Le 20 avril 2019
Une œuvre sensible, magnifiée par l’interprétation de la toute jeune Lola Créton.
- Réalisateur : Mia Hansen-Løve
- Acteurs : Sebastian Urzendowsky, Valérie Bonneton, Lola Creton, Serge Renko, Magne-Håvard Brekke
- Genre : Drame
- Nationalité : Français
- Durée : 1h50mn
- Date de sortie : 6 juillet 2011
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Notre avis : On ne saurait se fier au titre de cette œuvre magistrale, qui déjoue tous les pièges du genre et laisse à la bouche une durable sensation d’amertume. Le troisième long métrage de Mia Hansen-Løve n’a rien d’un film sur une bluette adolescente, d’abord parce qu’il ne circonscrit pas l’histoire à cet âge intermédiaire, ensuite parce que son personnage principal -Camille-magnifiquement interprété par Laura Créton- n’a rien d’une indécise. A la manière de ces grandes acharnées des tragédies raciniennes, l’héroïne se heurte à l’irrépressible force d’un amour d’autant plus cruel qu’il est le premier et résonne pourtant avec la beauté crépusculaire d’un chant d’adieu. A la vie, à l’impossibilité d’imaginer les sentiments sous d’autres traits que ceux qu’on a aimés. Le sujet imposait une très grande sobriété dans la mise en scène. Pari gagné. Avec une économie de moyens remarquable, la narratrice montre la douleur à vif. Les ellipses qui parsèment l’histoire disent en creux tout ce que le marmoréen visage de Camille dissimule la plupart du temps. Les larmes elles-mêmes, lorsqu’elles adviennent, ne libèrent pas la parole ou la révolte. A ses parents qui lui enjoignent d’oublier son premier amour, la jeune fille oppose un mutisme farouche.
Point de bavardage donc, mais au fil de l’eau qui coule, faussement tranquille, un pied posé sur une roche, le bruissement des feuilles, ou un chapeau de paille échappant à la vigilance, somptueuse allégorie de ce que la jeune femme cherche à saisir : l’or du passé ou la certitude d’un bonheur conjugal, brièvement entrevu sur l’autre rive. On peut gloser sur la carrière que Camille embrasse (l’architecture), lorsque son existence semble éternellement en chantier. La rencontre avec Sullivan ne résout rien. Par une cruelle ironie, les projets du personnage achoppent au moment où ils sont sur le point de se concrétiser (Camille perd l’enfant qu’elle porte et parallèlement Sullivan fait à nouveau irruption dans sa vie). Le film, construit sur un mode déceptif, condamne la jeune femme au silence et à la solitude, à l’unisson de ces paysages agrestes où la lumière brûle plus qu’elle ne chauffe.
Dans l’onde où le soleil miroite, Camille deviendra peut-être Ophélie, sans jamais attraper le chapeau qu’elle convoite...
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