L’empereur des sens
Le 22 août 2007
À la limite du compréhensible, Boarding Gate est sauvé par une Asia Argento omniprésente, véritable source d’inspiration pour le cinéaste.
- Réalisateur : Olivier Assayas
- Acteurs : Asia Argento, Michael Madsen, Kelly Lin, Kim Gordon, Alex Descas
- Genre : Thriller
- Nationalité : Français
- Distributeur : ARP Sélection
- Durée : 1h45mn
- Date de sortie : 22 août 2007
- Festival : Festival de Cannes 2007, Sélection officielle Cannes 2007 (en compétition)
Résumé : Sandra, une jeune Italienne originaire de Rome, s’est enlisée à Londres dans une relation sans avenir, mais tumultueuse, entremêlée de désir et de jeux sexuels avec un golden boy déchu, Miles Rennberg. Un jour, Sandra se débarrasse de lui autant pour briser le cercle infernal d’une passion qui la consumait que pour l’argent. Elle se rend à Hong Kong.
Critique : Que ceux qui le craignaient se rassurent : après un Clean assez propret, Assayas revient vers des territoires plus troubles avec cette variation bâclée autour d’Asia Argento. Ça commence comme dans Demonlover : critique assez forcée de la mondialisation et personnages pris au piège, sans le savoir, de leurs propres pulsions. Avec Michael Madsen, habitué aux rôles de gros bras de série B (voire Z), en chef d’entreprise cynique et manipulateur. On en rigolerait presque, à moins que cela ne soit une preuve supplémentaire de la perversité du cinéaste, qui prend un malin plaisir à réinterpréter les genres les plus codifiés (Assayas, le Tarantino du French film d’auteur ?). Ainsi le thriller érotique, qui irrigue la première partie du film, prend sous sa caméra des allures de foire SM où les rapports de domination éclatent dans toute leur vulgarité (l’art délicat de la suggestion n’a ici pas lieu d’être). Assez brouillon tout de même, lorsqu’il s’agit de s’embarquer dans de longues scènes de discussions en intérieur, faussement provocatrices.
Il faudra attendre plus de la moitié du métrage pour que celui-ci démarre, sous l’impulsion d’un électrochoc nommé Asia Argento. C’est que l’icône trash fascine Assayas, le rend fou jusqu’à lui faire oublier toute notion de construction narrative. Dès lors, l’enjeu de Boarding Gate n’est même plus de raconter une histoire (et tant mieux, quand on voit le ratage de la première partie). Il s’agit de capturer sur pellicule le magnétisme qui se dégage de ce corps animal. En calant sa caméra sur ses moindres gestes, Assayas nous donne l’impression de redécouvrir l’Italienne, qui n’aura jamais été aussi étrangement désirable. Pour un peu, on se croirait chez Claire Denis.
Muse plutôt qu’actrice (on peut être irrité par son jeu approximatif), Argento nous ballade de corridors d’hôtels en marchés chinois dans des plans d’une sensualité rare. La démarche n’a malheureusement rien de novatrice : souvenons-nous de Benoit Jacquot qui, il y a tout juste un an (dans L’intouchable), suivait l’échappée indienne d’Isild Le Besco avec le même abandon et réalisait l’un de ses plus beaux films. On regrettera ainsi qu’Assayas n’ait pas su donner plus de consistance à son récit, préférant nous balader dans les méandres d’un scénario bien trop opaque pour convaincre. Aux spectateurs les plus réceptifs de se laisser porter. Outrageusement inabouti, Boarding Gate est un fascinant ratage, témoignage enivrant du vertige des sens.
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.
Norman06 27 avril 2009
Boarding Gate - Olivier Assayas - critique
Exercice de style un brin maniéré et prétentieux, ce polar snob pour bobos branchés est au cinéma policer ce que Assayas est à Scorsese. Asia Argento est pourtant charismatique et on y trouve de jolis mouvements de caméra.