Démente religieuse
Le 13 décembre 2006
Un film allemand troublant, plombé par quelques temps morts mais habité magnifiquement par Sandra Hüller. La révélation d’une actrice, prix d’interprétation à Berlin.
- Réalisateur : Hans-Christian Schmid
- Acteurs : Sandra Hüller, Burghart Klaußner, Imogen Kogge, Anna Blomeier, Nicholas Reinke
- Genre : Drame
- Nationalité : Allemand
- Distributeur : Océan Films
- Durée : 1h33mn
- Date de sortie : 13 décembre 2006
- Festival : Festival de Berlin 2006
Résumé : 1970. Michaela, vingt-et-un ans, grandit dans une petite ville du sud de l’Allemagne entre un père faible et affectueux et une mère autoritaire. Depuis de nombreuses années, elle souffre d’épilepsie et rêve de reprendre ses études à l’université. Elle y découvre la liberté, l’amitié d’Hannah et un amour naissant pour Stephan. De nouvelles attaques épileptiques plus violentes que les précédentes lui font entendre des voix et lui révèlent d’inquiétantes apparitions...
Critique : Voici le film parfait pour une anti-soirée de Noël ! Ou comment le Saint-Esprit finit par ravager une jeune fille plus très saine du sien, d’esprit... Nous sommes en Allemagne dans les années 70 (le grain de l’image est d’ailleurs là pour nous le rappeler). Michaela parvient à reprendre ses études malgré des crises d’épilepsie régulières et les reproches de sa tyrannique de mère. À la fac, elle va découvrir une liberté inédite faite de transes musicales (Deep Purple et Amon Düül), d’alcool, de garçons, bref de tout ce qui lui était interdit par la bondieuserie domestique. Une émancipation filmée par une caméra épileptique, elle aussi, les crises de la jeune femme pouvant intervenir à tous moments.
Et elles vont bien intervenir ces crises, de plus en plus souvent et avec une gravité croissante, comme si Michaela se punissait du fait de pouvoir enfin vivre comme elle l’entend, loin de sa mère acariâtre. C’est là que le film de Hans-Christian Schmid devient passionnant. Même si Michaela semble se libérer, elle est bien vite rattrapée par une morale religieuse tenace, symbolisée par la roseraie offerte par sa mère. Cette même roseraie qui va déclencher les crises les plus sérieuses. Dès lors, comment admettre que sa mère avait raison, qu’elle ne peut pas vivre comme tout le monde avec cette satanée épilepsie ? Comment s’opposer au monstre maternel sans renier sa dévotion religieuse ? La réponse est fascinante : en s’enfermant dans un délire démoniaque. Voyant son rêve d’émancipation remis en cause, Michaela va se persuader que ses crises sont les symptômes d’une possession maléfique. Et puis, à cette époque, il était toujours mieux d’être possédé par le diable que prisonnier d’un cerveau malade. Michaela devient donc une martyre, s’oppose enfin à sa famille, mais plonge inexorablement dans la folie.
Ce "rôle à Oscar", complexe et périlleux, est parfaitement interprété par la jeune Sandra Hüller, sorte de croisement entre la chanteuse Camille et l’actrice Kirsten Dunst. Elle parvient à donner à son personnage un aspect à la fois grave et mutin qui emporte notre adhésion. Mais cette brillante composition ainsi que les réflexions fécondes sur les illusions de la foi et la psychanalyse ne masquent pas totalement les carences du film. Notamment sa propension à faire du surplace en son milieu et surtout cet air tenace de déjà-vu. En effet, la réalisation estampillée "Dogme", la jeune fille martyre éprise de religion et le village provincial nous font irrémédiablement penser au magnifique Breaking the Waves de Lars von Trier. Requiem n’en demeure pas moins un film hautement recommandable de par son réalisme fantastique diablement efficace.
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Norman06 22 avril 2009
Requiem - Hans-Christian Schmid - critique
Excellent film réaliste sur un thème cher au fantastique. Une œuvre maîtrisée d’un cinéaste à suivre.