Président d’un jour
Le 13 juillet 2010
Une chronique polyphonique qui tend à l’exercice de style avec des acteurs qui viennent briser leur image (ou jouer avec elle).
- Réalisateur : Emilio Estevez
- Acteurs : Sharon Stone, Anthony Hopkins, Helen Hunt, Elijah Wood, Martin Sheen, Demi Moore
- Nationalité : Américain
- Date de sortie : 24 janvier 2007
– Durée : 1h52mn
Une chronique polyphonique qui tend à l’exercice de style avec des acteurs qui viennent briser leur image (ou jouer avec elle).
L’argument : Les dernières heures du sénateur Robert F. Kennedy, frère de John, avant son assassinat à l’Ambassador Hotel de Los Angeles, le 6 juin 1968.
Notre avis : Depuis Short cuts, les cinéastes américains adorent les grandes histoires dans lesquelles des personnages de rien se fondent, se croisent et se perdent. Pour Emilio Estevez, la formule du film choral est un moyen de privilégier la structure à la profondeur et surtout de se focaliser sur des hommes et des femmes anonymes qui travaillent à l’Hôtel Ambassador et vont être témoins, le 6 juin 1968, de l’assassinat de Robert F. Kennedy. Mais ce n’est pas de l’opportunisme : Estevez évoque un traumatisme et la manière dont il le retranscrit dans les vingt dernières minutes est intense. A un moment donné, il s’attarde sur deux adolescents qui succombent aux tentations psychotropes en compagnie d’un Ashton Kutcher affublé d’une perruque. Histoire de rappeler qu’Estevez n’aime pas l’esprit de sérieux mais adore les acteurs prisonniers de leur image : Martin Sheen et Helen Hunt forment un couple touchant même si le côté "je-révèle-des-failles-que-je-n’ai-jamais-montrées-auparavant" est un peu lourdingue, William H. Macy et Sharon Stone se déchirent, Demi Moore se perd dans l’alcool et déteste les autres parce qu’elle se déteste elle-même, Laurence Fishburne est là pour refléter les tensions racistes. Christian Slater joue les salauds de service et rappelle qu’il n’a pas été bon au cinéma depuis... Depuis quand au fait ?
Incidemment, bien que ce ne soient pas les intentions d’Emilio Estevez, on peut être tenté de faire un parallèle entre la politique de Kennedy et celle de Bush Jr. dans ce qu’elle représente aux yeux du peuple américain : l’un prône la paix dans le monde - on évoque en pointillés la guerre du Vietnam et l’assassinat de Martin Luther King - et affiche ses intentions anti-bellicistes ; l’autre encourage au contraire le militarisme, la guerre et la destruction par le chaos. Kennedy affichait un sentiment de confiance et d’espoir par l’utopisme et rendait les gens heureux : est-ce que le film ne serait pas justement une façon de remettre en cause la politique de Bush ?
Dans tous les cas, il en résulte la même morale : les Etats-Unis se revendiquent comme une démocratie qui milite pour la paix alors que tout a été construit sur la violence. Ce que David Cronenberg démontrait de manière prodigieuse dans A history of violence où n’importe quel citoyen américain le plus lambda possédait en lui les germes d’un tueur froid et implacable. Maintenant, si on peut se satisfaire des prémisses de réflexion sur la politique et les répercussions qu’elle a sur la société américaine, on est en droit de discuter plusieurs points. Par exemple, si on comprend le choix d’Estevez de n’avoir représenté Bobby Kennedy qu’au travers d’images d’archive et de discours méticuleusement choisis, certains pourront s’offusquer du portrait naïf qu’il fait du politicien en ne cherchant pas à gratter le vernis des apparences pour révéler les tumultueux et noirs secrets de la famille Kennedy.
Estevez semble plus préoccupé par la fascination que l’homme charismatique exerce sur des individus mais ne parvient pas à choisir entre le film politique et les lois de la chronique polyphonique. Bobby reste avant tout un film d’acteurs réservé à ceux qui aiment les confrontations hétéroclites. Ils sont trop nombreux pour que l’on s’attache à tous. Si certains confinent à l’anecdote (le couple Elijah Wood et Lindsay Lohan, pas intéressant ; la présence fantomatique d’Anthony Hopkins qui vient faire deux ou trois parties d’échec en se contrefoutant de ce qui se passe autour de lui) ; d’autres en revanche se mettent subtilement en valeur. Dans l’exercice, comme d’habitude, ce sont souvent les acteurs oubliés qui gagnent (remember Patrick Swayze dans Donnie Darko), même si, parmi les plus jeunes, Freddy Rodriguez tire élégamment son épingle du jeu et confirme les espoirs placés en lui depuis l’inoubliable série Six feet under et plus récemment le terriblement sous-estimé La jeune fille de l’eau.
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vincentho 8 mars 2007
Bobby - la critique
On se sent un peu trompé par le titre du film. Il ne s’agit en fait pas du tout de l’histoire des dernières heures de Bobby, et on n’apprend rien sur les raisons de sa fin. On suit juste le quotidien d’anonymes qui vont finir par se croiser sur la scène de l’assassinat de Bobby. On en ressent donc une certaine déception, même si cette chronique de l’Amérique des années 60 est assez bien montée.