Ulysse et Mona - la critique du film

Notre avis : Avec Voyage au Groenland, Sébastien Betbeder nous avait offert un périple émerveillé et loufoque au cours duquel la folie du monde moderne se mesurait à la sagesse des Inuits. Si ce sixième long-métrage n’a pas l’exotisme du précédent, il nous entraîne à nouveau dans une comédie au charme décalé sur fond de relations amicales et de différences sociales.

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Désireux de magnifier une rencontre improbable, le réalisateur bâtit son récit autour de deux personnages principaux aux idéaux de vie apparemment opposés. Il les entoure d’une pléthore de personnages dits secondaires -mais pourtant pas vraiment anodins- dont la finalité est d’ éclairer les personnalités de chacun des protagonistes et tout particulièrement celle de notre misanthrope au cœur tendre. S’il décide de faire d’Ulysse un artiste contemporain, ce n’est nullement dans l’optique de se lancer dans la description du milieu de l’art contemporain qui ne sert finalement que de prétexte à caractériser le personnage.

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Ulysse (Eric Cantona) est en décalage avec son époque et a fui le monde dans un château isolé, abandonnant femme et enfant. Malade et désabusé, il n’a plus la force d’affronter le regard des autres. Il ne croit plus en la beauté, ni de l’art, ni des hommes et préfère donc se retirer dans une vie méditative (c’est pour lui la façon la plus sincère d’être fidèle à son passé) et entend bien de ne pas jamais être dérangé. Mona (Mana Issal), jeune étudiante aux Beaux-arts, enjouée et déterminée, outrepasse cette interdiction. Admiratrice de l’œuvre d’Ulysse, elle sait parfaitement qu’il représente pour elle une opportunité inespérée d’affirmer son propre chemin artistique. Alors, elle n’hésite pas, même si elle se fait chasser à chaque fois, à tenter de forcer sa porte. Il faudra qu’un jour elle le trouve inconscient sur son court de tennis pour pouvoir enfin l’apprivoiser et devenir son assistante.

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Basé sur une narration dépouillée de toute complexité malgré des enjeux qui ne manquent pas d’envergure, Ulysse et Mona déroule une multitude de scènes désenchantées ou cocasses mais témoignant toutes de la lutte que se livre à lui-même cet homme caparaçonné qui ne demande qu’à être pris par la main une dernière fois dans l’espoir de se réconcilier avec la vie. Tournant le dos à toute idée de rudesse, la comédie démarrée sombrement s’éclaire peu à peu sous l’effet de l’humour distillé par les personnages et s’adoucit grâce à leur sens de la solidarité combative. Le choix du format image 4/3, plus étroit que le format habituellement utilisé, qui incite à se concentrer sur l’essentiel et en particulier à transcender les expressions des visages, fait pleinement partager au spectateur le bonheur de l’avancée de cet épanouissement inattendu. Si le récit s’étire parfois en longueur, la poésie qui s’en dégage, essentiellement due à l’impeccable interprétation d’Eric Cantona, balaie bien vite ce soupçon de langueur. Bien loin de l’image du footballeur abêti, il fait preuve d’une remarquable subtilité et habille d’une maladresse confondante ce bourru en mal d’amour.
Conforme à l’univers lunaire de Sébastien Betbeder dominé par l’humour et la mélancolie, Ulysse et Mona séduira tous les amateurs de comédie pittoresque et naïve.