Saint-Ange - Pascal Laugier - critique

Critique : Bonne surprise : Saint-Ange, première fiction de Pascal Laugier, est un film fantastique français très excitant. Cinéphile chevronné qui connaît ses classiques sur le bout des doigts, le réalisateur emprunte habilement quelques recettes aux nouveaux prodiges espagnols (Les autres d’Alejandro Amenabar, Darkness de Jaume Balaguero) quand ce n’est pas au bis italien (digressions morbido-absurdes à la Michele Soavi), à Argento (effets tarabiscotés, meurtres colorés, chats noyés comme dans Inferno), voire même, suprême audace, au Cercle infernal (Richard Loncraine, 1978). Sur ces bases solides, l’atmosphère est ouatée, angoissante, trouble. Faisant fi de tout rationalisme, le scénario est complexe : il ne suit pas sagement une ligne droite, préfère les recoins sombres, les dérivations tordues, les obstacles gênants tout en ménageant des surprises. Un peu comme dans Deux sœurs, c’est ce conflit entre un script alambiqué et une ambiance familière qui suscite l’angoisse.

La démarche est astucieuse mais fonctionne à double tranchant. Les correspondances (sorte de melting-pot de ce qui se fait de mieux en matière de fantastique) réjouissent les amateurs, en même temps que les prises de risque froissent ceux qui n’ont pas envie de goûter à la folie démoniaque de l’ensemble, notamment le final kubrickien que certains trouveront abscons et inapproprié. En réalité, il sert à mettre en place une conclusion ouverte où le spectateur a la liberté de créer son histoire avec les indices parsemés tout le long du film, à travers les dialogues, allusions, hallucinations, vérités, mensonges et rêves. Pas calibrée pour les bouffeurs de pop-corn, plus viscérale et mature que prévu, cette première œuvre bizarre et impolie, organique et stimulante, ne résout rien mais hante longtemps l’esprit après la projection. Comme un songe lointain jamais vraiment éteint.

Le DVD

Les suppléments : Les amateurs de making of seront inévitablement déçus par les vingt-quatre minutes proposées. Durant cette maigre durée, le réalisateur Pascal Laugier, ses actrices Lou Doillon et Virginie Ledoyen, et le producteur Christophe Gans, reviennent sur Saint-Ange. Intéressant sans être forcément captivant. On aurait apprécié un approfondissement des intentions de Pascal Laugier, qui révèle, une fois n’est pas coutume, un authentique regard de cinéaste de genre.

Image & son : Image parfaite qui bénéficie d’un contraste pointilleux, rendant ainsi justice aux scènes d’angoisse plongées dans la pénombre. Il en va de même pour le mixage qui fait péter avec jubilation le 5.1 : craquement d’os, chute de corps et miroir brisé vous feront sauter au plafond.