Le 29 septembre 2021
Entre fantastique et drame intimiste, le premier film du dramaturge Florian Zeller déroule avec puissance les ravages de la démence sénile. Saisissant.
- Réalisateur : Florian Zeller
- Acteurs : Anthony Hopkins, Rufus Sewell, Imogen Poots, Olivia Williams, Olivia Colman
- Genre : Drame, Film pour ou sur la famille
- Nationalité : Britannique, Français
- Distributeur : UGC Distribution
- Editeur vidéo : Orange Studio
- Durée : 1h38mn
- Date télé : 14 mai 2023 21:10
- Chaîne : France 2
- Date de sortie : 26 mai 2021
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Résumé : Alors qu’il vieillit et devient de moins en moins autonome, un père refuse l’aide de sa fille. Voyant la situation se dégrader, il commence à douter de ses proches, de son propre esprit et même de ce qui est réel.
Critique : Le film s’ouvre sur une femme qui traverse les rues londoniennes, pendant qu’un orchestre et une voix baroque entonnent le célèbre "Cold Song" du Roi Arthur de Purcell. L’effet est saisissant, d’autant que la musique conduit jusqu’à Anthony, enfoncé dans son fauteuil, un casque planté sur les oreilles. Le vieillard habite cet appartement luxueux. On comprend très vite qu’en réalité sa fille l’héberge chez elle, depuis qu’il a fait fuir la dernière aide-soignante. Ce début flamboyant est peut-être le seul endroit où la caméra s’autorise à quitter l’appartement, à l’exception d’un commerce, d’un cabinet médical ou d’un hospice. Tout le drame se joue dans l’intimité bourgeoise de cette famille. Naturellement, on pense au fameux Amour de Haneke, mais Florian Zeller prend très vite le large sur le cinéaste autrichien. Car Zeller invite aux côtés de ses personnages toutes les palettes qui font le charme de l’écriture théâtrale. Tantôt fantastique, tantôt comique, tantôt tragique, le long-métrage passe par toutes les émotions, en se gardant de ne jamais privilégier tel ou tel esprit, et surtout en veillant scrupuleusement à ne jamais succomber à la facilité de la complaisance et du psychodrame.
- Photo : Sean Gleason © NEW ZEALAND TRUST CORPORATION AS TRUSTEE FOR ELAROF - CHANNEL FOUR TELEVISION CORPORATION - TRADEMARK FATHER LIMITED - F COMME FILM - CINÉ-@ - ORANGE STUDIO. 2020
The Father parle de démence sénile. Pour autant, le réalisateur refuse absolument de tomber dans le piège du docu-fiction. Cette mise en abyme de la folie constitue un spectacle en lui-même. Chaque scène restitue la confusion spatio-temporelle, les troubles de la mémoire que subit Anthony, comme si, finalement, le scénario avait choisi de prendre le point de vue du vieillard pour faciliter la compréhension du spectateur. On rit, au début surtout, puis on rit jaune, et on ne rit plus du tout, quand la folie prend toute la place du quotidien, au milieu de ces gens qui tentent de s’occuper au mieux de leur aîné vieillissant. La pathologie envahit les lieux et les consciences, dans un rétrécissement du temps absolument prodigieux, où le spectateur ne sait plus dans quel espace-temps le récit est engagé. Le pari très risqué de Florian Zeller est de saisir la temporalité du film lui-même, en la transformant en un amas d’événements qui restituent la mémoire trompeuse et la décadence cognitive du vieil homme.
- Photo : Sean Gleason © NEW ZEALAND TRUST CORPORATION AS TRUSTEE FOR ELAROF - CHANNEL FOUR TELEVISION CORPORATION - TRADEMARK FATHER LIMITED - F COMME FILM - CINÉ-@ - ORANGE STUDIO. 2020
The Father, c’est d’abord un immense comédien, Anthony Hopkins. L’acteur rentre dans la peau de ce vieillard qui perd la tête avec une sincérité totalement déconcertante. Florian Zeller donne au personnage le même prénom que celui de l’acteur. Le trouble est à son comble, au point que l’on est saisi, malgré soi, d’empathie à l’égard autant du personnage que de Hopkins lui-même. Une scène emblématique dans un cabinet médical montre l’homme, recroquevillé sur sa chaise, la bouche ouverte, les yeux vides, et miracle de la mise en scène, on ne voit plus un comédien qui joue cet homme qui déraille, mais une personne âgée qui pourrait être Anthony Hopkins lui-même. Quand, à un autre moment, le film montre le vieillard incapable de mettre son pull, l’empathie du spectateur envers lui est immédiate. Car Zeller n’abuse jamais de la dimension agressive ou teigneuse de la personne âgée. Il décrit un homme qui a vieilli sans doute trop vite, a élevé deux filles, et essaye de gérer au mieux la folie qu’il perçoit l’envahir. On ne peut s’empêcher de se projeter dans ce personnage en pleine confusion mentale, en imaginant les réactions que nous pourrions nous-mêmes avoir si nous nous voyions perdre la raison.
- Photo : Sean Gleason © NEW ZEALAND TRUST CORPORATION AS TRUSTEE FOR ELAROF - CHANNEL FOUR TELEVISION CORPORATION - TRADEMARK FATHER LIMITED - F COMME FILM - CINÉ-@ - ORANGE STUDIO. 2020
Incontestablement, The Father mérite les récompenses dernières aux Oscars. C’est un film qui rend hommage au comédien Hopkins. C’est surtout un film qui parle de la vieillesse sans juger, de la difficulté pour les enfants à prendre en charge leurs parents défaillants, et du cours de la vie où, avec l’âge, on se retrouve dans la dépendance. La grandeur du film réside dans le fait que le réalisateur choisit une mise en scène volontairement décalée et en trompe-l’œil, pour ne jamais décrire de front les ravages de la sénilité.
Le test DVD
Une pareille sortie en DVD est un évènement. L’interface du DVD est simple et accessible, permettant d’arriver sur le film, dans la version que l’on souhaite, de façon aisée.
Le son
La bande-son est à la hauteur du récit, notamment lors à l’ouverture du plan séquence accompagné du fameux air The Cold Song. La musique classique, si importante pour le héros est très bien mise en valeur.
L’image
On retrouve les couleurs de Londres, le charme si particulier de la capitale anglaise grâce à une image qui ne souffre d’aucun défaut sur le petit écran.
Les suppléments
Le bonus propose 3 scènes coupées au montage qui n’apportent rien de plus au film qui brille déjà de talent dans la version proposée au cinéma.
Test DVD/Bluray
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