Antoine Elie : la révolte des mots pour un paroxysme de beauté

L’EP : De sa Normandie natale (il est de Rouen) et de ses errances parisiennes, Antoine Elie garde en tête des rencontres, flatteuses quant à sa voix tracassée, virile, puissante, un timbre presque ténébreux qui sied si bien au spleen de ses textes qui ont convaincu Sony, puis Polydor de le signer.
Toujours empreint de violence, de douleurs, d’une voracité poétique, l’écrit est dense et pourraient coller aux désignations dépressives d’un hip-hop qui se lamente de ses failles. Ici, loin des règlements comptes sociaux tellement éculés, l’artiste s’applique à l’introspection sombre et imbibée, même quand il parle à l’autre avec lequel il aime décrire des relations tendues.

Les lyrics suintent la psychologie abîmée, et de ses 28 ans, notamment dans la chanson miroir Toi qui m’écoutes, qui démarre comme un requiem urbain, il sublime l’image tranchée de l’artiste maudit qui lui donne une vraie singularité d’âme.
Le flow de L’amas d’chair, où il se décrit comme un ’rien’, les développements musicaux écrasants d’Aie démontrent l’artiste total qu’il est. L’impressionnante force des paroles ne vient jamais diminuer la portée mélodique des cinq morceaux qu’il aligne avec un talent que l’on devine inné.

Aux textes infaillibles, les morceaux déclinés arborent aussi de somptueuses textures musicales qui désignent des influences variées (hip-hop, nouvelle scène française, goût du paroxysme britannique...) où la beauté est parfois cristalline dans la complexité (Soirées parisiennes).
Imbibé d’excès de sentiments, défoncé à l’alcool, l’EP éponyme éponge les cimes et ne redescend jamais, évitant déchéance et suffisance pour se concentrer sur l’essentiel : la transcendance.
L’une des découvertes de l’année 2018.