Le courrier d’abord
Le 6 novembre 2018
Un grand film d’aviation au parti pris intimiste et profondément humain.
- Réalisateur : Henri Decoin
- Acteurs : Pierre Fresnay, Georges Marchal, André Bervil, Félix Oudart, Janine Crispin
- Genre : Aventures, Noir et blanc
- Nationalité : Français
- Distributeur : Les Films Corona
- Editeur vidéo : Pathé Vidéo
- Durée : 1h53mn
- Box-office : 2 782 557 entrées France / 582 685 (Paris-périphérie)
- Date de sortie : 30 novembre 1949
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– Sortie combo DVD + Blu-ray : le 7 novembre 2018
Résumé : Les années 20, à Toulouse. La pension de famille des demoiselles Fusain, « Au grand balcon », est le quartier général des jeunes pilotes travaillant au développement des liaisons aéropostales, sous les ordres de Carbot. Celui-ci ne vit que pour « la ligne » et impose une stricte discipline à ses hommes. Il se soucie peu - du moins en apparence - des existences sacrifiées à son idéal. Jean Fabien, héros de la guerre de 1914, tient tête à Carbot et se heurte constamment à lui...
- © 1949 - PATHÉ FILMS. Iconographie : Collection Fondation Jérôme Seydoux Pathé. Photos : © Henri Thibault. Conception graphique : © 2018 Pathé Films. Tous droits réservés
Notre avis : La voix off initiale, emphatique et précieuse, nous en avertit : ce n’est pas un documentaire, mais un éloge vibrant adressé aux pionniers de l’Aéropostale. Un exercice d’admiration, en quelque sorte, aussi précis que retenu. Henri (à l’époque Henry) Decoin ne vise pas le lyrisme, pas plus qu’une virtuosité acrobatique : on ne voit que peu de vols, et encore moins de vols spectaculaires ; seul le premier essai vertigineux de Fabien tient de l’épate, mais il est aussitôt rejeté par le chef, Carbot, incarné avec sobriété par un Pierre Fresnay impérial. Pas d’esbroufe, c’est ce que souhaite le personnage et ce que réalise le cinéaste. L’efficacité primera.
Dès le curieux début, situé à l’intérieur de la pension qui donne son titre au film, Decoin choisit le registre de l’intime et s’y tiendra jusqu’au bout, puisque la fin ouverte, si elle annonce de nouveaux départs, nous laisse au sol, comme la quasi totalité du métrage. C’est que Decoin vise la litote plutôt que l’ampleur, le récit indirect ou l’attente des personnages plutôt que l’exploit. Ce parti pris s’avère payant la plupart du temps : on souffre avec les tantes propriétaires de la pension, on compatit aux disparitions. Au fond le film est fondé sur un vide, une absence, comme si le vol était l’irreprésentable et que seul le discours pouvait en rendre compte. Ainsi le jeune Didier sort-il de son premier trajet transformé par une expérience qui tient de l’ineffable.
Malgré la mise en vedette de Fresnay et de Georges Marchal (alors jeune premier prometteur et qui tourna pas moins de quatre films en 1949), Au grand balcon a quelque chose d’une œuvre chorale qui s’attache moins à des hommes qu’à un rêve commun, exigeant et peut-être inhumain. Le sentiment y est donc logiquement condamné : la secrétaire est amoureuse de Fabien, Didier agonise, mais le mot d’ordre seriné par Carbot reste identique : « le courrier d’abord ». Certes, on le comprend très tôt, le caractère bourru du chef dissimule une tendresse pudiquement exprimée dans les dernières images, et Decoin garde des passages légèrement lacrymaux ; pour autant l’essentiel tient en une mission dangereuse qui se doit de tout lui sacrifier, d’où des affrontements récurrents entre Carbot et ses hommes. Fabien attend une reconnaissance qui ne viendra pas, comme la secrétaire attend des paroles bienveillantes. Mais Carbot le lui affirme, il ne peut être chef qu’en étant distant. Disons-le à ce propos, si les dialogues de Kessel sont souvent très efficaces, ils côtoient la grandiloquence dans les envolées de Fresnay et constituent la partie qui a le plus mal vieilli.
Car pour le reste, la sobriété du jeu et de la mise en scène a gardé son lustre. Pour un cinéaste qui considérait que la meilleure réalisation est celle qui ne se voit pas, Decoin est parvenu à éviter les effets (enfin presque, il y a un plan étrange dans lequel, pour figurer sa solitude, le visage de Fresnay est plongé dans l’ombre artificiellement) et à mettre en valeur avec précision le quotidien de ces héros humains. On pinaillera sur des aspects mélodramatiques (l’agonie de Didier) ou comiques (l’assureur au discours répétitif), il n’empêche qu’Au grand balcon demeure un hommage réussi et passionnant, soutenu par l’ample partition de Joseph Kosma.
- Copyright Les Films Corona
Le test du blu-ray :
Les suppléments :
Didier Decoin et Olivier Margot disent leur enthousiasme pour le film et les pionniers de l’Aéropostale : entre souvenirs émus et informations précieuses, on tient là un supplément passionnant (45mn). Les trois autres sont de courts extraits d’archives et ont une valeur historique indéniable, malgré la qualité d’image et de son médiocre des deux plus anciens (Inauguration des première lignes postales aériennes françaises, Disparition de Mermoz et de ses compagnons, Les pionniers de la poste aérienne).
L’image :
La plupart du temps, l’image est superbe, stable, élégamment contrastée. Aucun parasite, mais de rares plans flous (Fabien dans les Pyrénées), sans doute inévitables malgré la belle restauration. Pour le reste, la copie est irréprochable.
Le son :
Là encore, la restauration a fait son œuvre, mais elle est limitée par les conditions d’enregistrement : quelques saturations dans la musique, quelques stridences ou chuintements dans les dialogues. Rien de rédhibitoire cependant, la plupart des répliques sont audibles, voire claires.
- Copyright Les Films Corona
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