Le corps en opposition
Le 20 octobre 2009
Documentaire éprouvant mais nécessaire sur le destin tragique d’une jeune militante. On pleure de rage.


- Réalisateur : Simone Bitton
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Français
- Date de sortie : 21 octobre 2009
- Plus d'informations : Le site officiel du film

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– Durée : 1h40mn
Documentaire éprouvant mais nécessaire sur le destin tragique d’une jeune militante. On pleure de rage.
L’argument : Le film enquête sur la mort de la pacifiste américaine Rachel Corrie, 22 ans, écrasée par un bulldozer israélien en mars 2003 alors qu’elle tentait d’empêcher la destruction de maisons palestiniennes.
A travers le destin tragique de Rachel, qui tenait un journal de voyage sous forme d’e-mails qu’elle envoyait à sa famille et à ses amis aux Etats-Unis, le film médite sur les thèmes de l’idéalisme, de l’engagement, de l’utopie politique.
La Palestine est ici réalité et métaphore, un tombeau pour une enfant d’aujourd’hui.
Notre avis : Simone Bitton, spécialiste du Monde Arabe et du conflit israélo-palestinien, nous livre avec Rachel un documentaire éprouvant mais d’une nécessité quasi vitale pour que le tragique destin de cette jeune américaine ne soit jamais considéré comme un « simple » dommage collatéral.
Il y a plusieurs films dans Rachel. D’abord la représentation d’une jeunesse internationale engagée dans des actions étrangères à leurs histoires personnelles et territoriales. Une sorte de mondialisation positive du mouvement de protestation contre toutes formes d’injustices et d’inégalités. Dit comme cela, ça fait un peu « Oui-Oui dans la Bande de Gaza ». Mais le cynisme n’est pas de mise dans cette affaire. Bien sûr, on peut toujours s’interroger sur les motivations profondes de ces jeunes militants (religion, désir d’aventure, quête de soi) mais ce serait totalement vain. Ils existent tout simplement. Rachel a existé et elle est morte pour l’idée qu’elle se faisait d’un monde juste. Point. Pour faire revivre Rachel et son combat, la caméra revient sur ses différents lieux de vie comme s’ils appartenaient désormais à l’Histoire. Les voix de ses camarades nous lisent les carnets qu’elle a tenu depuis son arrivée jusqu’au drame, nous la rendant ainsi familière. Elle devient cette amie que l’on aurait très bien pu côtoyer sur les bancs de la fac.
- © Les Films du Paradoxe
Le second film, c’est l’enquête rigoureuse menée par Simone Bitton pour faire vaciller la version officielle édifiante des autorités israéliennes, présentée au début du métrage, sur cet « incident regrettable ». Témoignages des deux partis, retour sur les lieux, reconstitution mentale à partir des souvenirs de chacun, en laissant le spectateur se faire une opinion. Mais peu importe cette opinion d’ailleurs. Les faits sont là. Le cadavre de Rachel est montré à plusieurs reprises. Rien de sordide à cela. C’est une preuve que ce qui s’est passé n’aurait pas dû se passer. Les conducteurs du bulldozer ont-ils sciemment roulé sur la jeune fille ? A-t-elle perdu l’équilibre sur le monticule de terre ? On ne le saura jamais mais une chose est sûre, aucun conflit ne mérite qu’un être humain croise un jour la route d’un bulldozer.
En arrière plan, il y a bien entendu la souffrance des Palestiniens. Chaque mort mérite un film, mais c’est l’histoire atypique de Rachel qui nous est contée. C’est ainsi, la cinéaste le regrette presque à un moment donné de son travail. Mais au final peu importe ses fondements, à l’instar des motivations militantes, le film a le mérite d’exister lui aussi et il faut aller le voir d’urgence.
- © Les Films du Paradoxe