Exilé à Paris, Pablo s’apprête à s’envoler pour le Chili où sa mère vient de décéder quand il tombe par hasard sur Nelson, l’une des personnes qui avaient témoigné contre lui et l’avaient contraint à quitter son pays. Remontent alors, par torrents, les souvenirs de ses années d’adolescence marquées par l’éveil de sa conscience politique et de ses sens. Eternelle histoire du passé qui surgit quand vous vous y attendez le moins et que Mauricio Electorat raconte avec une certaine drôlerie, surtout quand il évoque les premiers pas de son personnage dans la gauche chilienne. Tordantes, notamment, les lettres écrites par Pablo et l’un de ses camarades en soutien à la lutte du peuple chilien et signées d’intellectuels français (vaste catégorie allant de Sartre à Platini, dont la missive sportive sera toutefois censurée).
Rythmant son roman par de rapides allers-retours entre le passé et le présent - le long d’une nuit arrosée, Pablo cherche à faire parler Nelson pour comprendre les raisons qui l’avaient poussé dans l’autre camp -, Mauricio Electorat joue à varier les styles, à planter des dialogues où bon lui semble, à introduire dans les fausses lettres les pensées de leurs véritables auteurs. Il s’amuse et amuse le lecteur, l’émerveille même un moment, puis le lasse. Car face à un tel foisonnement, on se perd peu à peu et l’on se demande si cette inventivité n’est pas là pour cacher une histoire plus personnelle (l’auteur est né au Chili en 1960 et établi à Paris depuis 1987). Sartre et la Citroneta est le premier roman de Mauricio Electorat. On en espère un deuxième.