Drame
Le 17 septembre 2002
Dix plans séquences pour déchiffrer la vie émotionnelle d’une femme iranienne, sans jamais dévoiler tout à fait la clé de l’énigme.
- Réalisateur : Abbas Kiarostami
- Acteurs : Mania Abkari, Amin Maher
- Genre : Drame
- Nationalité : Français, Iranien
- Editeur vidéo : MK2 Video
- Durée : 1h34mn
- Reprise: 2 juin 2021
- Date de sortie : 18 septembre 2002
- Festival : Festival de Cannes 2002
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Résumé : Ten met en scène dix séquences de la vie émotionnelle de six femmes, qui pourraient aussi bien être dix séquences de la vie émotionnelle d’une seule et unique femme. Celles-ci sont amenées à relever des défis à une étape particulière de leur vie.
Critique : Palme d’or à Cannes en 1997 avec Le Goût de la cerise, Abbas Kiarostami, a illuminé l’édition 2002 du festival avec un film minimaliste. D’une simplicité désarmante, Ten déchiffre en dix plans séquences la vie émotionnelle d’une femme iranienne, sans jamais dévoiler tout à fait la clé de l’énigme.
Ten : Dix séquences, une femme, une voiture, et une caméra DV embarquée qui filme en plans fixes les conversations de la conductrice et de ses passagers. Presque un huis clos, si l’on ne sentait la ville palpiter en arrière-plan et s’immiscer dans le cadre. Dans tous les cas, voilà ce qu’il ne faut surtout pas attendre de Ten : le portrait de la femme iranienne d’aujourd’hui.
Abbas Kiarostami, réduit les moyens techniques au minimum : une DVcam 35 mm, des lumières naturelles même lorsqu’il fait nuit noire, pas de mise en scène à proprement parler. Devant la caméra, une petite galerie de personnages est convoquée. La conductrice d’abord, une femme divorcée qui vit avec un autre homme et qui tente d’affirmer sa liberté. Et puis il y a son fils d’une dizaine d’années, déjà dur et parlant sans respect à sa mère, des passagères de hasard : une femme croyante rencontrée à la sortie d’un lieu de culte, une prostituée embarquée sur un malentendu, et quelques autres encore, qui confient une part d’eux-mêmes sur le fauteuil du passager.
Ten préfère la conversation à la révolte. Elle peut tourner à la dispute, à la colère, à la joute verbale, mais c’est toujours un échange qui laisse une lueur d’espoir même lorsque la portière se claque pour mettre fin à la séquence. Le premier projet Abbas Kiarostami, consistait à mettre en scène une psychanalyste. Il a été abandonné parce que cette femme aurait été condamnée au silence, cantonnée dans l’écoute. Dans la version finale de Ten au contraire, la conductrice est volubile, avide de mettre en mots ses sentiments et de laisser sa voix chaude leur donner du corps. Plus libérale que libre, elle tente sans succès de faire accepter ses choix à son fils et de comprendre le parcours d’autres femmes rencontrées parfois par hasard.
La parole prend d’autant plus d’importance qu’elle seule peut circuler librement dans le cadre. Dans la promiscuité de l’habitacle de la voiture, les corps eux ne se touchent presque jamais. Même le fils rechigne à embrasser sa mère. Pourtant, vers la fin du film, la main de la conductrice franchit la ligne invisible qui la sépare de sa passagère et abolit cette frontière le temps d’un contact, aussi bref que formidablement apaisant.
Cela n’est qu’un exemple de toutes les richesses qui peuvent emplir ce cadre fixe, d’apparence si rigide et pourtant plein de surprises. Pendant que des drames se révèlent à demi-mot sur les sièges de la voiture, la ville occupe tout l’arrière plan. Les cris des hommes, les bruits du trafic qui se déroulent hors champ prolongent le cadre bien au-delà de ses limites. Tout ce background relève du documentaire. Et l’on voit bien là la main d’un grand maître du cinéma, qui, avec des moyens techniques réduits à l’extrême, scénarise le réel en jouant avec sa substance même.
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