Le 25 juin 2024
Un récit en demi-teinte sur les errances identitaires d’un jeune homme, devenu sans-papier, qui doit lutter contre lui-même et les inepties du système administratif français. Le récit est ambitieux, mais pèche singulièrement par invraisemblance.
- Réalisateur : Karim Bensalah
- Acteurs : Karina Testa, Kader Affak, Hamza Meziani, Abbes Zahmani, Mehdi Djaadi, Souad Arsane, Magdalena Laubisch
- Genre : Drame
- Nationalité : Français
- Distributeur : Jour2fête
- Durée : 1h36mn
- Date de sortie : 19 juin 2024
- Festival : Festival Premiers Plans Angers 2024
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Résumé : Sofiane, fils d’un ex-diplomate algérien, a beaucoup voyagé. Installé à Lyon pour ses études, il est victime d’une décision administrative et vit sous la menace d’une expulsion. Dans l’espoir de régulariser sa situation, il accepte de travailler pour des pompes funèbres musulmanes. Entre les fêtes, les rencontres et son emploi, Sofiane va se découvrir dans un parcours initiatique qui le conduira à construire sa propre identité, et passer peu à peu vers l’âge adulte.
Critique : Sofiane, Souf pour les intimes, est étudiant. Il affectionne manifestement moins les études que les fêtes estudiantines, la consommation d’alcool ou de stupéfiants, et la drague d’un soir. Sauf qu’à force de jouer avec le temps, les échéances administratives s’approchant, il finit par perdre son titre de séjour et se retrouve en risque d’être expulsé du territoire français, à moins d’obtenir un contrat de travail.
Parler de l’immigration sous toutes ses formes demeure un sujet tout à fait louable, dont d’ailleurs de nombreux réalisateurs s’emparent. Mais le minimum en la matière est de se renseigner et d’inscrire son récit dans un environnement juridique crédible, au mieux réaliste. Car la situation que subit Sofiane n’existe absolument pas. On ne se retrouve pas sans-papier par simple courrier, du jour au lendemain, et encore moins en passe d’être régularisé sous réserve de trouver un contrat de travail en moins de dix jours. Cette vision est, du point de vue du nombre de personnes en situation d’expulsion du territoire français, totalement insultante, tant on sait que les rendez-vous à la préfecture pour faire renouveler son titre de séjour demeurent une obsession et qu’aucun migrant qui risque d’être renvoyé dans son pays ne prend les choses avec une telle désinvolture.
- Copyright Tact Production
Une fois ces éléments posés, le long-métrage dresse le portrait complexe d’un garçon, fils de diplomate, qui a moins les traits d’un héros que la figure contrastée d’un jeune homme touchant mais totalement désagréable. Son rapport aux aînés, au travail et aux femmes le rend complètement détestable et tout le moteur du récit s’évertue à reconstruire une image positive de Sofiane.
Sur les recommandations de son père, Sofiane choisit, comme voix de réinsertion, un travail dans une société de pompes funèbres musulmanes. Le titre n’est d’ailleurs pas sans faire référence à une célèbre série qui retraçait le destin d’une famille œuvrant dans le domaine des enterrements. Six pieds sur terre est bien loin du cadre passionnant de ladite série. Il faut toutefois reconnaître que le spectateur profane apprend beaucoup des rituels musulmans en matière de cérémonie funéraire, ce qui constitue vraiment un point très fort du film. Le réalisateur s’appuie notamment sur un personnage âgé, qui accompagne les familles avec une belle dignité et une persévérance à toute épreuve.
- Copyright Tact Production
Mais l’intérêt sociologique s’estompe vite, pour céder à un film brouillon, absolument pas crédible, qui ne cesse d’hésiter entre le récit initiatique et le rachat moral du personnage principal. Les comédiens incarnent avec une grande générosité leurs personnages, à commencer par les deux sœurs du protagoniste qui tirent le film vers le haut. Ce sont elles qui concentrent en réalité le point d’orgue narratif de l’histoire et amènent le jeune homme à engager un cheminement personnel vers une amélioration de soi et une plus grande maturité.
Six pieds sur terre regorge de bonnes idées, tout en étant pétri de belles intentions. Néanmoins, les écarts grossiers avec la réalité empêchent toute forme d’empathie à l’égard du personnage principal, et finissent par lasser le spectateur à force d’invraisemblances. Mais Karim Bensalah ne manque pas de ressources. Il est fort à parier que son prochain long-métrage aura gagné en maturité et clarté.
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