Inferno
Le 14 novembre 2023
Une brillante histoire à dormir debout, desservie par une structure narrative un peu trop ardue.
- Réalisateur : Kim Jee-woon
- Acteurs : Moon Geun-young , Lim Su-jeong , Woo Ki-hong
- Genre : Drame, Fantastique, Thriller, Épouvante-horreur
- Nationalité : Sud-coréen
- Distributeur : The Jokers
- Durée : 1h59mn
- Reprise: 15 novembre 2023
- Titre original : Janghwa, Hongryeon
- Âge : Interdit aux moins de 12 ans
- Date de sortie : 16 juin 2004
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– Reprise en version restaurée : 15 novembre 2023
Résumé : Après une longue absence, deux sœurs rentrent à la maison familiale. Leur belle-mère les accueille. Les jours passent et des événements étranges surgissent. Que s’est-il passé ? Pourquoi les deux sœurs ont-elles peur de leur marâtre ? Pourquoi voit-on la sœur aînée à l’hôpital au début ? Pourquoi les oiseaux ne se cachent-ils pas pour mourir ?
Critique : L’introduction a le mérite d’être probante, elle semble annoncer les prémices d’un film fantastique fulgurant : ambiance feutrée, rythme émollient, personnages ambigus, demeure angoissante... Réalisé par Kim Jee-woon dont on retient Quiet family (qui a déjà son remake par Takashi Miike), Deux sœurs s’inspire d’une nouvelle célèbre qui a passionné le pays du Matin Calme pour échafauder une intrigue à l’angoisse sourde. Reposant sur une base solide, le film bénéficie de la profusion de thrillers horrifiques asiatiques qui nous sont parvenus depuis. Faute d’être arrivé avant, Deux sœurs essaie de reproduire le même schéma avec des moyens détournés. Mais ce n’est pas de l’opportunisme : Kim Jee-woon, formaliste de renom, cinéaste cinéphile, remet au goût du jour un thème éculé qui l’obsède depuis longtemps : le squelette dans le placard.
- © 2023 Les Acacias
À travers ce subterfuge, il se permet toutes les audaces, dont celle d’alambiquer un récit ordinaire et de perdre le spectateur dans un dédale d’images. La structure narrative est tellement ardue qu’elle peut décourager. Le grand mérite de cet entrelacs, où la réalité la plus cruelle se heurte aux fantasmes les plus fous, est de permettre au spectateur de formuler toutes les hypothèses possibles. C’est un peu comme dans Ne vous retournez pas (Nicholas Roeg, 1972) où le scénario multiplie les fausses pistes avant de délivrer en un éclair un coup de théâtre final qui remet en cause tout ce que nous avons vu auparavant. On peut aussi faire fi de cet écheveau manipulateur aux effets parfois triviaux et se concentrer sur les protagonistes. Parallèlement à la relation exclusive des deux sœurs (deux actrices formidablement expressives et touchantes), Kim Jee-woon dessine en creux les conflits des autres personnages. À des échelles variables, ils sont tous confrontés à des démons peu ou prou inavouables. Contre toute attente, ce que le cinéaste réussit le mieux n’est pas tant les apparitions ectoplasmiques mais la description méticuleuse, fragile et cruelle du monde de l’enfance, avec ses peurs, ses initiations, ses secrets...
- © 2023 Les Acacias
Comme dans Souvenirs, le segment que Kim Jee-woon avait réalisé pour le film à sketches Trois histoires de l’au-delà, la forme a parfois tendance à prendre le pas sur le fond. Pourtant, Deux sœurs est moins un film fantastique (il a été hâtivement présenté comme un ring-like) qu’un drame humain déchirant dans lequel une demoiselle schizophrène recompose progressivement le puzzle de sa vie, voit son monde s’écrouler autour d’elle et observe les gens qu’elle aime disparaître les uns après les autres, silencieusement, en retenant son souffle, en voulant croire qu’ils sont toujours avec elle (la sœur), et dont l’absence (la mère) détruit la raison et attriste les autres (le père, singulièrement mutique). Il y a aussi cette marâtre, méchante fantasmée, responsable du massacre, qui disparaît au moment où l’héroïne apparaît : deux facettes d’un même personnage en contradiction avec lui-même.
Ce manque d’affection, cette sensation d’abandon, de perte de repères, ce travail sur soi-même pour comprendre les raisons de sa propre folie... C’est toute cette confusion intérieure que le cinéaste retranscrit au plus juste. Ce charivari qui bouleverse discrètement. Ce qui fait de lui non pas un nouveau Nakata mais un brillant conteur d’histoires à dormir debout.
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