Syndrome du Golfe
Le 20 février 2009
Un remake noyé sous les effets et les méandres de son scénario.
- Réalisateur : Jonathan Demme
- Acteurs : Meryl Streep, Denzel Washington, Liev Schreiber
- Genre : Thriller
- Nationalité : Américain
- Editeur vidéo : Paramount Home Entertainment
- Date télé : 1er novembre 2016 20:55
- Chaîne : Cherie FM
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– Durée : 2h10mn
– Titre original : The Manchurian candidate
Une métaphore du lobbying d’état poussée à l’extrême. Jonathan Demme, en voulant mettre à jour le film tourné en 1962 par John Frankenheimer, rend une copie noyée sous les effets et les méandres de son scénario.
L’argument : Raymond Shaw (Liev Schreiber) est sur le point d’être élu vice-président des Etats-Unis, plébiscité pour ses exploits lors de la guerre du Golfe ; des exploits dont Bennett Marco (Denzel Washington), son chef douze ans plus tôt, est incapable de se souvenir, plongé dans une violente dépression, un soi-disant syndrome du Golfe. Pour faire toute la lumière sur les zones noires de son passé et comprendre comment Shaw a pu être élevé au rang de héros, Marco mène l’enquête, bientôt aidé par le candidat lui-même, qui semble manipulé à son insu par une force extérieure. Sa seule piste : Marco est persuadé qu’ils ont subi un lavage de cerveau lors de la guerre...
Notre avis : Un crime dans la tête est l’adaptation aux peurs et aux syndromes contemporains du Manchurian candidate réalisé en 1962 par John Frankenheimer, avec Frank Sinatra, et situé au lendemain de la guerre de Corée. Modernité oblige, ce remake est assaisonné aux hautes technologies, filmé nerveusement et de manière parfois lourdement suggestive. Derrière la caméra, Jonathan Demme (Le silence des agneaux, Philadelphia), plutôt porté ces dernières années sur le documentaire (Jean Dominique, the agronomist) et dont le dernier film de fiction, La vérité sur Charlie était déjà un remake de Charade de Stanley Donen, et avant tout un exercice de style. Avec Un crime dans la tête, il réalise une adaptation très libre de Frankenheimer.
La multiplication des pistes suivies par Marco, de ses amis, traîtres, indics et autres faux-indics qui parsèment sa route, mais surtout la multiplication des personnages (l’armée, les candidats, le FBI, les amis, etc..., toutefois servis par un casting trois étoiles, de Washington, parfait, à Liv Schreiber, lisse et perdu à souhait) finissent par égarer le spectateur. La santé morale fragile de Marco, qu’on suspecte d’être un dangereux psychopathe, laisse, en outre, planer le doute sur la réalité du complot qu’il tente de déjouer, et affaiblit le propos de Demme.
Car propos il y a dans Un crime dans la tête, que son titre français dessert, comme pour tant de films avant lui, en le faisant passer pour une simple affaire de meurtre. The Manchurian candidate, laissé en sous-titre, dit bien mieux le problème soulevé ici. Derrière le lavage de cerveau dont Marco dit avoir été victime, et Shaw avec lui, se cache la Manchurian Global, énorme boîte portée sur les hautes technologies, sorte de cousin des Halliburton et autre groupe Carlyle, qui possèdent une influence énorme sur le gouvernement américain. C’est l’emprise de ces groupes, poussée à l’extrême et à travers une machination machiavélique et cruelle (Shaw s’avérant être une poupée lobotomisée manipulée par la Manchurian Global), qui est dénoncée. Seulement, les alliés de cette menace pour la démocratie, prêts à tout pour gouverner, sont peu nombreux, souvent étrangers, et de la pire espèce quand ils sont américains.
Reste la quête démocratique et humaine de Marco-Washington, à première vue attachante car juste et portée par un homme pitoyable, au sens premier du terme. Malheureusement, celle-ci est sans cesse parasitée par les images qui hantent la tête de Marco, pesantes, et la volonté de Demme d’en dire un maximum, des errances du candidat Shaw et de la bataille de Marco. Le propos du film en sort fragmenté, et couvert par ses excroissances, l’amour douteux de la mère de Shaw (Meryl Streep, très First Lady) pour son fils, la relation de Marco avec Rosie, une fille un peu trop gentille, les débats politiques, etc... Un crime dans la tête finit par étouffer le spectateur, atteint par les symptômes d’un cinéma moderne qui en fait des tonnes, visuellement et scénaristiquement. Ce qui cache sans doute une volonté de Jonathan Demme de rendre moderne et excitante une histoire vieille de plus de quarante ans.
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