Le blablabla de la guerre
Le 2 mai 2002
Le roman de l’enfant-soldat. Intense, magique, inventif et féroce.


- Auteur : Ahmadou Kourouma
- Editeur : Editions du Seuil, Points
- Genre : Roman & fiction
- Prix : RENAUDOT, GONCOURT DES LYCÉENS

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Birahima, "l’enfant de la rue sans peur ni reproche", a laissé tomber sa kalach pour prendre la plume. Et se retrouve du coup narrateur d’Allah n’est pas obligé, de l’Ivoirien Ahmadou Kourouma, couronné à 72 ans pour ce livre par le prix Renaudot et le Goncourt des lycéens 2000.
Parti à la recherche de sa tante en compagnie de Yacouba le multiplicateur de billets, Birahima a parcouru le Liberia et la Sierra Leone, où il s’est engagé dans plusieurs bandes armées. Tout simplement parce que "quand on n’a plus personne sur terre, ni père ni mère ni frère ni soeur, et qu’on est petit, un petit mignon dans un pays foutu et barbare où tout le monde s’égorge", on n’a pas le choix.
Pour raconter sa vie, son "blablabla", Birahima dispose de quatre dictionnaires, afin d’expliquer les mots difficiles. Comme "féérique", "gros mot de Larousse, signifie qui tient du merveilleux."
Des guerres tribales du Liberia, du "bordel au carré" de Sierra Leone, Kourouma ne cache rien. Les children-soldiers tombent, les fillettes se font violer, les habitants massacrer, les prisonniers torturer. Mais avec les mots de Birahima, le récit évite une dramatisation sur laquelle il aurait été "facile" de jouer. Mieux : Allah n’est pas obligé fait parfois sourire, et même rire. Mais jamais aux dépens du malheur lui-même, décrit d’une façon si précise que l’écrivain nous refile - sans que l’on bronche - un cours sur l’histoire de ces deux pays.
Au fil de ces pages, un tout grand roman, intense, magique, inventif, féroce, qui donne enfin la parole à l’enfant-soldat, "le personnage le plus célèbre de cette fin du vingtième siècle".
Ahmadou Kourouma, Allah n’est pas obligé, Points, 2002, 240 pages, 6,95 €