Le 15 avril 2018
Vingt mois après sa sortie en Italie, Bienvenue en Sicile tente sa chance en France. Au-delà de ses indélicatesses, Pierfrancesco Diliberto est un auteur plus malin qu’il n’y paraît.
- Réalisateur : Pif
- Acteurs : Andrea Di Stefano, Mario Pupella, Miriam Leono, Pif, Stella Egitto
- Genre : Comédie, Film de guerre, Mélodrame
- Nationalité : Italien
- Distributeur : Saje Distribution
- Durée : 1h39mn
- Date télé : 14 août 2022 21:05
- Chaîne : C8
- Titre original : In guerra per amore
- Date de sortie : 23 mai 2018
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– Année de production : 2016
Résumé : New York, 1943. Arturo rêve d’épouser la belle Flora, déjà promise à un chef de la mafia new-yorkaise. La seule façon d’obtenir sa main est de la demander directement à son père, resté en Sicile. Alors que les Alliés s’apprête à y débarquer, Arturo s’engage dans l’armée américaine. Son destin va se retrouver lié à celui du lieutenant Chiamparino entré en guerre par amour pour son pays d’origine.
Critique : À moins de s’intéresser au sujet, il n’est pas évident de savoir que, en 1943, l’armée anglo-saxonne a percé un premier front européen en Sicile avant même d’envisager un débarquement en Normandie qui, lui, à l’inverse, a inspiré de nombreux films de guerre. Plus difficile encore est de savoir que cette intervention s’est faite avec le soutien local de la mafia. On peut se douter que cette réalité historique soit un sujet délicat à aborder par des cinéastes américains, il est donc enthousiasmant de voir un réalisateur italien la prendre à bras-le-corps. Mais le sujet reste sensible, et le voir transformer en postulat d’une comédie avait de quoi faire peur, et ce en particulier en France où les humoristes venus de la télévision se transforment rarement en des cinéastes que l’on puisse prendre au sérieux.
Et bien justement, Pierfrancesco Diliberto, dit « Pif » (non, je ne ferai aucun jeu de mot !) -qui signe là son second long-métrage (ne cherchez pas le premier, il n’est jamais sorti de ce côté des Alpes)- reste, durant toute la longueur, sur le fil tendu entre la fresque ambitieuse et le sketch grossièrement étiré.
- © Saje Distribution
L’une des idées les plus bénéfiques du réalisateur est d’avoir imposé une splendide photographie très datée, permettant à son film de jouir d’une identité esthétique renvoyant à l’âge d’or de la comédie italienne. Ceci est également le fait de sa direction artistique désuète, faite notamment de décors en carton-pâte, plastiquement bien moins reluisante. Cet entre-deux formel se retrouve également dans l’écriture de Pif, qui ouvre et ferme son scénario à la façon d’un film dossier politiquement cinglant, aussi bien à l’égard du gouvernement américain de l’ère Roosevelt que de l’influence nuisible de la mafia en Sicile, mais se sent obligé de développer son intrigue principale à grands coups de grosses ficelles émotionnelles et/ou humoristiques.
Parmi celles-ci, le recours à des personnages secondaires handicapés (un aveugle et un boiteux) en guise de faire-valoir burlesques est d’un tel manque de subtilité que le bien-fondé de cette reconstitution historique en souffre inévitablement. Heureusement, le réalisateur parvient à ne jamais déraper dans la grosse gaudriole de mauvais goût et à garder dans l’œil de son viseur la thématique délicate du lien entre l’armée américaine et la cosa nostra, allant jusqu’à appuyer son propos en le documentant d’un rapport rédigé à l’époque par un militaire dont le point de vue semble indiscutable. Celui-ci, à qui Andrea Di Stefano prête ses traits, apparaît de fait comme le véritable héros de cette part d’Histoire, et lui assure une intensité dramatique qui parviendrait presque à bien vouloir fermer les yeux sur les lourdeurs de certains effets comiques.
- © Saje Distribution
La plus grosse des maladresses de Bienvenue en Sicile est en fin de compte son titre français, pure formule commerciale de comédie populaire. Son titre original, En guerre par amour, était quant lui à évocateur d’une problématique que Pif a finalement explorée avec davantage de finesse que celui de la complicité entre yankees et mafieux. La question de savoir ce qui mène des hommes à se lancer dans l’armée en temps de guerre se retrouve ainsi être le véritable vecteur émotionnel de son film. Entre le romantisme ingénu qui anime le personnage d’Arturo (qu’incarne Pif lui-même) et le patriotisme de Philip, mais aussi, côté italien, le culte de la personne envers Mussolini, cette farce bancale interroge sur les vraies raisons de l’engagement militaire et pose sur ces motivations un regard chargé en fatalisme. Ce n’est pas parce qu’Ettore Scola (à qui est dédicacé le film) parvenait à traiter des sujets délicats avec un humour toujours juste, que c’est forcément la meilleure formule à suivre. Pif devrait en prendre de la graine.
- © Saje Distribution
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