Le 18 décembre 2016
LaBruce signe une sorte de manifeste narcissique, un essai radical à la fois intéressant et déplaisant.
- Réalisateur : Bruce LaBruce
- Acteurs : Bruce LaBruce, Liza LaMonica
- Genre : Comédie dramatique, LGBTQIA+
- Nationalité : Canadien, Allemand
- Editeur vidéo : Épicentre Films Éditions
- Durée : 1h43mn
- Date de sortie : 9 septembre 1998
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– Année de production : 1994
– Le film est inclus dans le coffret Bruce LaBruce avec No skin off my ass et Hustler White
– Sortie du coffret DVD : le 6 décembre 2016
Résumé : Constitué d’entretiens et de films dans le film, "Super 8 1/2" retrace la décadence d’une star du cinéma porno, Bruce. On y voit aussi des apparitions de personnages jouant leur propre rôle de références underground tels que Vaginal Creme Davis, Ben Weasel ou Richard Kern, sans parler de la légende vivante de la télé, Buddy Cole, alias Scott Thompson.
Notre avis : Il y a dans ce film, et ce dès le titre, entre la référence prétentieuse voire mégalomaniaque à Fellini et l’ajout du « super » qui la mine, un étonnant mélange de sérieux et de dérisoire, d’angoisse et de nombrilisme complaisant. Soit donc un film qui ne se fait pas, interrompu par la perte du désir -mais c’est le Super 8 1/2 que l’on voit (ou plus vraisemblablement un autre) – un autre qui se fait -et qui dans le même temps a été fait, car on ne cesse de changer de temporalité- signé de « Googie », femme cinéaste d’avant-garde et un autre, en flash-back, récit de la destruction de LaBruce par ce tournage, plus les extraits des pornos joués et / ou réalisés par lui. On assiste donc à un patchwork curieux, qui emprunte aux codes de l’underground et ne cesse de pratiquer la rupture comme la mise en abyme ; malgré les extraits hards, on est surtout dans une interrogation narcissique, voire, un peu à la manière de Fellini, une entreprise de conjuration masochiste : LaBruce ne cesse de se dévaloriser, jusqu’à moquer son style avec un humour froid.
Et pourtant il s’inscrit dans la suite de No skin off my ass, avec ces longs plans inutiles du point de vue de la narration, son esthétique sale et son refus du beau ; le mauvais goût règne en maître, entre vomissements et scènes de sexe qui mettent mal à l’aise. L’exhibition y est le mode dominant, chaque personnage soignant ses apparitions, et si tout tourne autour du cinéaste, les autres ne cessent de s’en plaindre à longueur d’entretien. Mais l’exhibition est aussi un procédé : les cartons de titres, ou les erreurs voulues par rapport à la norme (surexpositions, flous …) sont autant de manière de s’exclure du cinéma dominant : l’angoisse qui peut en résulter se manifeste par l’avenir envisagé : camisole, dépression, solitude, échec.
Au bout du compte, avec ce film extrême, trop long, trop complaisant, excessif, LaBruce va jusqu’au bout de sa période underground : en deux films, il invente un style et sa théorie critique, et même la dérision de cette théorie (le « délire des critiques qui parlent de distanciation brechtienne ») en un geste quasi-abstrait et constamment déconcertant. Ce n’est sans doute pas son film le plus facile, mais, avec les précautions d’usage (interdiction aux moins de 16 ans justifiée), les spectateurs curieux (et patients) verront un essai en forme d’impasse inaboutie, à mille lieues du tout-venant, exaspérant et passionnant.
Le suppléments :
Dans un entretien « rétrospectif », le cinéaste retrace son parcours depuis l’enfance avec une rigueur, un sérieux et une sobriété inattendus. C’est instructif et parfois touchant (15 minutes). La galerie photos qui l’accompagne est très modeste.
L’image :
La cotation n’a pas grand sens, tant l’image est sale par moments, jusqu’au super-8 quasi illisible ; mais la copie a été restaurée et correspond aux visées esthétiques du cinéaste.
Le son :
On est dans le même cas que pour l’image : le son n’est pas net, sans nuances ni profondeur ; il est parfois abusivement post-synchronisé, mais tout ces effets sont voulus.
Galerie Photos
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