Chape de plomb, chape de béton
Le 16 décembre 2005
Un reportage de chaque côté du mur qui sépare Israël des territoires palestiniens : entre lucidité et désespoir, un état des lieux sans emphase d’une situation sans lendemain.
- Réalisateur : Simone Bitton
- Genre : Documentaire, Politique
- Nationalité : Israélien, Français
- Editeur vidéo : Les Films du Paradoxe
- Festival : Festival de Cannes 2004
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– Durée : 1h37mn
Un reportage de chaque côté du mur qui sépare Israël des territoires palestiniens : entre lucidité et désespoir, un état des lieux sans emphase d’une situation sans lendemain.
Varda en son temps, toujours voyageuse, s’était promenée à Los Angeles pour nous rapporter des images de ces "murs" qui séparent et qui unissent les hommes. Dans Mur il est beaucoup question de séparation : l’union n’est pas pour demain sur ces terres sèches où les hommes n’expriment qu’un désespoir fatigué. Même décorés et peinturlurés, les enfants ne voient en eux que la trace d’une séparation : es-tu juive ou arabe, toi qui nous filmes, et cette caméra n’est-elle pas une arme ?
Si la vérité sort de la bouche des enfants, la situation n’est pas encourageante. Rien d’encourageant en somme dans ce film-état des lieux d’une situation plombée. Chape de plomb, chape de béton. Si quelques discours techniques (sécuritaire pour le militaire, qui dissimule mal lui-même sa lassitude, et commercial pour le fabricant spécialiste du béton) tentent d’expliquer le mur, tous les autres le condamnent : discours nostalgique des Palestiniens séparés, discours plein de bon sens d’un paysan arabe prospère... tous, des deux côtés du mur, témoignent d’un regret accablé : "Israël d’en bas" coupée de son élite gouvernementale, et Palestine condamnée à sa misère. Pour tous ces gens que rencontrent Simone Bitton, en particulier les Israéliens, la solution du mur n’en est pas une. Le père de famille qui a peur pour la sécurité de ses enfants n’y croit pas davantage que le psychiatre qu’il n’est possible d’interviewer que par téléphone. La prière sur la Tombe de Rachel transformée en bunker, les olives qui pourrissent sur pied faute de mains autorisées à les cueillir... Mur laisse planer une ombre presque fatidique sur l’avenir d’une terre où tous souhaiteraient trouver la paix - l’Irakien exilé comme la jeune Israélienne témoin des transfuges quotidiens sous ses fenêtres.
Le film fait parfois le choix, intéressant, de se concentrer sur les failles du système. Les brèches dans le mur. Ces lieux où hommes et femmes passent, malgré tout, parce qu’il "faut" passer. Et qui livrent à l’image leur voix invisible et triste : ce film est important pour eux qui témoigne de leur malheur. C’est dans ces moments-là, dans ces images où les terres se rejoignent en cachette, que Mur est le moins désespéré. Brèves brèches et courtes lueurs dans un témoignage sans lyrisme (celui d’une splendide musique arabe est lui aussi très mesuré) et qui ne cède à aucun fatum - sinon celui d’une réalité bien présente, grise et froide comme le béton.
Le point de vue de Simone Bitton intéresse aussi par le passage qu’elle a réussi de l’un à l’autre côté du mur qui sépare Israël de la Palestine. Mur est en somme un brûlot sur ce que Simone Bitton dénonce comme la "maladie" d’Israël. Pas de délivrance dans cet acte physique d’enfermement et d’emprisonnement : au moins la réalisatrice aura-t-elle, partiellement et momentanément, ouvert le mur de silence qui entoure ce mur entre Palestiniens et Israéliens. Avant tout, pour en montrer avec courage tout l’absurde et la dureté.
Le DVD
Ce DVD contient deux entretiens de la réalisatrice, Simone Bitton, avec le cinéaste israélien Elia Suleiman et avec Michel Khleifi, dans lesquels elle rappelle utilement les motivations, les enjeux et les difficultés de cette réalisation.
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