De l’existence du Père Noël
Le 8 octobre 2019
Une plongée dans les souvenirs d’enfance du romancier québécois qui fait revivre la magie de Noël.
- Auteur : Michel Tremblay
- Editeur : Actes Sud
- Genre : Autobiographie
- Nationalité : Canadienne
L'a lu
Veut le lire
Le romancier et dramaturge québécois Michel Tremblay replonge, avec Bonbons assortis, dans ses souvenirs d’enfance et fait revivre la magie de Noël, à travers l’infinie crédulité du petit garçon devant les invraisemblables mensonges et les coups tordus mais bienveillants de ses aînés.
Résumé : Parce que le petit Michel a quelque peu grandi et qu’il comprend bien que le Père Noël ne peut pas passer par la cheminée, pour distribuer les cadeaux, puisque la maison est chauffée par un poêle à charbon, son frère Jacques lui invente une histoire à dormir debout, preuve de la confiance crédule que les enfants accordent à leurs aînés, afin de continuer à croire aux belles histoires : Jacques lui raconte que pour remplacer les cheminées, le Père Noël a une brique magique qui le fait rapetisser et grandir pour passer sous les portes. Pour enfoncer le clou, il lui fait croire que le Père Noël a oublié la brique chez eux, le lendemain de Noël, et qu’il faut s’empresser de la lui renvoyer par la poste, de sorte qu’il puisse continuer sa distribution de cadeaux. Et il n’est absolument plus question de remettre en question l’existence du Père Noël, quand Michel reçoit, la semaine suivante, une lettre authentiquement signée du Père Noël, lui-même qui le remercie de lui avoir renvoyé la brique magique...
Notre avis : Les huit récits qui composent Bonbons assortis pourraient paraître un peu niais et sans intérêt. Mais c’est justement cela le matériau premier de Michel Tremblay : des histoires "niaiseuses" comme disent les Québécois, de simples tranches de vie, loin d’une enfance revisitée et magnifiée, racontée avec la plus grande sincérité et sur un ton délicieusement moqueur, tant sur l’auteur lui-même que sur sa singulière et bruyante famille. Point de cynisme qui pourrait faire passer les Tremblay pour des Deschiens canadiens. Juste des dialogues hilarants entre les femmes de la maison (la grand-mère, la tante et la mère de Michel), toutes de plus mauvaise foi les unes que les autres, mais qui hurlent d’une même voix à travers l’appartement, et se cachent dans les placards quand un orage éclate, et s’inquiètent ensemble du qu’en-dira-t-on quand il s’agit de faire un cadeau de noces à la voisine d’en face, que l’on soupçonne de se marier avec un "professionnel".
Hilarants, les dialogues le sont aussi parce qu’écrits en joual [1], ce français si imagé qui prend toute sa dimension exotique pour peu qu’on en lise quelques extraits à voix haute : "C’est pas niaiseux, Nana, c’est ta belle-soeur Berthe pis ton beau-frère Albert qui t’ont donné ce plat à pinottes pour ton mariage y a quasiment vingt-cinq ans ! Si toé t’es t’assez sans coeur pour l’oublier, si toé t’es capable de pas le chercher dans’ maison, eux autres, y vont le chercher quand y vont venir jouer aux cartes samedi soir prochain, pis que c’est qu’on va leur dire ? Y voyent toute, y sentent partout, on n’est pas capables de rien leur cacher, on dirait quasiment qu’y restent ici dedans avec nous autres."
Ce passé gaiement ressuscité constitue sorte de spectacle vivant mis en scène par Michel Tremblay, où l’humour sait laisser la place aux rares, mais intenses moments, que l’auteur partage avec son père, quand celui-ci s’attache à lui faire aimer l’ours en peluche qu’il a reçu pour Noël, ou quand il l’emmène sur le balcon pour lui montrer la splendeur de l’orage et lui faire dépasser sa peur. Ça n’a l’air de rien, comme l’histoire de la brique magique ou du plat à pinottes, et ça a pourtant tout le relief et la couleur de ces faits d’enfance, qui font encore vibrer un adulte et qui donnent envie de se souvenir des manigances mises en oeuvre par nos parents, pour continuer de nous faire croire au Père Noël.
Michel Tremblay, Bonbons assortis, Actes Sud, 2002, 175 pages, 15 €
[1] Le joual (cheval) est l’argot québécois, langage familier et parlé adopté en littérature pour la première fois par Michel Tremblay dans Les belles-soeurs.
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.