Le 3 juin 2019
Une oeuvre fascinante et envoûtante où se mêle aux méandres amoureux, la contemplation quasi spirituelle d’un pays, Haïti, bouleversé par la barbarie politique, les accidents géologiques et la force délétère des traditions.
- Réalisateur : Bertrand Bonello
- Acteurs : Louise Labeque, Wislanda Louimat, Adilé David , Ninon François, Mathilde Riu
- Genre : Drame
- Nationalité : Français, Haïtien
- Distributeur : Ad Vitam
- Durée : 1h43
- Date de sortie : 12 juin 2019
Résumé : Haïti, 1962. Un homme est ramené d’entre les morts pour être envoyé de force dans l’enfer des plantations de canne à sucre. 55 ans plus tard, au prestigieux pensionnat de la Légion d’honneur à Paris, une adolescente haïtienne confie à ses nouvelles amies le secret qui hante sa famille. Elle est loin de se douter que ces mystères vont persuader l’une d’entre elles, en proie à un chagrin d’amour, à commettre l’irréparable.
Notre avis Bertrand Bonello est un cinéaste dont les œuvres exigeantes et précises laissent à chaque fois le sentiment d’un accomplissement tant esthétique qu’intellectuel. Son dernier long-métrage Nocturama choisissait déjà, à l’instar de L’Apollonide ou Saint Laurent des univers feutrés et intimistes, pour raconter les destins fragiles d’une certaine jeunesse ou d’artistes hantés par leurs démons intérieurs. Une nouvelle fois, le réalisateur s’attache à filmer des jeunes gens, en l’occurrence des adolescentes brillantes et troublantes, qu’il plante dans une sorte de lycée parisien, plus proche d’un palais que d’une institution scolaire, grandiose. Bonello soigne toujours ses décors. C’est un cinéaste du détail, il peuple ses lieux narratifs de sculptures, de mannequins, d’accessoires incongrus, faisant pencher son récit autant dans le fantastique que dans la revendication esthétique. Certes, nous ne sommes plus dans un grand magasin parisien ou un atelier de couture ou un salon dédié à la prostitution, mais, grâce à une caméra à la fois discrète et très présente, il met en scène ses personnages adolescents dans un espace magique et fascinant.
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Le film alterne les époques et les lieux. En effet, la première séquence s’ouvre en 1962, au cœur d’Haïti, où l’on assiste à une séance de magie noire qui va plonger un homme relativement jeune dans la mort. Le scénario conserve jusqu’à la fin le mystère de cet empoisonnement spirituel, pour s’intéresser ensuite au traitement inhumain qui est fait à des hommes et des femmes, dénommés des zombies, que l’on force au travail et que l’on maltraite. Naturellement, notre regard occidental et bien-pensant laisse à penser que cette sorte d’esclavagisme moderne illustre une façon tragique la manière dont Haïti considère ses fous, enclavés dans la nuit. Pour autant, la magie noire, la zombification demeurent des pratiques courantes dans ce pays défiguré par des catastrophes de toutes sortes, et jusqu’à la fin du long métrage, le réalisateur laisse peser le doute quant à la vraisemblance de l’état de zombie.
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Que le spectateur ne se méprenne pas. Zombi Child n’est surtout pas un film d’horreur où des êtres rugissants viendraient attaquer les survivants. C’est d’abord le récit intimiste et délicat d’une jeunesse parisienne privilégiée, confrontée au dialogue des cultures grâce à l’arrivée d’une jeune fille dans leur groupe, Mélissa, d’origine haïtienne, orpheline, qu’elles intègrent pourtant dans ce qu’elles appellent leur sororité intellectuelle et mystique. Les actrices principales sont toutes très justes, particulièrement Louise Labeque et Wislanda Louimat, dont on imagine qu’elles feront une grande carrière dans le cinéma. Bonello a un talent inouï pour dénicher de nouveaux talents. Il offre à ses comédiennes un scénario magnifiquement écrit, d’une grande beauté, que la photographie et les travellings nombreux de la caméra valorise, subjuguant le spectateur.
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Nous voilà donc devant une oeuvre totale, déroutante, qui poursuit la carrière de cet immense cinéaste qu’est Bertrand Bonello.
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ceciloule 16 juin 2019
Zombi child - la critique du film
Dommage que le réalisateur ne parvienne pas à nous faire adhérer à cette culture qui semble l’avoir happé... On ne comprend pas grand chose, il nous laisse en dehors de l’histoire pendant les 3/4 du film, nous immerge dans les rites vaudous sans aucune explication... Et cette lenteur... (plus d’infos ici : https://pamolico.wordpress.com/2019/06/16/dautres-mondes-zombi-child-bertrand-bonello/)
Aigle noir 7 août 2019
Zombi child - la critique du film
Film fascinant, mais ...
Gros problème : si les séquences haïtiennes sont muettes, par contre les séquences avec les filles dans leur collège sont parlantes, mais malheureusement, avec cette manière qu’ont de plus en plus de jeunes de parler à l’intérieur de leur bouche, sans trop articuler les consonnes et en zappant des syllabes entières, il n’est pas possible, même avec le meilleur son d’une salle de cinéma, de comprendre ce qu’elles se disent. Et donc, ce que veut nous montrer le réalisateur. Des séquences (courtes), de cours, de papotages en récréation, en salle de sport, de toilette, de douche, de dortoir : quel rapport avec le sujet ? Et les séquences qui doivent être cruciales, celles des séances nocturnes dans l’atelier d’art : qu’est-ce qu’elles se disent ? seules des bribes nous parviennent. Dommage, ce manque de respect pour le spectateur, car le film - et la qualité des actrices - mérite mieux.