Le 29 décembre 2018
Peu de combats dans ce film de guerre, mais la description pointue d’un homme en prise à des dilemmes moraux.
- Réalisateur : Henry King
- Acteurs : Gregory Peck , Hugh Marlowe, Dean Jagger, Gary Merrill, Millard Mitchell
- Genre : Drame, Action, Film de guerre, Noir et blanc
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Twentieth Century Fox France
- Durée : 2h12mn
- Titre original : Twelve O'Clock High
- Date de sortie : 13 octobre 1950
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– Année de production : 1949
Résumé : Le général Savage remplace un officier supérieur démoralisé par les pertes de ces troupes. Mais lui aussi sera très atteint par les soldats tombés au front.
- © Twentieth Century Fox. Tous droits réservés.
Notre avis : Ça commence de manière anodine, par un homme, Harvey Stovall, qui, ayant acheté un chapeau, se mire dans une vitrine et aperçoit un objet, une sorte de pinte à figure de justicier masqué. Il l’achète, bien que le vendeur lui précise qu’elle n’a aucune valeur. Dans la séquence suivante, le même Stovall se rend sur une base désaffectée, et les souvenirs affluent, d’abord auditifs (des bruits d’avion), puis, le temps d’un panoramique fixant les herbes secouées, visuels. Ces quelques minutes, très rapides et qui ne réapparaîtront dans notre mémoire que lorsque l’objet sera vu ou à la toute fin, introduisent un témoin, mais donnent également un axe qui parcourra le film, la question de la valeur à accorder (aux choses, mais aussi aux gens). Elles semblent encore, alors que le métrage date de 1949, s’interroger sur l’oubli dans lequel est déjà tombé la guerre.
Mais Un homme de fer s’attache surtout au portrait d’un général, Franck Savage, lorsqu’il prend en main un groupe de bombardement au moral vacillant. Il reproche au colonel Davenport d’être trop sensible et proche de ses hommes, et met au point une stratégie opposée, reposant sur la plus grande rigueur. Voir Gregory Peck interpréter ce gradé constitue l’un des points forts du film : son jeu sobre s’accorde parfaitement à la tonalité générale, et il lui suffit d’un plissement d’yeux ou d’un abaissement de tête pour suggérer le doute ou l’extrême solitude du chef. Il faut dire que Henry King, en vieux routard, lui concocte un écrin digne de lui : rigueur des cadres, science de la scénographie ou des éclairages, tout cela sent son impeccable professionnalisme.
Pour autant, le film n’a rien d’un film de guerre banal : les amateurs d’action seront déçus, la caméra restant la plupart du temps au sol ; la seule bataille aérienne, constituée en partie d’archives, n’arrive qu’au dernier quart du métrage et, même si elle est passionnante, King ne l’étire pas ; elle reste dans la tonalité austère. Car ce qui intéresse le cinéaste, c’est l’humain ; dès les premières minutes le thème apparaît dans les dialogues, « l’effort maximum », cette limite de ce que peut supporter un homme. La tolérance à l’effort est-elle extensible ? Questions subsidiaires : comment mener des soldats ? Faut-il compatir ou s’endurcir ? Peut-on devenir insensible ? Loin d’être théoriques, ces interrogations innervent un scénario audacieux, centré sur des dialogues sans être bavard, fondé sur le hors-champ et les ellipses sans être ennuyeux, au contraire. On peut imputer cette réussite aux acteurs, tout en retenue, mais aussi au métier du réalisateur : avec une efficacité redoutable, il sait imposer un rythme soutenu malgré le peu d’action, faisant de chaque séquence la mise en avant de liens psychologiques forts (affrontements, conciliations). Les trouvailles sont rarement très visibles, King comptant plus sur la discrétion, mais de temps en temps une idée surgit, comme la partie de baseball amollie par l’attente des avions. D’une manière générale, la mise en scène est tournée vers les comédiens, les enfermant dans un cadre à la mesure de ce monde clos et quasi exclusivement masculin : les rares femmes sont serveuses ou infirmières, quand elles ne sont pas simples dessins sur le cockpit. L’essentiel est l’observation minutieuse de ces corps dignes et fatigués, en quête d’un sens à donner à leur combat.
Le miracle finalement, c’est qu’Un homme de fer n’a rien d’ennuyeux. On suit avec intérêt cette intrigue qui peut sembler minimale mais se révèle porteuse de tensions insoupçonnées. King ne cède ni aux facilités ni au pathos, et livre une œuvre droite et ferme, classique au meilleur sens du terme.
© Twentieth Century Fox. Tous droits réservés.
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