompinette, touche-à-tout, fantaisiste, satrape, qui écrivait à l’occasion des chansons marrantes, vaguement provocatrices, gentiment engagées. Un type fréquentable, quoi. Retour à la case départ, donc : avant juin 1959.