Le kid
Le 22 octobre 2014
Charles Lane réalise un objet hybride et intemporel, à la manière d’un burlesque muet, qui rappelle combien le cinéma américain peut être inventif.
- Réalisateur : Charles Lane
- Acteurs : Charles Lane, Nicole Alysia
- Genre : Comédie dramatique, Film muet, Noir et blanc
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Carlotta Films
- Editeur vidéo : Carlotta Films
- Durée : 1h41mn
- Date télé : 22 juin 2024 20:50
- Chaîne : TCM Cinéma
- Reprise: 9 octobre 2013
- Date de sortie : 18 avril 1990
- Festival : Festival de Cannes 1989
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Résumé : À New York, en plein hiver, un artiste de rue noir gagne sa vie en dessinant le portrait de passants. Il emménage bientôt dans le sous-sol d’un vieil immeuble abandonné. Un soir, il est témoin, dans le quartier de Manhattan, du meurtre d’un homme. Il recueille sa petite fille de deux ans, et, au même moment, vit une histoire d’amour avec une jeune femme de son âge.
Critique : Salué à sa sortie à l’unanimité, détenteur de plusieurs prix (Prix de la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes en 1989, Grand Prix de Chamrousse en 1990, Prix Spécial Guggenheim en tant que "meilleure source d’inspiration pour les enfants"), Sidewalk stories a connu chez nous par la suite une carrière "scolaire", puisqu’il est souvent étudié en classe, dès le primaire. Avec un tel retentissement, on s’attendait à ce que Charles Lane poursuive une carrière dans le cinéma indépendant et ouvre une voie originale. Or, il n’a réalisé depuis qu’un film, Double identité, passé inaperçu.
- © Carlotta Films
L’œuvre elle même est un objet étrange et hybride : en effet, si le thème, le jeu des acteurs et certaines situations renvoient au burlesque muet (et au premier plan, évidemment, au Kid de Chaplin), la mise en scène évoque plutôt le cinéma hollywoodien classique (choix des cadres, montage), les conditions de tournage sont celles du cinéma indépendant (de Godard à Cassavetes), et le geste lui-même, en ce qu’il réinterprète une œuvre, un style, est maniériste. Néanmoins Lane parvient à harmoniser et même à justifier ce mélange par sa démarche, celle d’un réalisateur politique, pénétré de l’urgence de montrer, et par là même dénoncer, la misère urbaine. En ce sens les multiples références et influences convergent vers une idée forte : la misère contemporaine est la même que celle des années 1920 (Chaplin) et des années 30 (les grands films sociaux américains). Pour la mettre en scène, encore à la manière de Chaplin, il interprète un SDF sans nom, débrouillard mais perpétuelle victime (voir les scènes récurrentes dans lesquelles il rend de l’argent). C’est dans la dernière séquence, stupéfiante et grave, que le message prend toute sa force, lorsque les oubliés de la société prennent la parole, mais c’est une parole plaintive, soumise. Elle est d’autant plus remarquable qu’elle fait suite à un itinéraire personnel, fait d’une alternance d’humour et d’émotion. Mais dès le début, l’opposition entre un monde blanc pressé et dominant, dont l’une des caricatures sera la bibliothécaire, et un monde ralenti où les laissés-pour-compte, souvent noirs, végètent dans la rue, est exprimé en quelques plans. La dernière séquence, brutale on l’a vu, est une manière de retour à la réalité d’aujourd’hui, qui fait écho à ce début. En un sens, elle rappelle la fin de La Nuit de Varennes, avec cette montée vers le Paris actuel, montrant que, somme toute, rien ne change.
Le test DVD
Carlotta exhume un nouveau bijou méconnu et, comme souvent, publie une édition d’une grande richesse.
Les suppléments
Le commentaire audio témoigne de la complicité entre le réalisateur et le compositeur. Quelques informations sur le tournage et les acteurs, mais l’essentiel tourne autour de l’analyse de la musique dans ses thèmes, ses influences, le rôle des instruments. Les anecdotes, plutôt rares, sont intéressantes, mais les propos de Lane frisent parfois la paraphrase. Les deux se retrouvent pour un entretien de 28 minutes, intitulé Vibrations. Différents thèmes sont abordés (influences, conditions de tournage, musique encore) dans ce qui ressemble à une conversation à bâtons rompus qui enrichit notre vision du flm.
Carlotta propose ensuite un court-métrage de 1997, par le même réalisateur et le même compositeur. En 34 minutes, Lane utilise une partie de ce qui deviendra Sidewalk Stories. L’histoire se concentre sur l’histoire d’amour, la petite fille et la dénonciation sociale sont absente ; autrement dit, le court est surtout un hommage au burlesque et à Chaplin (sa musique est même reprise explicitement). L’intérêt principal est la comparaison avec le long-métrage. À noter que ce petit film n’a pas été restauré.
Enfin, une bande annonce de 2013 complète ce programme fourni.
L’image
Le noir et blanc est sublimé par une restauration exigeante : la définition, les contrastes sont saisissants. Pour faire la fine bouche, précisons que quelques rares plans manquent de stabilité.
Le son
Là encore, le travail est conséquent : la richesse orchestrale se développe en profondeur et en finesse malgré la présence d’une seule piste en mono 2.0 DTS HD Master Audio. Elle restitue la moindre nuance des instruments, sans souffle ni saturation.
– Sortie DVD et Blu-ray : 8 octobre 2014
Galerie photos
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