Le 16 février 2025
Un peu oubliée dans la filmographie de Blake Edwards, cette comédie drolatique mérite d’être revue, au moins pour des gags énormes et la performance de Kim Basinger.


- Réalisateur : Blake Edwards
- Acteurs : Kim Basinger, Bruce Willis, William Daniels, John Larroquette, Alice Hirson
- Genre : Comédie
- Nationalité : Américain
- Durée : 1h36mn
- Date télé : 18 février 2021 22:20
- Chaîne : OCS Géants
- Box-office : 419 828 entrées France / 182 095 Paris Périphérie / 39.321.715M$ (recettes USA)
- Titre original : Blind Date
- Date de sortie : 9 septembre 1987

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Résumé : Walter Davis, ancien artiste devenu analyste dans une importante société financière, rencontre Nadia par l’intermédiaire de son frère Ted. Mais celle-ci est extrèment sensible à l’alcool. Walter charmé oublie ce détail et fait boire Nadia...
Critique : Dans la fin de carrière un peu essoufflée de Blake Edwards, Boire et déboires sonne comme un rappel amoindri des grandes heures burlesques : certes, La panthère rose et The Party sont loin, Bruce Willis n’a pas le génie comique de Peter Sellers et, par ailleurs, le film souffre d’un manque de rythme et d’unité qui occasionne des passages à vide évidents. Pourtant, malgré ses défauts, il recèle assez d’inventions et de gags pour satisfaire largement l’amateur puisqu’on y retrouve la mécanique impeccable, la précision infaillible du cinéaste.
Le métrage est le croisement improbable des Gremlins (il ne faut pas faire boire une femme) et du quasi contemporain After Hours (la descente aux enfers du héros), avec d’autres emprunts (à la comédie romantique ou à ses propres œuvres) en prime. Mais c’est aussi une logique à part, fondée sur une double prétérition : Walter ne doit pas accepter la proposition de son frère, il l’accepte ; sa compagne, Nadia, ne doit pas boire, elle boit. Le reste n’est affaire que d’une suite de conséquences tout aussi méthodiques dès qu’on ajoute un ex, jaloux, violent et maladroit. Edwards a besoin de peu de choses, et il réussit mieux en vase clos : le restaurant ou la maison du juge se prêtent davantage à ses délires que le grand air. Il faut voir comment il organise les déplacements de tous les personnages à la fin, d’une chambre à l’autre, du rez-de-chaussée au premier étage, avec portes qui se ferment mal à propos et chutes diverses. On tient là un grand moment de pur burlesque, mené de main de maître. Il est dommage que tout le film ne soit pas du même niveau.
Même en petite forme, Blake Edwards multiplie les trouvailles ahurissantes : la maison qui s’en va quand on sonne, le majordome qui montre ses fesses pour faire bouger le chien, la mère qui joue au golf dans la chambre, et tant d’autres qu’on ne citera pas, toutes ces séquences décrivant un monde déréglé, au bord du chaos. Le réalisateur s’y montre particulièrement irrévérencieux, se moquant des juges ou du couple comme du machisme et de l’art contemporain avec une acidité bienvenue. Mais c’est au fond pour souligner encore une morale à la Capra : Walter vivait en yuppie surmené, il avait abandonné la guitare et la rencontre avec Nadia lui permet de remettre l’essentiel, c’est-à-dire une existence simple et intègre au centre. Autrement dit, le chaos révèle l’inauthentique et le remplace par le vrai.
Quant aux personnages, ils ont une saveur singulière : le juge irascible ou son fils avocat incapable sont inoubliables. Mais Edwards n’oublie pas que le gag passe aussi par la mise en scène : ainsi quand Walter se fait tester par les policiers pour savoir s’il est ivre, la caméra dévoile en arrière-plan sa compagne échouant aux mêmes tests. On voit à l’œuvre l’un des ressorts du burlesque, cette capacité à traiter les corps comme des pantins désarticulés, que les nombreuses chutes mettent en évidence.
On l’aura compris, Boire et déboires, s’il n’égale pas les grandes réussites du genre, n’a rien de déshonorant. Même si l’on pourra toujours juger Bruce Willis (pas encore le héros de films d’action, il sortait de la série Clair de lune) insuffisant, ou quelques gags faibles, le charme de ce film délirant (mais pas assez) est indéniable. Quant à Kim Basinger, elle fait preuve d’un vrai talent comique dont on se désole qu’il n’ait pas été plus exploité. En Miss catastrophe, elle révèle un abattage réjouissant.