Investissement à perte
Le 28 juin 2021
Un thriller privé de rebondissement et un drame sans potentiel lacrymal... Ridley Scott serait-il devenu plus radin que John Getty ? Peut-être est-ce tout simplement temps pour lui de prendre sa retraite !
- Réalisateur : Ridley Scott
- Acteurs : Romain Duris, Michelle Williams, Mark Wahlberg, Christopher Plummer, Timothy Hutton, Stacy Martin, Andrew Buchan, Charlie Plummer
- Genre : Drame, Thriller, Nanar
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Metropolitan FilmExport
- Durée : 2h12mn
- Date télé : 14 mars 2024 20:50
- Chaîne : Ciné+ Premier
- Titre original : All The Money In The World
- Date de sortie : 27 décembre 2017
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Résumé : Rome, 1973. Des hommes masqués kidnappent Paul, le petit-fils de J. Paul Getty, un magnat du pétrole connu pour son avarice, mais aussi l’homme le plus riche du monde. Pour le milliardaire, l’enlèvement de son petit-fils préféré n’est pas une raison suffisante pour qu’il se sépare d’une partie de sa fortune. Gail, la mère de Paul, femme forte et dévouée, va tout faire pour obtenir la libération de son fils. Elle s’allie à Fletcher Chace, le mystérieux chef de la sécurité du milliardaire et tous deux se lancent dans une course contre la montre face à des ravisseurs déterminés, instables et brutaux.
Critique : Voilà maintenant quarante ans que Ridley Scott tisse, de film de film et de genre en genre, une image de l’humanité loin des carcans manichéens hollywoodiens classiques. Même si la figure du anti-héros a fini par disparaître de sa filmographie au profit de personnages plus conventionnels, l’hypothèse selon laquelle les gentils viendraient mécaniquement s’opposer aux méchants reste régulièrement contrecarrée par chacun des scénarios qu’il met en images (en cela, le récent Seul sur Mars est l’un de ses rares écarts à cette cohérence thématique). Il n’est alors pas étonnant qu’il soit l’un des seuls à Hollywood à oser se frotter à l’histoire de l’enlèvement de John Paul Getty. En effet, l’idée de faire apparaître un multimilliardaire américain comme au moins aussi antipathique que des kidnappeurs communistes serait trop délicate pour la plupart des cinéastes à la botte des grands studios, alors qu’il s’agit d’un postulat dans la droite lignée du travail de Scott. Voilà de quoi faire naître de Tout L’argent du monde une attente chez les fans du réalisateur. Et oui, il faut l’avouer : la qualité de plus en plus déclinante de son œuvre limite désormais le public de Ridley Scott à ses seuls fans qui lui restent fidèles contre vents et marées.
- © Metropolitan Filmexport
A bien y regarder, le combat de cette mère, prise en étau entre des criminels inflexibles et un beau-père faisant preuve de moins encore de considération pour la vie de son petit-fils, avait de quoi conduire à un drame poignant autant qu’à un thriller haletant. Pourtant, que le scénario soit signé par David Scarpa, déjà responsable de l’infâme Le Jour où la Terre s’arrêta, laissait présager un long-métrage particulièrement fastidieux. C’est donc sans surprise que la première demi-heure du film nous plonge dans une longue et laborieuse série de flashback, selon une chronologie parfaitement aléatoire, en vue de nous donner une image, certes déstructurée mais se voulant exhaustive, des forces en présence dans ce récit. Exhaustive, elle ne le sera jamais puisque, au-delà de la famille Getty, les autres personnages et enjeux resteront flous, et ce jusqu’au bout.
Ce prologue nébuleux a au moins le mérite d’introduire les deux principaux points positifs du long-métrage : sa photographie soignée et le travail de reconstitution permise par la direction artistique. C’est également dans les premières minutes qu’apparaissent les acteurs principaux, à savoir Michelle Williams, dans le rôle de cette mère désemparée, Christopher Plummer, dans celui du milliardaire acariâtre et Mark Walberg en... en quoi, au juste ? Le rôle de ce cher Marky Mark est si mal développé et si peu exploité qu’il en vient à apparaître comme un personnage-accessoire tristement inutile. A leur côté, Romain Duris en kidnappeur calabrais est –tout chauvinisme mis à part– la vraie bonne surprise du casting même si, il faut bien le reconnaitre, il n’échappe pas tout du long à l’écueil du cabotinage.
- © Metropolitan Filmexport
Au-delà des failles dans l’écriture de leurs rôles, le jeu des principaux comédiens se révèle bien trop peu convaincant pour alimenter la tension qui devrait pourtant naître de leurs échanges. Heureusement pour eux, la musique se charge de lourdement surligner chacun des effets que ni le scénario ni la mise en scène n’arrivent à rendre tangibles. Leurs quelques scènes de dialogues conflictuels auraient pourtant énormément gagné à être suffisamment bien écrits et interprétés pour devenir les passages les plus marquants du film. Ils auraient au moins pu faire un minimum oublier son rythme engourdi, qui empêche de faire naître de l’intrigue le moindre suspense, et le fait que l’unique enjeu, qui est la libération du jeune John Paul, souffre du peu de sympathie qu’inspire celui-ci.
Ne reste alors comme solution à Ridley Scott qu’à essayer de dissimuler la vacuité de son nouveau film derrière un joli filtre grisonnant, qui rappelle irrémédiablement la patte de David Fincher (l’idée de ce qu’il aurait pu faire d’un tel postulat rend d’ailleurs le travail de Scott d’autant plus désolant), et réitérer quelques discours pompeux autour de la thématique du pouvoir de l’argent et du prix de la vie. Cette recette n’empêche évidemment pas à Tout l’argent du monde d’être un spectacle pénible, tant il manque d’intensité et de charge émotionnelle. Une carence telle que la courte course-poursuite qui survient dans les dernières minutes apparaît presque comme un cliffhanger ultra-dynamique, alors qu’à bien y regarder elle est, au même titre que les deux interminables heures qui l’ont précédé, horriblement terne. Définitivement, le seul personnage auquel le spectateur peut réussir à s’identifier est celui de Romain Duris qui, lui aussi, aimerait en finir au plus vite avec cette histoire.
- © Metropolitan Filmexport
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